LA GAZETTE DE L'A.R.B
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Le Vanuatu - Le Vanuatu traditionnel
N°26- Juin 2005

C'est  quoi le Vanuatu ?

Le Vanuatu a commencé d'émerger de l'océan il y a 22 millions d'années. Maewo et Pentecôte sont arrivées les dernières il y a entre 5 et 11 millions d'années.  L'archipel compte ainsi quatre-vingt trois îles et a la forme générale d'un Y.

La plupart des historiens sont d'accord pour dire que les migrations qui ont peuplé ces îles sont venues de l'Asie du Sud Est. 3000 ans avant JC les Proto-Mélanésiens ont commencé à arriver ici et aux Îles Salomon. On a retrouvé  des  traces  de la culture Lapita  sur l'île de Malo. Une vague d'émigration polynésienne, venant donc de l'est, est arrivée entre le 11 et le 15ème siècle, apportant nouvelles connaissances et coutumes.

Pendant tout ce temps les différentes tribus qui peuplaient l'archipel vivaient séparées par des forêts  et de larges bras de mer; elles formaient des petits clans installés sur  le territoire ancestral, sans développer un quelconque sentiment national.

Vinrent alors les européens.  Divers découvreurs se succédèrent avant que la France et la Grande Bretagne ne "s'entendent" au début du XXème siècle pour occuper conjointement l'archipel en créant le condominium des "Nouvelles Hébrides". Ce nom avait été donné aux îles par James Cook, l'infatigable navigateur, durant ses explorations de 1774, en référence aux Hébrides qui sont des îles britanniques situées à l'ouest de l'Ecosse.

En 1980 le pays accédait à l'indépendance et prenait le nom de Vanuatu; qui signifierait "notre terre" dans une langue locale.

 


 

La possession de la terre va être  LE problème politique majeur qui  fera  le lit de l'indépendance. 

Dans les années 60 les européens s'étaient approprié environ 30% des terres dont ils n'avaient encore cultivé que la moitié (surtout des cocoteraies) et ils considéraient la propriété foncière comme un bien marchand comme les autres. Les Ni-Vans de leur côté voyaient  la terre de leurs îles  comme un patrimoine incessible appartenant aussi à leurs descendants. Quand les colons ont recommencé dans ces années là à défricher pour développer  l'élevage, ils ont provoqué une levée de boucliers à Santo et Malekula.  Dans l'esprit des Ni-Vans, ces terres non exploitées leur appartenaient. 

En 1963 Jimmy Stevens et le chef Buluk créent  à Santo  le mouvement Nagriamel  qui se propose de restaurer coutumes et tradition au sein des tribus  ainsi que de faire restituer toutes les terres non  exploitées par les européens. Charismatique leader traditionaliste, Jimmy Stevens était curieusement né d'un père écossais et d'une mère tongienne… Développant leur mouvement dans les îles du nord, à partir de Fanafo,sur Santo, les deux leaders deviennent vite des héros quand ils occupent en 1965 des terres en friche appartenant aux blancs.

En  1975, contre toute attente, Nagriamel perd des élections organisées au niveau de l'archipel. On commence alors à parler de sécession dans les îles du nord; laquelle est même proclamée l'année suivante à Santo, dans l'indifférence générale d'un pays pas encore indépendant. A partir de ce moment les colons français (et même peut être leur gouvernement, dit on chez Lonely Planet), inquiets des intentions britanniques d'accorder l'indépendance à un pays où la majorité des habitants étaient protestants et  anglophones, auraient joué un trouble double jeu, apportant un soutien officieux au Nagriamel qui souhaitait ouvertement le maintien de la présence française dans les îles du nord, tout en proclamant officiellement la légitimité des vainqueurs des élections.

En 1979 des élections préparatoires à l'indépendance confirment la suprématie de la communauté anglophone et amènent au pouvoir un premier ministre protestant dur (Walter Lini). C'est lui qui va réprimer les menées séparatistes qui se développent alors sur tout le nord de l'archipel et sur Tanna. Pour ce faire, alors que les deux anciennes puissances colonisatrices se tiennent par la barbichette, il fait intervenir la troupe de Papouasie Nouvelle Guinée qui met, sans état d'âme, une fin brutale aux désordres. Cela  permettra aux britanniques de régler le conflit au sein du Commonwealth, sans faire intervenir de troupes anglo-saxonnes.

Jimmy Stevens sera arrêté et emprisonné jusqu'en 1991. A sa libération, il détenait le record de durée de détention politique. Il mourra en 1994 dans son village de Fanafo. 

Après l'indépendance, le Vanuatu a adopté des lois protégeant la propriété coutumière des terres en interdisant aux autochtones d'en vendre aux étrangers. Seule restait possible la location de longue durée avec des baux d'une durée maximum de 75 ans (c'est la durée de vie productive d'un cocotier). Aujourd'hui, les australiens sont très présents au Vanuatu sous forme de conseillers administratifs, de touristes, d'affairistes, de retraités… et les lotissements australiens de résidences secondaires ou de retraites se multiplient sur Efate.  Ces réalisations immobilières; construites sur des terrains loués avec de tels baux, nous paraissent lourds de futurs affrontements autour de la propriété des lieux.

 


 

Le Bichlamar: le créole de là bas.

Le Bichlamar est une langue construite autour d'une grammaire extrêmement simple et d'un vocabulaire très restreint, principalement d'origine anglaise. Le verbe être n'existe pas et la plupart des relations entre mots sont assurées par le connecteur blong (vient de belong = appartient).

Curieusement son écriture s'appuie sur les conventions phonétiques du français… Ainsi le mot signifiant "où" s'écrit "wea" et non" where"; ou encore celui signifiant "temps" s'écrit "taem" et non "time". Homme blanc ne s'écrit pas "white man" mais "waetman"…

Par égard pour les autochtones, il est bon de connaître quelques expressions courantes:

- Bonjour: Alo

- Au revoir: Tata

- S'il vous plait: Plis

- Le premier: Nambawan

- Enfant: pikinini

- Médecine: meresin

- Merci beaucoup: Tank yu tumas (thank you very much)

- Parlez vous français? Yu toktok french?

- Comment vous appelez vous? : Wanem nem blong yu?

- Je m'appelle John: Nem blong mi Djon

- Où sont les toilettes SVP? : Plis wea i  klosis?

- Je mange du riz: Mi  kakae raes

 

 Le vocabulaire restreint nécessite de  longues périphrases pour exprimer les concepts qui ne sont pas usuels.

 

-Contraceptif: "Meresin blong blokem pikinini"… soit  "médecine pour bloquer les bébés"

-Soutien gorge: "Basket blong titi"…. Ou  "panier pour les seins"

-Le Prince Charles d'Angleterre: "Nambawan pikinini blong Kwin". 

En anglais: "number one child of the queen" et en français: "l'aîné de la reine"

-Scie: "Wanfala samting blong kakae wud, i kam i go i kambak"… En anglais: something wich eats wood, it comes it goes it comes back.  En français: un quelque chose qui mange le bois, qui va, qui vient, qui revient encore.

 

Plus spectaculaire, bien que moins courant:

-Piano: "Bigfala bokis blong waetman, tut blong em sam i black, sam i waet; taem yu kilim emi singaot"

En anglais: "Big box  wich belongs white man, with some white and some black teeth; when you strike it, it sings out". Soit en français: "La grosse boite des  blancs, avec des dents blanches ou noires que quand  tu tapes dessus elles chantent".

 

-Violon: "Smol sista blong bigfala bokis sipos skrasem bel blong em i krae…"  Soit en anglais: "Little sister of big box, if you scratch its stomach it cries…ou en français: "Petite sœur de la grosse boite, si tu lui grattes l'estomac elle pleure".

 


 

Le Nimangki: Un système social "tous terrains"

Statut et pouvoir s'acquièrent dans les tribus selon les règles du Nimangki.

Pour monter d'un grade, les aspirants doivent  prouver leur talent et leur richesse en organisant des cérémonies spectaculaires qui s'accompagnent de danses et de festins.

 L'ascension sociale dans le village se paie en offrandes de cochons tués. Sachant qu'un verat met environ sept ans pour se voir pousser une belle paire de défenses (idéalement, elles doivent former au moins un cercle fermé et donnent alors à l'animal une valeur de  40 000 Vatus) seuls les hommes riches pouvant fournir plusieurs cochons atteindront le haut de l'échelle sociale. Le cérémonial ressemble beaucoup à celui auquel nous avons assisté à Wallis: alignement de cochons, nattes, cadeaux, yams et taros. Bombance. 

Au sud est de Malekula les hommes peuvent prétendre à 35 grades, alors que sur Ambae il n'en existe que quatre. Cette ascension sociale peut commencer jeune mais l'homme fournit habituellement ses premier cinq à dix cochons pour faire sa demande en mariage, ensuite il achète des truies pour consolider sa fortune. 

Il paraît que pour les hommes riches d'Efate la valeur d'une épouse peut atteindre le prix d'un véhicule 4x4 tout neuf. C'est pourquoi les filles à marier de la région sont appelées des "Toyotas"…

 


 

Le Naghol (ou la vraie origine du saut à l'élastique...).

Le Yam est une plante importante dans la tradition et dans l'alimentation Ni-Van.

Tous les ans en avril (quand les premières pousses sortent de terre) les habitants de chaque village du sud de Pentecôte  entreprennent la confection d'une grande tour faite de troncs d'arbres et de lianes.

Habituellement elle mesure dix huit à vingt mètres de haut mais certaines peuvent en atteindre vingt sept.

En mai-juin tous les week-ends, des hommes volontaires,  simplement vêtus  d'un "memba" (étui pénien) rouge, plongent vers le sol du haut de ces édifices, retenus aux chevilles par deux  longues lianes.

Si elles sont trop longues ou trop fragiles, le plongeur s'écrase au sol, mais si elles sont  trop courtes il se fracasse contre la tour…

Ces  deux accidents ne sont séparés que par une dizaine de centimètres  de liane en plus ou en moins.

Chaque homme est seul responsable de ses lianes qu'il sélectionne et prépare lui même.

L'idéal est qu'au bout du saut  les cheveux du plongeur caressent le sol; la tradition veut que ce contact furtif fertilise le sol et que le saut sera bénéfique pour une récolte abondante de yams.

Les jeunes hommes sautent les premiers (de neuf mètres environ) puis chaque plongeur successif saute d'une position de plus en plus élevée, en fonction de ses expériences précédentes.

Le saut final du haut de la tour, le plus difficile, est celui du "chef de la tour", l'homme qui a supervisé sa construction.

Le problème du plongeur est de ne pas se laisser simplement tomber mais de s'envoler assez loin de la tour pour ne pas se cogner aux éléments en saillie pendant sa chute.

A l'origine les hommes sautaient tous les cinq ans du haut d'un banyan mais aujourd'hui les outils modernes leur permettent de remplacer l'arbre par une tour.

 


 

La "Dolce Vita" made in Vanuatu … 

Situé à trois cents  kilomètres au Nord Est de la Nouvelle Calédonie, avec neuf volcans en activité dont sept à terre, l'archipel du Vanuatu fait partie de "l'anneau de feu du Pacifique". En activité permanente, les cratères les plus menaçants sont situés à cent trente kilomètres de Port Vila: Lopevi, îlot totalement évacué lors de  l'éruption de 1970 et Yasur sur Tanna.

Les visites de volcans en activité sont une activité touristique très prisée, surtout à Ambrym et Tanna où des visites sont régulièrement organisées, dans des conditions de sécurité assez éloignées de nos standards occidentaux: "Il pleut des pierres là bas, et les casques sont rares"… 

Pour accompagner les éruptions de volcans, il y a aussi les tremblements de terre. Les sismographes enregistrent tous les jours de nombreuses secousses dont peu sont assez fortes  pour être ressenties par la population. Le dernier séisme important, en 1994 (plus de 7 sur l'échelle de Richter),  fit de nombreux dégâts; tandis que d'autres en 1945 avaient généré des tsunamis. 

Pour ajouter encore du piquant à la vie locale, on compte  statistiquement sur la visite de deux  cyclones et demi par an, entre décembre et mai… Chaque île peut ainsi prévoir d'être vraiment ravagée  une fois tous les 30 ans, sans préjudice des dommages moindres que lui causeront plus régulièrement les vents violents et les pluies torrentielles accompagnant les cyclones "périphériques" qui passeront dans les parages.  Ces cyclones sont très surveillés par les services météo de la région. Quand on en  détecte un  qui risque de s'approcher du pays, les radios locales en donnent des nouvelles toutes les heures, pour que les gens prennent leurs précautions, attachent leurs toits et rentrent chez eux. A terre, le danger le plus courant est représenté par les plaques de tôles qui volent après s'être détachées d'un toit.

 On ne s'ennuie pas au Vanuatu…

 


 

Les Tam-tams, c'est le  GSM  local...

 

Confectionnés dans des troncs d'arbres, ce sont des cylindres qui mesurent couramment trois mètres de haut; on en trouve quelques uns qui atteignent six mètres. La moitié supérieure de ces objets est sculptée, représentant généralement  une ou plusieurs figures allongées, superposées, avec de gros yeux ronds, un nez pointu percé de  deux trous et un menton proéminent. Les cheveux et la barbe sont figurés avec des clous. La moitié inférieure est largement évidée, à travers une longue fente étroite (de l'ordre de 5 centimètres de large) qu'elle présente sur le devant. Ce sont la caisse de résonance et l'ouie de l'instrument.

Comme on utilise du bois très dur, le creusement d'un tam-tam est une tâche longue et difficile.

Installés près des villages, ils sont utilisés comme instruments de musique pour les fêtes et les cérémonies. On en rencontre parfois éparpillés dans la jungle; ce sont alors des télégraphes de brousse pour transmettre des messages codés (les plus grands ont une portée de 30 kilomètres, sous le vent).