Maintenant que tous nos lecteurs ont digéré
le fait que Panama n'est pas seulement un canal mais aussi un pays (1/7
ème de la superficie de la France.), nous pouvons préciser
que c'est même un état qui fête abondamment tous les
ans, son indépendance d'avec la Colombie, acquise en 1905.
Qu'il se trouve encadré au Sud Est par la Colombie, au Nord Ouest
par le Costa Rica et qu'il forme une barrière d'environ 50 kms de
profondeur qui unit les deux Amériques mais sépare les océans
Atlantiques et Pacifiques.
L'aspect stratégique de cette situation, associé
à son étroitesse, ne vous aura pas échappé
et cela vous aura donné la même idée qu'aux gens du
coin: Creuser un canal pour relier les deux océans et éviter
aux navires marchands le long détour par le Cap Horn pour contourner
l'Amérique du Sud.
Notre Ferdinand de Lesseps national s'y essaiera en 1880.
Il lancera des souscriptions, rencontrera plein de difficultés (climat
meurtrier, glissements de terrain...) et déposera son bilan neuf ans
plus tard. Ce fut un très gros scandale de notre III ème
république.
Fort intéressés, les Etats Unis prendront
la relève en 1903.
Comme ce sont des gens prudents qui trouvaient la Colombie
un peu instable, ils commenceront par favoriser (organiser ?) la
sécession de la région du Panama d'avec l'état colombien.
Ils se feront ensuite céder, par ce nouvel état, une bande
de territoire s'étendant sur 15 km, de part et d'autre du projet
de canal ..
Ces préalables établis, dix ans de travaux
leur permettront d'ouvrir en 1914 un canal de 13 m de profondeur
sur quelques 80 km de long.
Plus tard, inquiets de l'instabilité de l'état
panaméen, les US élargirent la zone du canal de 15 à
30 kms, de part et d'autre de l'ouvrage.
En 1979, un accord est signé qui rend au Panama
la souveraineté sur la zone du canal. L'accord prévoit que
l'exploitation du canal proprement dite passera sous responsabilité
panaméenne en 1999.
Depuis Janvier dernier, les US se sont retirés,
et tout cela est sous le contrôle de l'autorité locale.
Toutes sortes d'affiches proclament dans les rues de
Panama City: « El Canal es Nuestro » et c'est la
source d'une grande fierté pour les panaméens.
On a écrit tellement de choses sur ce canal et
sa traversée, puis sur les conséquences du départ
des américains, qu'après avoir abordé prudemment
la perspective de cette aventure, une fois la chose faite, on a envie de
démystifier un peu.
Avec l'accession à l'indépendance, les
autorités Panaméennes devaient apporter l'apocalypse dans
l'organisation de l'exploitation du canal et dans les tarifs:
C'est clair que la précision des rendez vous avec
les pilotes et des heures de passage n'a pas dû s'améliorer
avec le départ des américains. Mais enfin, avec une
tolérance de deux heures, les choses se font normalement.
Pour les tarifs, il semble bien que ceux ci aient un
peu plus que doublé ces dernières années. 300 dollars
pour un Getaway de 40 pieds. C'est plus que les 1200 francs qu'il
a payé il y a presque dix ans, mais ce ne sont ni les mêmes
dollars, ni les 15 à 20 000 francs dont on parlait dans la BLU toute
l'année...
Les
écluses sont très impressionnantes, voire dangereuses, et
des précautions de sécurité draconiennes sont nécessaires.
Chacun des six sas qui équipent le canal mesure
près de 300 mètres de long et assure 9 mètres de dénivelé.
C'est vrai que le remplissage des sas montants fait bouillonner l'eau comme
dans une cocote minute, et que les courants sont impressionnants.
Mais correctement amarrés soit à couple
d'un remorqueur, soit tenu au centre du sas par quatre aussières,
les choses se passent bien si tout le monde est a son poste et fait ce
qui est prévu. Pour qui pratique l'écluse du barrage de la
Rance ou même celle du port de Paimpol l'aventure n'est pas tellement
plus stressante. La manoeuvre est simplement beaucoup plus organisée
et disciplinée.
En fait, si les autorités du canal et les pilotes
en rajoutent un peu dans les exigences, c'est sans doute parce qu'avec
nos petits bateaux et nos équipages d'amateurs, nous devons être
pour eux comme du poil a gratter et qu'il n'est pas question, à
cause de nous, de retarder, ne serait ce que de quelques minutes, le trafic
noble de cargos.
Il faut dire que les montants financiers en jeu sont
assez différents: 300 $ pour nous, 180 000$ pour le cargo recordman
du paiement qui est passé le mois dernier...
Je trouve qu'à ce prix, c'est encore une chance
qu'ils acceptent de nous faire passer...
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