LA GAZETTE DE L'A.R.B
Anyvonne Restaurant Bar
 
Le Brésil à Rio de Janeiro - Journal de bord
N°38 - Mars 2012

 

 


 

Un petit tour du monde pour un coin de Paradis?

En février 2011, au terme d'une traversée de l'Atlantique sud amorcée en Namibie, nous atteignions pour la seconde fois de notre voyage la côte brésilienne. C'était une des nombreuses façons de considérer qu'on bouclait là un tour du monde:

- Recouper la longitude de Paimpol? Nous l'avons fait aux environs de Saint Hélène.
- Retrouver une côte ou un pays déjà atteint une fois? Eh bien c'est juste maintenant, au Brésil. La fois précédente, c'était en février aussi...1999!
- Recouper notre propre route? Ce sera à Salvador de Bahia, dans quelques mois.
- Revenir à notre point de départ? Alors là???

Quel que soit le critère retenu, on ne peut pas dire que ça aura été un tour rapide! Quasiment treize ans...

Depuis quelques années déjà, le skipper désirait ardemment retrouver le Brésil et découvrir cette région de Rio où nous venons d'arriver...
Des souvenirs et des références: L'homme de Rio? Orfeu Negro? Astrud Gilberto? L'attrait de la samba? L'image des meneuses emplumées des bandas du carnaval?
On va pouvoir vérifier...

Nos différents guides nous l'avaient bien vendue aussi:
"On manque de superlatifs pour décrire cette région"
Après trois mois passés par ici, nous avons trouvé quelques qualificatifs qu'on vous livre par ordre alphabétique pour ne pas faire de jaloux:
Beau – bluffant – brillant - chaleureux – divertissant – ébaubissant – épatant - époustouflant – étourdissant – fabuleux – fantastique - faramineux – féérique – fou - géant – grand – inouï – joyeux – magique – magnifique – merveilleux - oh la! La! – pharaonique – prestigieux – rigolo – ubuesque – yoyo - zinzin.
Eh ben la région de Rio et les Cariocas c'est un peu tout ça... Et le carnaval, c'est le pompon

Au centre du Paradis, la baie d'Ilha Grande.

De la Baie d'Ilha Grande, nous avions entendu dire que c'était un lieu magnifique où on pouvait passer plus d'un an à se promener sans s'ennuyer. Plus récemment, on avait appris aussi qu'Angra dos Reis, qui en est la "capitale", était un bon endroit pour accomplir les formalités d'entrée au Brésil, bien plus facilement qu'à Rio.
C'est sur la base de ces informations que nous avions choisi d'en faire notre point d'atterrissage dans le pays.
Nous ne l'avons pas regretté...

La baie, qui n'est pourtant pas très profonde, bénéficie d'un micro climat assez marqué: on n'y rencontre que très peu de vent, ou alors très léger. (Ceci est vrai pour toute la zone située au nord d'une ligne joignant le Cabo Frio à Sao Francisco do sul, au sud de Sao Paulo; à tel point que la météo brésilienne en a fait une zone de prévision particulière).
Ce n'est donc pas un paradis pour la régate sportive, mais si on accepte d'entendre tourner son moteur, on peut y naviguer tranquillement et mouiller à peu près n'importe où, le long des quelques 80 milles de côtes qui bordent la baie et devant les dizaines d'îles qui y sont éparpillées; et cela dans des conditions de confort et de sécurité exceptionnelles. Pendant un an, nous n'avons quasiment jamais eu d'inquiétude à propos de la tenue de notre ancre ou de l'abri du vent. Nous avons même arrêté de consulter régulièrement la météo. Tout ça avec des eaux claires et à la bonne température.


Qu'espérer de plus?... Que ce soit beau?
Eh bien ça l'est, en plus. Extrêmement même!
Bouche bée, qu'on est, depuis qu'on est arrivés dans le coin...
On n'a pas tout vu le long de nos presque 14 ans de tour du monde, mais on n'a rencontré nulle part ailleurs un pareil bassin de navigation : immense, toujours surprenant, varié et magnifique presque partout.

A terre, c'est la Costa Verde, qui ne vole pas son nom...
De Rio jusque Sao Paolo, c'est une côte montagneuse et escarpée, dont les pentes quasi vierges de toute construction sont couvertes d'une végétation tropicale luxuriante descendant directement des sommets dans la mer...
Toute la zone est donc verte comme son nom l'indique et, contrairement à la France, la côte est très préservée et peu construite. C'est une sorte de parc national qui abrite des villages de pêcheurs et des plages innombrables, où les constructions sont généralement confinées au rivage.
Dans la Baia d'Ilha Grande, les anses, petites, moyennes ou grandes, se succèdent dans toutes les directions, ce qui permet d'en trouver rapidement une qui sera abritée du vent du moment. On passe d'une ambiance de végétation tropicale, à une plus montagnarde , genre Suisse avec ses vaches, en quelques milles...
Quasiment tous les mouillages ont vers le nord une vue superbe sur les collines, qui se déploient en 4 à 5 plans successifs et dont les sommets jouent en permanence avec les nuages.
Et "Mon dieu que la montagne est belle.." Elle se drape d'écharpes vaporeuses de coton blanc, se nappe d'un voile de pluie diaphane, s'enveloppe de gaze mauve et rose ou se détache en camaïeu de gris bleu sur champ d'azur...
Ouaaaahh!
C'était la minute lyrique... Mais ici, où la carte postale est partout, il est tellement facile de tomber dans le cliché ...
Nous n'y avons que peu de mérite et ça ne fait pas vraiment mal…

Quelques portes d'accès.

Ilha Grande

Cette ile, qui a donné son nom à la baie, en occupe le centre et la ferme. Imposante, comme son nom l'indique - 155 km², soit presque deux fois Belle île en Mer ou trois fois Noirmoutier - mais sans route ni automobile, elle abrite seulement quelques villages côtiers et très peu d' habitants...
On peut sans doute parler ici de paradis tropical...
Les touristes, il faut le dire, y viennent nombreux, passant d'une plage à l'autre sur des bateaux de promenade de toutes tailles…

Beaucoup de mouillages magnifiques, sur le rivage d'Ilha Grande.
Nos deux préférés sont
"Enseada das Palmas" où nous avons passé notre première nuit brésilienne en arrivant de Namibie et
"Lagoa Azul", un trou d'eau cristalline, enserré entre la côte et l'ilot "dos macacos".

Les bateaux de promenade y amènent des visiteurs durant la journée, mais le soir tout le monde est reparti et nous restons le plus souvent seuls dès l'heure de l'apéro. En plus, durant la journée, tous se regroupent et se serrent dans l'émeraude, autour d'un banc de sable qui fait comme une plage. Là, ça s'agite, picole, danse, nage et plonge, pendant que tout le reste de la crique nous appartient où nous restons solitaires, loin de la fureur et du bruit...
Enfin ça, c'est vrai pendant la semaine. Parce que le week-end, les vrais de vrais brésiliens viennent y faire leur exhibition... et là, ça fait du clapot... Beaucoup de clapot! Et un bruit!... Ces jours là, il vaut mieux renoncer et fuir vers la ville...
Vers Abraao par exemple.

Nonos et Cie


Il n'y a ni belle musique ni paradis sans bémol...
Dans ce paradis ci, le seul bémol ne se voit ni ne se sent dans les vidéos, photos et cartes postales de rêve; c'est à peine s'il s'entend dans le silence du soir...
Eh oui, "tristes tropiques" obligent, il y a ici pas mal de petites bêtes volantes qui piquent... Des moustiques (éventuellement des anophèles ou des oedes responsables de la malaria et de la dengue ) et surtout des nonos!!! Ces derniers appelés aussi "sand flies" ou "gegenes" selon les pays, sont d'horribles petites choses presque invisibles, qui attaquent sans bruit et paraissent insensibles aux mesures préventives habituelles (brûleurs parfumés, spirales fumantes, insecticide en bombe ou répulsif corporel). Leurs piqûres ne réagissent en général que plusieurs heures après (généralement le lendemain) et provoquent des démangeaisons insupportables durant plusieurs jours... Si en plus, vous avez un tempérament allergique, cela devient une vraie galère. Leur seul "avantage" est qu'ils n'entraînent pas de maladie.
Après le bain du soir, on se tartine de "OFF" qui est un répulsif très agressif (surtout pour sa propre respiration!). Parfois ça marche, mais pas toujours... Le seul remède apaisant trouvé sur Getaway quand le mal est fait: frotter la peau AUTOUR de la piqure avec une brosse à ongles... ça active la circulation sanguine, selon moi* ça accélère aussi la dilution du venin et au moins ça calme la démangeaison... Si on gratte directement la piqure, ça s'envenime, ça s'infecte... Et ça dure plus longtemps!

*Sur Getaway, l'efficacité de la méthode n'est pas unanimement appréciée ...

Le village d'Abraao, centre touristique de l'île, est situé au fond de l'anse du même nom, qui est un bon mouillage. C'est aussi un point de départ important des bateaux de promenades à la journée. Mais, à part ceux ci, il y a très peu d'activité nautique dans l'anse et les voiliers peuvent y mouiller dans une paix relative.
C'est aussi l'occasion de refaire notre plein de provisions pour la nouvelle semaine de mouillages sauvages et isolés, qui va bientôt recommencer...
Le village qui n'abritait que des pêcheurs il y a seulement quelques années, est maintenant une agglomération de posadas, restaurants et agences de tourisme... On n'y voit plus trop de pêcheurs.... Un ferry assure la liaison quotidienne avec Angra dos Reis. C'est d'ailleurs à son bord que nous avons découvert Angra, quand nous sommes venus y faire nos formalités d'entrée, le surlendemain de notre arrivée.

Angra dos Reis.

C'est le 6 janvier 1502 qu'a été découverte "l'Anse des Rois" ...
Le jour de quoi ? Le jour des rois!...
Vous aviez deviné? Eh bien vous avez gagné un yoyo en bois avec la ficelle du même métal!

C'est aussi la plus grosse ville de la baie et "un port en plein développement" comme on dit pudiquement... Un plein développement touristique surtout, qui commence à défigurer son environnement. Pourtant encore, quand on arrive à l'entrée de cette anse, l'agglomération qui s'étale à flanc de collines, forme un tapis de petites maisons aux couleurs pastel du plus joli effet. Mais, à mesure qu'on pénètre dans le port, la qualité de l'eau se dégrade un peu et souvent ça ne sent pas que le chlore... Ni la rose...

Nous revenons ici assez fréquemment car c'est notre centre de réapprovisionnement principal quand nous sommes dans le coin. mais sans jamais nous y attarder bien longtemps...
En effet, on y trouve une marina, voisine d'un supermarché, où on peut venir à quai en annexe pour y déverser directement le contenu de ses chariots. C'est d'un confort que nous avons rarement rencontré ailleurs !!!
Le skipper en profite généralement pour visiter les quincailleries, les marchands de peinture, d'électronique...
Les courses faites, nous en repartons vite pour aller dormir dans les mouillages voisins, ou pour aller vers l'ouest de la baie. Vers la région de Parati par exemple.

Parati

Ce nom signifie "vivier de poisson".
Fondée en 1660, la ville a connu son heure de gloire au XVIIIème siècle. L'or et les diamants extraits des gisements découverts dans la province du "Minas Gerais", y étaient alors embarqués à destination de Rio puis du Portugal.( "Minas Gerais" signifie "mines générales" en portugais).
L'arrêt de l'exportation d'or au moment de l'indépendance du Brésil et l'absence d'une bonne desserte routière ont entrainé le déclin de ce port qui fut longtemps un des plus importants du pays.


Ce qui en reste aujourd'hui est un "joyau de l'époque coloniale".
La cité entière, dont le centre historique est une sorte de musée d'architecture, est classée monument historique depuis 1966. Partout, des murs blanchis à la chaux, des portes en bois et volets peints de couleurs vives, des patios, des fougères, orchidées, rosiers et gardénias...Les rues sont pavées de gros blocs de pierres aux formes arrondies, dont la surface polie par l'usage constitue une chaussée très inégale.
C'est très joli mais si on ne s'y tordait pas les pieds, on apprécierait plus…
En termes de génie urbain, ces rues ont une originalité: construites en pente légère vers la mer et au dessous du niveau des grandes marées hautes, elles sont régulièrement et automatiquement nettoyées par l'eau de la mer qui se retire... Encore faut il ne pas y jeter de plastiques!!!
Ces moments de "crue" dans les rues,éclairés par la lumière chaude de fin d'après midi, ont permis des cartes postales du plus bel effet.

Tout cela constitue un "conservatoire" historique, habité par quelques "happy few", des marchands d'artisanat (plus ou moins local), des galeries d'art et des posadas (auberges). C'est le genre d'endroit qui vous donne l'impression d'être plus intellos qu'ailleurs!

La ville est située dans une anse assez profonde, au fond de laquelle quelques marinas se sont installées. Marina veut dire ici quelques pontons flottants et corps morts, où des bateaux sont amarrés, à l'abri naturel offert par l'anse. Que les vents soufflent fort du nord et l'abri ne doit pas être terrible... Ça ne doit pas se produire souvent mais on raconte quand même la fois où le vent aurait emmené au fond de l'anse tout un ponton de bateaux amarrés...
Comme nous recherchions un endroit où abandonner quelques mois Getaway, nous avons visité et enquêté sur toutes ces possibilités. Les prix proposés et un sentiment de précarité du mouillage ont orienté nos recherches vers d'autres horizons.

Bracuhy.

Comme en Malaisie ou au Vénézuela, on trouve ici aussi, des ensembles immobiliers luxueux dont l'image de prestige s'appuie sur une marina. Bracuhy est de ceux là, mais déjà assez ancien. 25 à 30 ans. C'est un très grand domaine organisé autour d'un plan d'eau ramifié en canaux, le long desquels les riches habitants disposent d'un quai pour amarrer leur bateau.
Une sorte de Port Grimaud, qui baignerait dans une végétation tropicale, contre laquelle une armée de jardiniers lutte en permanence pour éviter un retour rapide à l'état sauvage. Une armée de peintres aussi; car l'humidité ambiante permet le développement fulgurant de moisissures sur les murs et les toits, leur donnant très rapidement un aspect du plus mauvais effet. La maintenance est un vrai boulot ici!

Nous sommes venus visiter cet endroit car les canaux évoqués ci dessus aboutissent dans une marina extrêmement bien abritée.
La maintenance en est sans doute trop difficile pour être irréprochable, mais l'abri du vent et de la mer y est excellent. Comme nous avons pu y négocier un prix abordable,c'est là que nous avons laissé Getaway pendant notre retour en France de l'été 2011 et notre voyage Sud Américain de début 2012.

 

Entre ilha de Marambaia et ponta de Juatinga qui marquent ses extrémités, la Baia d'Ilha Grande abrite 2000 plages, 7 grandes baies, d'innombrables criques et 370 îles... Dans un tel contexte, les mouillages abrités sont légion et superbes pour la plupart...
Nous confirmons les appréciations qui nous ont attirés ici: "On peut passer un an sans s'ennuyer, à naviguer et s'émerveiller dans "Baïa de Ilha Grande".

Quelques anges que nous y avons rencontrés:

Susie.

L'incontournable sentinelle de la marina Charitas à Niteroï, que nous rencontrerons à l'occasion de notre visite de Rio de Janeiro pour le carnaval.
D'origine anglaise (ou irlandaise), elle vit sur un bateau (vert) avec son mari brésilien, dans cette marina. Ils ont navigué quelques temps de par le vaste monde puis sont revenus s'installer ici, il y a déjà quelques années. Lui travaille, elle non… Quoique...
Son hyperactivité l'entraîne à organiser des évènements de toutes sortes: théâtre, musique, carnaval, expéditions... Elle a comme ça un agenda énorme et bourré...Ca ne l'empêche pas de guetter attentivement les nouveaux venus. Bien que nous connaissions son existence avant d'arriver ici, c'est tout de même elle qui nous a abordés, au bar de la marina où elle prenait son petit déjeuner.
Suzy veille à ne manquer aucun des voyageurs de passage qui viennent mouiller ici pendant leur séjour à Rio; pour leur faire profiter de son savoir et de sa voiture. Bénévolement.
Tous les voileux, ou presque, en ont entendu parler avant d'arriver. Nous-mêmes connaissions son existence, signalée par l'équipage de Post Scriptum, passé par ici l'an dernier.

Une fable locale: Le téléphone et le CPF.

Résumons le début: Dès notre atterrissage à Angra dos reis, nous nous mettons en quête d'une carte à puce locale pour notre téléphone portable. Facile: ça s'achète à toutes les échoppes dans la rue.
Par contre, quand on veut essayer de la mettre en route, ça ne marche pas!
Alors enquête... agence adéquate... baragouinage d'explication du problème... Et on tombe toujours sur la même pierre d'achoppement: pour activer la bête, on nous demande toujours notre numéro de CPF, dont on ne comprend pas bien ce que c'est. On ne parvient à convaincre personne de nous faire marcher notre téléphone. Ça dure comme ça quelques semaines (on ne fait pas que ça quand même...)

Quand enfin nous arrivons à Niteroï, Susie nous explique le problème:
- Il vous faut un numéro CPF...
- Oui, on a cru comprendre, mais qu'est ce que c'est que ça?
- C'est une sorte de numéro d'identité qu'ont tous les brésiliens.
- Comme un numéro INSEE chez nous?
- En quelque sorte.
- Oui mais les étrangers ne peuvent pas en avoir, j'imagine?
- Si... C'est possible… Mais il y a pour cela un petit parcours initiatique administratif

Et voilà Susie qui nous consacre presque une demi journée pour régler ce problème:
En premier lieu, trouver un endroit où remplir une fiche (électronique) de demande de CPF... D'abord une banque (qui refusera) puis la poste (qui acceptera)... On va squatter comme ça pendant une demi heure un guichet des PTT locaux pour remplir le questionnaire et présenter les documents administratifs nécessaires... Évidemment les passeports, mais aussi un certificat de domicile, les dates et lieux de naissance des parents de l'impétrant... La queue s'allonge dernière nous... Heureusement que Susie était là pour traduire les questions et réponses... Et faire admettre à l'employé qu'on ne peut pas tout attendre d'un étranger de passage... Alors on transige et finalement, contre paiement de la taxe correspondante, on ressort avec un récépissé de notre demande, qu'on a entre 12 et 36 heures pour transformer en N° de CPF à la "Receita Federal".
Le lendemain, on se précipite donc au bureau local de la Receita Federal avec notre récépissé. Après quelques minutes d'attente, sans question supplémentaire, le capitaine se voit attribuer son numéro de CPF et délivrer la carte qui en fait foi.
Alors, le miracle se produit: toutes les portes s'ouvrent devant vous pour vous vendre ce que vous désirez: téléphone, voiture, appartement... Dommage qu'on ne souhaite qu'une puce de téléphone portable…

Enfin le capitaine exulte et c'est très fièrement qu'il va exhiber sa carte de CPF à l'opératrice qui voudra bien mettre en service sa carte à puce, et lui permettre ainsi d'accéder au "paradis internet" avec la 3G à bord

Elle dépatouille rapidement tous les problèmes qu'on a tellement de mal à régler quand on ne fait que bafouiller la langue locale... C'est aussi une mine de renseignements.
A nous, elle a appris les super marchés voisins, la procédure et les endroits pour faire l'entrée de Getaway à Rio, pour obtenir un téléphone portable local, pour acheter tardivement des entrées au sambadromo, la gratuité des transports en commun pour les vieux et comment en profiter... Et tellement d'autres choses encore...
Elle nous a même emmenés en voiture tout en haut de la colline qui surplombe la baie de Niteroï, pour admirer la superbe vue qu'on y a sur toute la baie.
Une perle rare quoi!

KEA

C'est un grand catamaran parti de Marseille depuis trois ans, avec deux Dominique à bord...
Après deux ans de méditerranée, ils ont embouqué la Mer rouge! – Que nous qu'on croyait que plus personne n'y allait à cause des pirates! – On a ainsi appris qu'il y a encore plein d'équipages courageux (ou inconscients??) qui empruntent ce passage.
Après un bref passage aux Maldives, Chagos et la Réunion, ils sont remontés par le nord-est de Madagascar, à Nosy Be... Ensuite ils ont fait à peu près le même chemin que nous autour de l'Afrique du sud, puis Ste Hélène et Rio.
Nous les avons rencontrés à la marina de Niteroi pour le carnaval, puis nous avons navigué de conserve quelques semaines pour la deuxième phase de notre exploration de la baie d'Ilha Grande.
Nous nous sommes mutuellement initiés à la caïpirinha, puis l'avons testée et retestée sur chaque bord, afin d'en optimiser la recette... Ça a quand même pris deux mois de mise au point! Mais maintenant ça y est...
Il suffit d'avoir des glaçons...
Il était temps d'ailleurs, car ils sont déjà repartis vers le nord du Brésil et les Caraïbes: ils sont jeunes, alors ils sont tout fous et pressés... Ça leur passera... il y a dix ans on ne tenait pas en place non plus... Maintenant on prend plus de temps.
Enfin maintenant, on les regrette beaucoup – Et pas seulement pour la caïpirinha – Comme on l'a déjà dit moult fois, cela n'arrive pas si souvent de s'entendre vraiment bien avec des équipages de passage...
Mais bon, ils nous ont laissé leur recette de pizza de mamie Durand... et celle des crêpes de Marseille! Ça nous fera penser à eux chaque fois...
Et peut être qu'ils vont freiner un peu? Et qu'on les retrouvera aux Caraïbes l'an prochain? Ou l'année d'après…
A suivre…

IZARRA

C'est un bateau basque - comme son nom l'indique - qui abrite Florence, Michel et leur fille.
Ils naviguent au Brésil depuis de nombreuses années, à temps plus ou moins complet.
Michel en a profité pour rédiger un excellent guide de navigation pour les côtes brésiliennes – un boulot énorme. Il est publié chez Vagnon et c'est à notre connaissance le seul qui existe en français.

SAN MARINO

Un soir, nous arrivons pour la première fois au mouillage d'Itahanga, un îlot situé entre Angra dos Reis et Bracuhy.

Un seul autre bateau y est déjà installé, mais c'est un gros et à moteur; comme on les aime!!! Une bonne cinquantaine de pieds et sûrement des centaines de chevaux – genre "Grand Banks".
On tourne autour, à la recherche du meilleur endroit pour mouiller (le meilleur après celui qu'il occupe déjà; c'est évident puisqu'il l'a choisi!).

Sur son arrière, il affiche son nom: "San Marino" et un pavillon brésilien. Une jeune femme aussi, qui secoue son chiffon par dessus bord et nous salue aimablement... Une femme de service sûrement: dans la région, aucune grosse unité ne se déplace sans deux ou trois employés à bord...
On finit par mouiller pas bien loin et on se prépare notre petit apéro du soir. Ce soir il s'accompagnera de bruschetta (voir recette).
Soudain, on entend la femme du San Marino nous héler en anglais
- What about a glass of wine on board? (Voulez vous venir boire un coup de pinard à bord?)
- Euh... Why not? Yes, thank you!
Et nous voilà partis dans notre annexe, accompagnés de notre bruschetta…

Sur la plateforme arrière du San Marino, Gabi nous accueille très "joliment" – la jeune femme se trouve être la compagne du propriétaire du bateau – puis on rencontre ce dernier, Carlo et un copain à eux Silvio...
On visite le bateau. Plutôt luxueux ma fois... acajou, moquette blanche et cuisine intégrée...
En chantier aussi. Les cabines sont sens dessus dessous, vaigrage et ameublement démontés: les deux hommes sont lancés dans un gros chantier de rénovation des vernis. Carlo veut tout faire bien brillant pour revendre ce bateau, qui a été construit par son père dans les années 70. Avec Gabi, ils le trouvent trop grand et coûteux pour eux.
Dès qu'il sera vendu, leur projet est d'aller en Italie - le pays de la mère de Carlo, où elle possède une propriété – construire un voilier (de 40 pieds) et partir se promener dessus, entre autres en Alaska…
Enfin, avant ils veulent encore aller passer six mois dans une tribu mongole "pour apprendre la vie simple et sereine… ce sera mieux pour vivre en bateau après..."

On a passé une excellente soirée avec ces jeunes (la quarantaine) professionnels de la musique, cultivés et parlant un excellent anglais… (ça aurait été difficile en portugais).
Près de dix mois plus tard, au retour de notre séjour en France, nous les avons retrouvés dans l'anse d'Abraao, sur Ilha Grande. Leur chantier de vernis n'était pas encore terminé (ils en étaient au salon et à la cuisine maintenant)...

Pendant que les hommes vernissent, Gabi s'est prise de passion pour l'art culinaire; elle s'est vue offrir des gros bouquins de cuisine italienne (comme belle maman) et bosse très dur pour régaler son équipage...

Tous n'étaient pas des anges!

Dans ce concert de louanges "paysagesques", il faut bien qu'il y ait un "couac" :
La fausse note ici, vient de ce que la baie d'Ilha Grande est au Brésil l'équivalent de la côte d'azur, entre Monaco et Cannes... Ou encore du nord de la Sardaigne, autour de Porto Cervo.
A terre, c'est un peu moins évident car la côte y est beaucoup plus "vierge" que là bas.
Mais sur l'eau...
Toute une classe de nouveaux riches (souvent très riches...) semble avoir colonisé la baie pour ses loisirs nautiques; la partie Est surtout.
Nous n'avons vu nulle part dans le monde une telle concentration de yachts et super yachts à moteur. Les marinas de la zone sont massivement occupées par ce genre d'embarcations et tout le commerce qui concerne la "plaisance" s'est mis au diapason de ces clients "haut de gamme"; ce qui signifie que tout y est hors de prix.
Une nuit à la marina "Piratas" d'Angra dos Reis coûte 5 euros le pied, soit 200 euros pour Getaway. Une nuit...

Les voiliers, qui sont globalement plus raisonnables (nous n'avons pas vu de grosses unités dans la baie), mouillent le plus souvent sur des corps morts de clubs, dans des anses abritées ou dans quelques marinas moins "luxueuses", éloignées d'Angra.

Mais bon, il n'y a qu'à éviter ces endroits et attendre d'être ailleurs pour acheter du matériel, me direz vous. Ça n'empêche pas de profiter de la beauté de la baie et de ses mouillages.
Eh bien si, un peu... Justement!
Pendant les week-ends et les vacances (Noël et le jour de l'an), la gabegie d'engins de loisirs à moteur qui se précipitent sur l'eau dans toute la baie d'Ilha Grande rendent les mouillages quasiment infréquentables...
Et ce n'est pas seulement un problème de surpeuplement comme sur les plages de Houat le week end de Pâques. La nuisance ici, c'est l'extrême agitation, amplifiée par l'ostentation.
En temps "normal", on voit passer dans les mouillages quelques bateaux de promenade, parfois assez importants, qui emmènent les touristes le long des plages. Ces bateaux là, fabriqués en bois et déguisés en goélettes dont les mâts ne servent qu'à tendre des tauds de soleil et à donner à l'ensemble un look "aventures tropicales", sont plutôt paisibles. On croise aussi quelques voiliers locaux, pas très nombreux, qui viennent passer quelques nuits au mouillage.
Mais le week-end! Toutes les marinas du coin crachent leurs pensionnaires dès le vendredi après midi.
Les engins à moteur se déchaînent...
Et attention, rien à voir avec les "pêche-promenade" de chez nous: Des yachts de toutes les tailles, de 5 à 30 mètres (le plus souvent une quinzaine), équipés de moteurs de 100 à 5000 CV...
Tous ont en commun une silhouette de bolide et un comportement, inspirés de Mad Max ou de la Guerre des étoiles.
Tous ne paraissent exister que pour proclamer la réussite économique de leur propriétaire sous les yeux exorbités des spectateurs, et pour exhiber ses fantasmes de domination et son étalage de naïades dévêtues d'un string, sur le "solarium" de l'engin...
Pas vraiment d'ambition marine sur ces bateaux là... La plupart ne sortent jamais de la baie: malgré la débauche d'antennes de télécoms et de radars qui hérissent les hauts des plus gros... Plus l'antenne est grosse, plus l'homme est fort...
En fait, quelle que soit la taille du bateau, le programme est rigoureusement le même: départ de la marina vers 10 heures, un tour des mouillages de la baie et retour à la marina avant la tombée du jour, pour dormir (et peut être faire la fête?). On ne reste quasiment jamais passer la nuit en mer.
Sur chaque bateau, un ou deux marins s'occupent de tout: La manœuvre, le moteur, le mouillage, les manutentions d'annexe... Ils assurent aussi le service... Les propriétaires ont l'air de ne rien pouvoir ou savoir faire à bord...
Aussitôt l'ancre au fond (souvent au bout d'une longueur de chaîne à peu près égale à la hauteur d'eau, c'est dire si ça dérape souvent – ne serait ce qu'à cause du clapot qu'ils produisent eux-mêmes – et si ça contribue à l'animation du mouillage...) on se hèle d'un bord à l'autre, on va faire un tour en annexe ou mieux, en scooter des mers (à fond la caisse, évidemment)...
Entre 12 et 15 heures, c'est l'heure de pointe. Les monstres arrivent à toute vitesse, passent une heure ou deux au mouillage, puis repartent vers un autre endroit... Les sillages sont énormes. Les vagues qu'ils créent entraînent tous les bateaux à l'ancre dans un roulis impressionnant. Et le bruit... La musique, les moteurs et les cris... La fête foraine...
Pire qu'une piscine de grande ville, un week-end de canicule du mois de juin!
Une folie de dépense de gasoil aussi... C'est l'envahissement sans frein de la consommation ostentatoire.
Tout ça pour pouvoir comparer la taille de leurs bateaux, le tour de poitrine et la longueur du string de leurs naïades égaillées... Et peut-être aussi leur capacité de nuisance?
C'est navrant...
Malgré cet apparent désordre qui règne sur les mouillages, on peut tout de même noter un certain ordre dans le choix des endroits précis où nos marins du dimanche mouillent leur ancre. Dans la Bretagne d'antan, c'était "les gars avec les gars, les filles avec les filles"... Eh bien ici ce serait plutôt "les gros avec les gros, les petits avec les petits"... Une sorte de ségrégation sociale: chacun mouille au voisinage des bateaux de sa catégorie... On ne se mélange pas!
Dans cette foule, les voileux eux aussi forment un groupe distinct, généralement discret. Ce sont les seuls qui restent le soir dormir au mouillage! Les seuls à nous paraître des plaisanciers "normaux" avec qui partager le paradis tropical; lequel d'ailleurs reprend tous ses droits le soir vers 19 heures et les conserve jusqu'au lendemain matin vers 11 heures.

C'est vrai que l'image montrée par le Brésil cette année ne nous a pas que plu.… Sur l'eau, en tout cas... Du coup, on a un peu de mal à être aussi enthousiastes à propos de ce pays que nous l'étions il y a treize ans à Salvador de Bahia.

Pour tempérer ces appréciations sur le pays et ses habitants, il faut sans doute faire la part d'une généralisation excessive. Nous sommes ici dans un endroit très particulier.
C'est un peu comme si nous nous faisions une opinion sur la France et les Français, à partir d'observations faites en haute saison entre Cannes et Monaco... Il y aurait sans doute la même admiration pour le paysage (encore que là bas, bien rares sont les endroits où la main de l'homme n'a pas encore mis le pied...) mais certainement aussi le même genre d'appréciations sur les pratiques de mouillage et les marins de rencontre.

Rio de Janeiro, une perle dans son écrin.

Mais c'est pas le tout, nous sommes aussi venus ici pour assister au carnaval de Rio et le temps presse. Nous sommes arrivés à Angra depuis plus d'un mois et il est temps d'interrompre notre exploration de la baie d'Ilha Grande pour revenir vers Rio visiter celle de Guanabara et assister au carnaval.

L'approche

Lors de notre arrivée au Brésil, nous étions bien passés devant Rio, mais toute la côte se cachait alors derrière un brouillard à couper au couteau et nous n'avions rien vu; même pas deviné...
C'est donc par l'ouest, en revenant d'Angra, que nous allons découvrir les panoramas mythiques de Rio de Janeiro.
Ce sont d'abord une vingtaine de kilomètres de plages, bordant des rangées d'immeubles construits au pied d'une chaîne de collines toute proche et assez abrupte.

De plus en plus élevés les immeubles et de plus en plus escarpées les collines, à mesure qu'on s'approche de Rio; pour dévoiler enfin le mythe à l'état pur: Ipanema puis Copacabana, immenses étendues de sable blond bordées de gratte-ciels, laissant apercevoir le Corcovado et son christ rédempteur, au fond dans les collines, puis le "Pao de azucar" (pic rocheux de 396m), sentinelle impressionnante gardant l'entrée étroite de la baie de Guanabara dans laquelle se trouve Rio de Janeiro.
Dès qu'on y entre, on est confronté au spectacle étonnant des centaines d'îles, îlots, anses, pointes qu'elle abrite... Surtout, des dizaines de morros (collines) de toutes tailles s'élèvent tout autour, comme pour des décors de théâtre, dans quelque direction qu'on tourne la tête. On ne sait plus ce qui est continent, îles ou presqu'îles: c'est tellement tarabiscoté, imbriqué... il faut souvent revenir à la carte pour s'y retrouver.
On a déjà eu ce genre d'impression dans la baie d'Ilha Grande, mais ici c'est encore plus spectaculaire...

En 1823, Charles Darwin écrivait: "La baie de Guanabara excède en splendeur tout ce que les Européens peuvent voir dans leur propre pays". Comme Dupont et Dupont, nous dirions même plus: "Nous n'avons pas rencontré baie plus splendide durant tout notre tour du monde!"

L'arrivée, ses découvertes et ses formalités.

Mais reprenons les choses dans l'ordre.
L'entrée "étroite" de la baie de Guanabara se passe avec beaucoup d'émotion, pour laisser découvrir à l'intérieur tout un univers de collines abruptes qui font du réputé "pain de sucre" un élément à peine remarquable parmi tous les autres.
On admire les forts qui défendaient la baie et paraissent aujourd'hui n'avoir été construits là que pour servir de décor au spectacle qui s'offre à notre passage. Loin devant, le pont routier qui traverse la baie s'élève suffisamment pour permettre aux cargos d'aller mouiller derrière.
Nous-mêmes allons essayer de trouver la marina Charitas qu'on nous a conseillée, près de Niteroi, de l'autre côté de la baie par rapport à Rio.
Sur la carte, cette marina s'abrite au fond de l'anse de Jurujuba où l'eau n'est pas très profonde... 2 à 3 mètres... On s'en approche prudemment et on mouille juste en avant des pontons,où on débarque pour aller voir de quoi il retourne.

Accueil plutôt agréable, organisé... et bien gardé! On se retrouve immédiatement pourvus de cartes magnétiques qui nous permettront d'entrer et sortir de l'enceinte de la marina (les Brésiliens adoooorent les portillons à carte magnétique devant les postes de garde... Comme ils sont fréquemment en panne ces derniers sont toujours doublés d'un portillon à ouverture manuelle, qui se trouve donc être très souvent ouvert en grand et permet de passer rapidement, sans faire de gymnastique pour sauter par dessus!)

Quelques éléments de l'histoire de Rio de Janeiro.

Rappel: en 1494 le traité de Tordesillas signé entre le Portugal et l'Espagne, partage l'Amérique du Sud (découverte par Colon deux ans auparavant) entre les deux royaumes:
Un méridien imaginaire a été tracé à 370 lieues à l'ouest du Cap vert (portugais) pour attribuer à l'Espagne
tout ce qui sera découvert à l'ouest de cette ligne (les Antilles), et au Portugal tout ce qui le sera à l'est. C'est ainsi que le Brésil sera portugais... quand il sera découvert.

Cabral atterrit au Brésil en 1500, autour de Salvador de Bahia. C'est donc à partir de là que le pays est d'abord organisé administrativement et que l'on a patrouillé pour en découvrir le reste.
Ce faisant, André Gonçalvez découvre le jour de l'an 1502, ce qu'il prend – à tort – pour l'embouchure d'un grand fleuve. Il l'appelle donc Rio (rivière). Comme à cette époque, on a l'habitude de piocher dans le calendrier pour baptiser ses trouvailles, il complète ce nom par celui du mois en cours: Janeiro (janvier). Rio de Janeiro est née.
De nombreux groupes indigènes vivaient déjà là, qui avaient eu le mauvais goût de découvrir l'Amérique avant nous. On leur fichera la paix encore une cinquantaine d'années.

Jusqu'à ce qu'arrive en 1555 un amiral français et chevalier de Malte – Nicolas Durand de Villegagnon - chargé par Coligny de fonder une colonie calviniste. Il s'installe sur une île de la baie de Guanabara où il construit le fort Coligny – cette île existe évidemment toujours et s'appelle Ilha de Villegagnon. Son rêve est de fonder, à partir de là, la "France Antarctique"... rien de moins. Bigot et sectaire il considère les indiens comme des bêtes, tient ses soldats un peu trop "serrés" et se met à dos la population locale, en plus de son équipage.
Querelles, bagarres et sale ambiance font que les Portugais n'ont aucun mal à revenir mettre de l'ordre dans la région et récupérer leur colonie en 1560. Les Français remontent vers le nord en 1567, définitivement vaincus.

Le 1er mars 1565 la ville de Rio est fondée à l'ouest de l'entrée de la baie, au pied du Pao de Azucar.
En 1600, la population compte 3000 indiens, un millier de blancs et une centaine d'esclaves.
Petit rappel: le pape Paul III affirme en 1537 que les indigènes américains sont des hommes à part entière, dotés de tout l'équipement nécessaire, âme comprise... Conséquence: ils ne peuvent pas être réduits en esclavage. Comme ce n'était pas le cas des noirs africains, ces derniers seront importés dès 1538 vers Salvador de Bahia. Il fallait bien quelqu'un, quand même, pour faire le boulot pénible d'exploitation du bois et du sucre! Cet inconvénient religieux n'empêchera pas les bandeirantes de chasser l'indigène sur le terrain et de le "convaincre" de travailler "sous contrat" pour les blancs!
Les indiens appelaient alors la maison du blanc: "carioca". Ce nom deviendra celui des habitants de Rio.
La découverte d'or et de diamants dans le Minas Gerais, à proximité de Rio, va modifier les équilibres économiques du pays au détriment de Salvador. En 1763, Rio devient la capitale du Brésil. En 1959 elle cède ce statut à Brasilia alors que Sao Paulo joue le rôle de capitale économique; mais elle reste toujours la "vitrine" du Brésil.

A lire absolument: "Rouge Brésil" qui raconte l'épopée de Villegagnon dans la baie.
A voir aussi le film "Mission" de Laurent Joffé, avec Robert De Niro, qui raconte l'histoire de l'installation de l'économie européenne dans les colonies d'Amérique du sud, au détriment des indigènes.
Revoir "Orfeu negro" (1959) le film de Marcel Camus, qui a fait entrevoir à beaucoup de français ce qu'était le carnaval de Rio. Au générique, on retrouve les vedettes d'Ipanema: Vicinius de Moraes pour l'histoire et Antonio Carlos Jobim pour la musique.


Sur les pontons on repère facilement le bateau vert de Susie dont nous ont parlé des amis, mais elle n'y est pas. Ce n'est que le lendemain que nous ferons sa connaissance.
On apprend par Susie que les transports publics (ferries et bus) sont gratuits pour les passagers de plus de 65 ans (enfin une bonne nouvelle pour consoler d'être vieux..) Cela facilitera beaucoup nos déplacements en ville. On en usera et abusera alors que s'il eut fallu payer 10 euros par jour et par personne, on aurait sans doute parfois hésité.
Elle nous apprend aussi comment faire notre entrée officielle à Rio. C'est obligatoire à chaque changement de région, et la marina nous a instamment demandé de le faire et d'en ramener les certificats correspondants pour valider notre "membership" temporaire et notre carte magnétique...

A la "Capitania do porto" (qui est assurée par la "Marinha Nacional", ça ne rigole pas) ils commencent par nous envoyer à "l'immigration, dont le bureau est situé au terminal de passagers du quai des paquebots. 2kms d'une marche harassante dans la canicule des rues de Rio, qui n'était pas du tout prévue... Puisque nous avions déjà fait notre entrée au Brésil… Mais bon, avec la marine brésilienne il vaut mieux ne pas trop discuter!
De retour à la "capitania" nous déposons nos papiers qui vont, pendant une heure, aller se promener dans des mains sûrement responsables – et lentes - pour que nous puissions nous prévaloir d'être ici en toute légalité... Nous nous sommes laissés dire que bien des voileux ne font rien de tout ça... A chacun ses transgressions...

Maintenant nous pouvons visiter la ville

Nous fêtons notre entrée officielle à Rio dans un restaurant à kilo du centre ville; super bon. On retrouve avec plaisir cette institution brésilienne qu'on avait découverte à Salvador en 1999. C'est donc convenablement rassasiés, qu'on peut enfin commencer à baguenauder et lever le nez dans les rues.
Le fait d'être bâtie autour de collines très escarpées est sans doute très esthétique mais ne permet pas à la ville de s'étaler comme dans une plaine. La réalité du terrain est rarement représentée par les plans que l'on peut consulter pour s'orienter et les itinéraires sont souvent un peu déroutants.
Le centre de Rio est un quartier d'affaires dont l'architecture offre un voyage dans le temps: mélange diversement apprécié de bâtisses coloniales pas encore démolies, d'autres rénovées et d'immeubles modernes très élevés aux façades vitrées... (La restauration semble commencer à s'organiser pour s'opposer à la démolition comme principe de modernisation et d'amélioration urbaine).
Parmi les immeubles modernes remarquables ont trouve incontestablement le siège de Petrobras et la cathédrale de Rio. On a moins apprécié le musée d'art moderne qui est une déclaration d'amour passionné au béton brut… Trop brut de décoffrage à notre goût, mais qui abritait une expo temporaire intéressante.
Parmi les classiques on trouve le ci-devant siège de la Banco do Brasil, qui est maintenant le "Centro Cultural Banco do Brasil", où nous avons vu une belle exposition Escher – encore un endroit qui aide à se sentir plus intelligent, sans trop d'efforts... - de belles églises, couvents, palais, un théâtre superbe, plein de musées dont le "museo historico nacional".
De jolies promenades urbaines...
Ca occupe bien et nous en avons largement profité. Le ferry nous débarquant directement dans le vieux Rio, à proximité des lignes de bus, l'accès en était assez simple.

Nous ne manquerons pas l'excursion à Santa Teresa:

"Montmartre en plus décrépi", étalé au flanc d'une colline escarpée.
Ce quartier bourgeois du XIXème siècle, est maintenant peuplé de bohèmes, artistes, classes moyennes et pauvres... hippies... Ses rues pavées, très pentues et étroites, découragent un peu les cars de touristes.
Pour le découvrir, il faut emprunter le "bonde" ou "bondinho", une sorte de tramway de montagne (un peu poussif: on peut quasiment descendre en route), qui part du centre ville, près de la cathédrale. Un wagon ouvert, des banquettes en bois et un poste de conduite à chaque extrémité (un tramway réversible quoi!) Vous payez si vous êtes assis. Sinon vous pouvez rester accroché debout sur le marchepied, à l'extérieur... à vos risques et périls. (Le risque est bien réel: en fin d'année passée, un déraillement a provoqué plusieurs morts! Le tramway aurait basculé et fait quelques tonneaux dans la pente).
Aussi, ce wagon ouvert aux quatre vents est propice aux vols à l'arraché... planquez vos sacs et autres richesses.
Le voyage commence par la traversée de l'aqueduc de Lapa. Construit en 1732 - pour acheminer l'eau de la rivière de santa Térésa, vers la cité - il est posé sur des arches (arcos de Lapa) qui en font un décor à la De Chirico.
Ensuite c'est l'ascension de la colline. Secouante, grinçante... Elle offre une vue tournante et sympa sur la ville au loin; on admire sous notre nez les hôtels fin de siècle, les ateliers d'artiste, les jardins en friche, les restos "in", les bars "out"... et n'oublions pas le point de vue imprenable sur une des plus vieilles favelas de la ville... Visite originale.

Deux mythes locaux: Copacabana et Ipanema.

Si on demandait de résumer Rio de Janeiro en deux mots seulement, partout dans le monde je crois que ce seraient ceux là.
La culture de la plage semble fondamentale pour les cariocas. Le plus gros de la foule qu'on rencontre là, parait constitué d'indigènes... La profusion des hôtels construits sur le front de mer suggère bien que les touristes sont nombreux; mais le dimanche matin la foule arpentant la plage et le grand trottoir pavé de vagues noires et blanches qui la borde, nous a semblé être constituée d'une majorité de brésiliens du cru.

On est donc bien "obligés" d'y aller voir... Même si on n'est pas vraiment amateurs de plages.
Alors on y est allés... Et c'était assez curieux... Avec le culte de la plage, celui du corps est très important ici. Ça fourmille de beaux mecs bronzés et de pin up en string et haut minuscule... (Le prix du m² de tissu pour ces triangles balnéaires doit atteindre des prix astronomiques).
L'originalité est très présente aussi: C'est la première fois que nous avons vu des chiens chaussés de souliers se promener sur le trottoir au bout de leur laisse.

Le dimanche matin, sur une place située juste derrière les immeubles du front de mer d'Ipanema, se tient le marché des "hippies". Beaucoup d'artisans y présentent leur production: bijoux, vêtements et peintures... Peu de hippies.
Historiquement, la plage de Rio a d'abord été Copacabana. C'est là que s'est d'abord développé le front de mer huppé et que se célébraient les nuits blanches du nouvel an.
Ipanema s'est développé plus tardivement. Dans les années 50/60, c'était le quartier "libéral" de Rio. Artistes et intellectuels habitaient là, se retrouvaient dans les bars pour discuter: mode hippies, rock, Beatles, drogue, cheveux longs et amour libre...
Le poète Vinicius da Moraes et le musicien Tom Jobim étaient de ceux là. Le second tomba amoureux d'une belle écolière qui passait tous les jours devant son bar favori. Entraînant son ami Moraes dans son délire, ils finirent par créer ensemble une chanson - "A garota de Ipanema" (la "fille d'Ipanema") - qui est devenue un immense succès mondial. La jeune fille est devenue depuis une dame respectable... La rue où elle passait porte maintenant le nom de Moraes... Le bar où tout a commencé existerait toujours, à l'enseigne de "A garota de Ipanema", mais nous ne l'avons pas retrouvé.
Aujourd'hui ce quartier est devenu un centre bourgeois de luxe-mode-sophistication et de consumérisme ostentatoire.

Deux autres célébrités locales:

Le Corcovado.

Autant vous l'avouer tout de suite: on n'y est pas montés... Trop de nuages bas pendant notre séjour à Rio. Quand nous l'avons tenté, il faisait beau partout mais le sommet était quand même dans les nuages et il n'y avait rien à voir... Il paraît que les chances seraient meilleures en venant tôt le matin.
On va quand même y aller de notre couplet touristico-historique: le sommet de ce morro aussi célèbre que le pain de sucre, culmine à 710 mètres et offre une vue panoramique à 360° sur Rio. Il est couronné par un christ rédempteur de 30 mètres de haut, non conçu, mais réalisé en béton par le français Paul Landowski. On peut même circuler à l'intérieur de ses bras dans 20m de tunnel....
Promis, juré, on réessaiera de prendre son train à crémaillère un de ces jours pour vous raconter en "live".

Le Pain de sucre.

Celui là non plus, on n'y est pas montés... honte sur nous...
395 m de symbole... Les indiens l'appelaient autrefois "pau nd acuqua" qui signifiait "haut promontoire pointu et isolé"... ça sonnait comme: "pao de azucar" et le pic ressemblant au moule en argile utilisé à cette époque pour faire les pains de sucre, cette approximation portugaise est restée.
Ce morro est situé en sentinelle à l'entrée de la passe étroite qui donne accès à la baie de Guanabara. Desservi par un téléphérique la vue qu'il offre serait splendide aussi... On vous confirmera ça plus tard... enfin on espère.

Le Carnaval de Rio.

Dans tout le Brésil, le carnaval est une fête de première importance à laquelle une grande partie de la population sacrifie avec enthousiasme.
Quatre jours – surtout cinq nuits – de délire, de danse et de célébration. Sans compter les mois de préparation…
Pendant cette période, la foule envahit la rue et le reste de la vie civile et économique est mis en veilleuse.
Nous nous rappelons de Salvador, quand toutes les nuits la ville entière était dans les rues, où on ne pouvait plus circuler que porté par la foule. A Rio, le carnaval est plus concentré: quelques dizaines d'endroits où la foule converge pour faire la fête. Entre ces pôles de rassemblement on peut presque circuler en oubliant que c'est nuit de carnaval. Ça ne risquait pas d'être possible à Salvador où tout le centre ville était concerné.

Pourtant, partout dans le monde, quand on évoque le carnaval au Brésil c'est toujours celui de Rio de Janeiro qui vient à l'esprit.
C'est sans doute parce que ce dernier a été résolument orienté vers le "show business" plutôt que vers la fête populaire.
Ce qui fait sa célébrité, ce défilé brillant de chars, de danseurs et de musique, est maintenant un spectacle payant qui se déroule dans une enceinte close, devant des spectateurs installés sur des gradins.
C'est le "Sambadromo".

Le carnaval de Rio, c'est d'abord "Le Sambadromo".

La sécurité au Brésil

On peut rarement évoquer ce pays avec quelqu'un qui y est allé, sans tomber rapidement sur le thème de la sécurité, appuyé souvent par des souvenirs personnels d'agression et de vol. Nous-mêmes n'avons vécu aucune expérience de cette sorte (pas encore).
On peut sans doute avancer que le Brésil est plutôt "craignos"… Mais ailleurs?
Vous-mêmes, qui fréquentez la France ou les USA, vous promenez vous seul la nuit, sans précaution ni inquiétude, à la Courneuve? à Brooklin ou à Chicago? A priori, probablement que non!
Ici comme là bas, et comme partout dans le monde, il est indispensable de savoir où on met les pieds et l'heure qu'il y est. Certains endroits sont clairement à éviter à certaines heures... Certains quartiers difficiles ou les centres d'affaires désertés le soir...
Il faut sans doute aussi respecter quelques règles... qui sont décrites dans tous les guides touristiques: Eviter d'arborer des signes extérieurs de richesse (richesse évaluée par les yeux locaux, pas les vôtres) dans les endroits très peuplés (bus, marchés, gares routières,...).
La meilleure manière de ne pas être volé, c'est de n'avoir ostensiblement rien à voler!
C'est donc, habillés de coton léger et usé, portant un sac de toile pendouillant, équipés d'une montre en pur plastique véritable et les (gros) sous nécessaires rangés dans une poche ventrale très plate et planquée sous le pantalon, qu'on a parcouru Rio.
Nous avons vaqué ainsi quelques semaines sans éprouver de sentiment d'insécurité, ni être attaqués... Il faut dire aussi que dès la nuit tombée, nous sommes presque toujours rentrés au bateau. Nous ne sortons que très rarement le soir.
Quelle chance on a de ne trimballer ni bagages Louis Vuitton, ni Rolex,.. Quoique... Des amis suisses qui arborent généralement leur belle montre, sont convaincus que "on ne te la vole plus car tout le monde croit qu'elle est fausse..." Voire…
Et puis bon, on parle plus des avions qui tombent que de ceux qui volent... des trains qui déraillent que de ceux qui roulent... et des marins noyés que de ceux qui naviguent encore.…
Ainsi, si on en croit les journaux genre "voici-voili-voilère", que nous aurons l'immense "joie" de retrouver dans quelques mois, dans la France de la ceinture, du casque, du permis à points, des assurances obligatoires, des serrures à trois points,... il arrive quand même que se produisent de ci de là quelques "incidents"... malgré tout. Alors… On prend les précautions qui vont bien et la France ne parait pas inhabitable...
Eh bien nous pensons qu'ici, c'est un peu la même chose. D'ailleurs, il y a beaucoup de brésiliens riches qui y habitent toujours…

Bref :"Venez au Brésil, c'est "pas tellement plus pire" et c'est plus tellement si Beau"!..

Le principe général d'organisation de ce spectacle est un concours entre des écoles de samba qui défilent sur une large avenue, longue de 800m et bordée de structures d'accueil en béton pour les spectateurs (loges et gradins). Pour l'occasion, cette avenue est fermée à chaque extrémité et forme ainsi une sorte d'arène close: le sambadromo.
Là, le carnaval ressemble plus, côté scène à une représentation d'opéra et côté gradins à une corrida.

Les écoles de samba ne sont pas à proprement parler des écoles de danse. Ce sont plutôt des syndicats de danseurs, musiciens, percussionnistes, chanteurs, parrains, célébrités, députés... rassemblés autour d'un quartier et d'une ambition: gagner le carnaval.
Chacune, forte de 5 à 6000 participants, va préparer un défilé organisé en une quarantaine de groupes de danseurs et musiciens, autour de 7 ou 8 chars gigantesques. Pour cela, autour d'un thème qu'elle choisit, elle crée sa musique, sa chanson, ses costumes, ses chars et ses chorégraphies, dont la mise en scène sera peaufinée pendant de longs mois de répétitions dans son quartier général. (A l'approche du carnaval, celles ci sont elles même l'occasion de spectacles et de fêtes très fréquentés).
Les gens qui organisent et créent tout cela sont des professionnels; par contre les "danseurs" et musiciens des groupes sont des amateurs dont on dit qu'ils "financent" eux même leur costume.

Pendant notre nuit au sambadromo, nous verrons défiler six écoles ayant choisi les thèmes suivants:

La richesse historique et socio-culturelle de Rio
La samba fait du bien à la santé
Le port de Rio et l'océan
La peur… au cinéma et au théâtre
La chevelure à travers les siècles
Il y a 100 ans naissait Nestor Cacaquinho: sa vie, son œuvre

Lors du défilé, 22 jurés notent chaque école, selon plusieurs aspects: La beauté des chars; la bateria; la musique, paroles et percussion; le thème; les mouvements de foules; les costumes; la chorégraphie; la coordination.
La compétition oppose 18 écoles de samba: un groupe de 12 grandes et un autre de 6 challengers. Chaque nuit du carnaval, de 21 heures à environ 8 heures du matin, 6 écoles défilent; ce qui représente plus de 30 000 personnes et près de 50 chars qui passent sur la piste. La compétition complète se déroule donc sur trois nuits successives. L'école championne est élue parmi ces 18 participantes, mais en plus chaque année, 1 challenger intègre le groupe des grands, alors qu'un grand est dégradé. Un peu comme un championnat de foot quoi.

C'est à ce spectacle que l'on veut absolument assister et pour lequel il nous faut un ticket d'entrée. Dès notre arrivée à Rio, on s'y attelle avec détermination mais quand même un peu tard... Deux semaines avant, les places disponibles sont rares... Heureusement Susie est là avec sa débrouillardise, sa connaissance du terrain et son téléphone. Elle nous dégotte très vite un endroit où on trouvera encore quelques places pour le dimanche soir. C'est cher (même si celles qu'on a pu trouver sont parmi les moins coûteuses) mais comme tout le monde nous le dit: il faut faire ça une fois dans sa vie!
Les bourgeois locaux vous diront que vraiment, Rio pendant le carnaval est trop bruyant, populaire, débordant... Qu'eux même s'en échappent systématiquement, pour l'occasion, vers leur résidence secondaire... Mais ils avouent quand même tous être allés au moins une fois déjà au sambadromo.

Une nuit au sambadromo, comme si vous y étiez.

Vous arrivez à l'entrée de l'enceinte avec votre billet d'entrée, sous forme de carte plastifiée à code barre accrochée autour du cou. L'accès est simple et bien organisé. Les 100 000 spectateurs vont être très rapidement, dirigés, rangés par catégories, digérés sans panique et avec une incroyable efficacité. Le service d'ordre est impressionnant.
L'accès, en béton brut, ressemble fort à celui d'un stade de foot. Avec les stands habituels de sandwichs, boissons, restauration rapide.
Si vous avez pris comme nous des places non numérotées, il vaut mieux arriver tôt. Vers 18h plutôt que 20 h, pour avoir une chance de trouver de l'espace pour vous asseoir le long de la balustrade en bas des gradins - ce que nous n'avons pas fait et nous nous sommes retrouvés tout en haut.
Vous cherchez donc le plus bas possible un emplacement pour vous poser – peut être en repoussant un peu les voisins, ce n'est pas le moment d'être timide... – et vous marquez votre territoire avec un journal ou un coussin... Si vous êtes deux, pour aller chercher la bière et les sandwich, vous aurez intérêt à ne vous éloigner qu'un à la fois, l'autre restant garder les places... Parce qu'à partir de 20 heures, elles sont convoitées les places!

En attendant le début des défilés, ça fait plutôt ambiance pré-match.
Parfois une vedette fait une rapide apparition sur l'avenue et soulève les acclamations: un jeune homme a été comme ça particulièrement acclamé; unanimement debout, la foule en délire grondait, s'agitait et jetait des bigorneaux (private joke)... Nos voisins disaient que c'était Ronaldinho...(vous savez qui c'est, vous?).

Quand ça commence enfin, on en reste bouche bée... C'est plus grand, plus nombreux, plus inouï, plus...trop... on avait bien imaginé des trucs mais pas si beaux, ni si grands ni si tant que ça!!! (revoir la liste des superlatifs du début).
La musique sort de tours de hauts parleurs monstrueuses... Des millions de décibels, sûrement... Au début c'est surprenant, mais on s'y habitue...
Autour de 21 heures le roi Momo ouvre le bal. Pendant la soirée d'ouverture, il s'est vu confier les clefs de la ville pour la durée du carnaval...
Chaque école va ensuite défiler. Toutes selon la même structure:
D'abord la cerise avant le gateau: "Mon truc en plume… tagada... tagada...". Chaque bateria est précédée par de magnifiques créatures dénudées de tulle et de strass, emplumées, endiadèmées, montées sur talons démesurés, qui vont danser et faire virevolter leur "truc en plume", sans arrêt et sans faiblir, tout au long de l'avenue: Ce sont les "Rainhas das baterias", celles que l'on voit le plus souvent sur les journaux et les affiches. Elles sont l'image du carnaval de Rio. Reines très adulées, ce sont de vraies vedettes locales. Parfois très jeunes... On parle d'ados ou pré-ados? Impressionnant...
Suit une bateria de 200 à 700 musiciens et percussionnistes, interprétant la musique créée par l'école pour l'occasion. Cette même chanson, sera hurlée en boucle par les hauts parleurs et la foule des spectateurs, pendant tout le passage de l'école.
Puis c'est la foule incroyable des danseurs, organisés par groupes et costumés selon le thème retenu, sous des formes très variées.

Par exemple l'école "Imperatriz" qui avait pris pour thème l'histoire de la médecine, était structurée en groupes représentant successivement: l'Afrique préhistorique, la Mésopotamie, l'Égypte, la Grèce, le sanctuaire d'Asclépius, l'alchimie, le microscope, la pédiatrie, la cellule, l'homéopathie,etc...
39 groupes qui passent, tournent et dansent sur des chorégraphies précises.

Entre les groupes de danseurs à pied: les chars.
Des constructions absolument énormes, inouïes pour certains, avec profusion de pin up emplumées et enstrassées, tableaux vivants gigantesques, automates, tourniquets, courses effrénées, mouvements divers.
On a ainsi reconnu des chars représentant les hordes d'envahisseurs occidentaux, le phare d'Alexandrie, la guerre des étoiles, Indiana Jones, Harry Potter, la pieuvre d'Avatar...

On va être captivés toute la nuit. Le lever du jour nous surprendra vers 6 heures du matin, un peu étonnés d'être encore vaillants sans avoir fermé l'œil... Heureux...
La question qui se pose alors c'est: comment va-t-on trouver un taxi pour rejoindre le terminal du ferry qui nous ramènera à Niteroi? Le quartier du sambadromo n'est pas sûr et il n'est pas conseillé de s'y promener à pied, surtout la nuit... Mais en fait, ce n'est déjà plus la nuit et les rues qui sont encore pleines de monde nous paraissent raisonnablement sûres. Nous irons donc à pied au terminal du ferry.

Le carnaval dans la rue

Même à Rio, le carnaval ce n'est pas QUE le sambadromo. C'est aussi la fête dans la rue. De manière peut être plus localisée qu'à Salvador, mais on fait la fête un peu partout en ville: des places, des rues, des quartiers où la foule se presse. Les gens y viennent affublés d'un chapeau, d'une perruque, d'un tee shirt rigolo... Tout est permis sauf la nudité... (Seules les vedettes-canons du sambadromo y ont droit). On voit beaucoup d'hommes déguisés en "drag queen", comme à Salvador: le style "brésiliennes du bois de Boulogne" reste très populaire, bien vu et assumé.
Les lieux de fêtes sont organisés et animés par des associations locales. Ce sont les "Bandas" du quartier.
Par exemple, Ipanema possède son propre groupe de batteria et samba: "La Banda de Ipanema". Ce n'est pas une des grandes écoles qui se produisent au sambadromo, mais elle défile joyeusement tous les jours sur un circuit proche de la plage, en alternance avec les bandas d'autres quartiers qu'elle a invitées.
La plage d'Ipanema, la fille d'Ipanema, la Banda d'Ipanema... Tout ça nous parait tellement magique; il faut donc absolument que nous allions assister à une de ses sorties.
Nous y retrouvons un peu de l'ambiance folle-dingo de Salvador au passage d'un "bloco": La banda est constituée d'un camion qui porte l'orchestre et précède un groupe d'un bon millier de danseurs costumés d'un tee shirt. Une corde portée par une équipe de "gros bras" entoure l'ensemble et délimite un périmètre mobile qui se fraie lentement son chemin à travers la foule, le délire, la joie et la bonne humeur...
Tout ça entre 18h et 22h.
Sur le passage de la banda, la foule compacte danse et hurle les chansons.

Nous nous mêlerons donc à cette foule pour "danser", marcher, scander et même "chanter" les refrains de vieux tubes brésiliens de samba... nous efforçant de rester à proximité du camion, juste devant la "banda". C'est là que ça nous paraissait le plus facile de se maintenir debout...
Là, allez savoir pourquoi, un gros bras du service d'ordre va nous inviter à rentrer à l'abri du groupe – pitié pour notre grand âge? – En tout cas on appréciera, car on était beaucoup moins bousculés à l'intérieur et c'était plus facile pour danser... Belle soirée... Nous étions heureux...
Et pour rentrer, on a même trouvé facilement un métro (propre et sûr) qui nous a ramenés à proximité du terminal du ferry.

Voilà, le carnaval est terminé, notre séjour urbain commence à nous peser un peu et nous envisageons avec plaisir le retour vers Ilha Grande. 70 milles à parcourir, probablement au moteur. Nous partirons tôt le matin, pour dormir une nouvelle fois le soir dans la baie des palmes. Ensuite nous pourrons entreprendre la deuxième phase de notre exploration de la baie, avant de repartir vers le nord pour rejoindre les Caraïbes.