LA GAZETTE DE L'A.R.B
Anyvonne Restaurant Bar
 
Cambodge et Viet Nam - Le journal de bord
N°29 - Août 2006

 


 

Survol de l'Indochine, sans bateau...

 

Mais pourquoi sommes nous donc toujours si pressés?

Eh oui, même si on a mis près de huit ans pour arriver jusqu’ici, ça ne nous empêche pas de nous sentir souvent très pressés…
D'accord, ce n'est pas nouveau, mais enfin...

Cette fois, les contraintes sont les suivantes:
Nous sommes fin octobre 2005, aux confins ouest de l’Indonésie, juste sous Singapour avec devant nous, la perspective de "visiter" la Malaisie et la Thaïlande (au moins la côte ouest; en bateau c’est forcé!)
Nous aimerions aussi aller faire un tour au Cambodge et au Viet Nam, et même pourquoi pas jusqu'en Chine et au Laos …
Voilà pour les envies. 


Mais il y a aussi le programme de navigation:
Nous prévoyons de quitter l'Asie au mois de Janvier 2006, vers l’Ouest, pour la traversée de l’Océan Indien. La fenêtre météorologique de départ est assez étroite : 15 Janvier-15 Février. Avant janvier, il y a des cyclones dans le golfe de Bengale…(cette année il y en a même eu un petit dernier sur le Sri Lanka autour du 15 Janvier…) Ensuite, si on veut aller vers le Sud et les Chagos, il faut y arriver avant mi mars, après quoi les vents de Sud Est s’installent et c’est le près serré assuré. Il faudra donc appareiller avant mi février…

Or donc, pour revenir à nos moutons , ça signifie qu’il nous reste deux petits mois et demi pour "faire" le Sud Est asiatique avant d’en repartir "définitivement"… Deux mois et demi auxquels il faut encore retrancher deux semaines de navigation pour remonter de Singapour jusqu'à Phuket en Thaïlande, par le détroit de Malacca…

Voila pourquoi, à peine arrivés en Malaisie et la fin novembre approchant à grands pas, nous sentons l'urgence d'organiser un voyage de quelques semaines vers le Cambodge et le VietNam; bien que ce ne soit pas la saison idéale pour visiter ce dernier car la mousson de Nord Est y apporte de la pluie jusqu'en janvier. Mais comme c’est le seul moment possible, ce sera le moment choisi!
Pour résumer, au pire nous avons devant nous: La mousson de Nord Ouest qui nous attend au Vietnam en décembre, peut être en janvier un cyclone dans le golfe de Bengale, un fort vent de Sud jusqu'au Chagos…
Mais qu'est ce qu'on est donc venus f… par ici!!!


A la recherche d'un point de départ.

L’aventure commence à Kuala Lumpur. Nous y sommes venus en bus depuis Port Dickson où baigne Getaway; pour essayer d'y trouver des billets "pas chers".
Pour partager cette "galère" , Christina et Alain (de SMAC, un bateau suisse avec lequel nous naviguons de conserve depuis Flores) nous accompagnent.

Nos premières consultations d'agences de voyages seront assez décevantes: aucune ne veut même se donner la peine de nous renseigner, si nous n’avons pas DEJA nos visas pour le Cambodge… Une jeune française rencontrée à l’Alliance du même nom, nous indiquera une adresse efficace: C’est souvent une bonne idée de traîner autour des alliances françaises, quand on a besoin de renseignements sur les ressources locales…
Sitôt contact pris avec l’agence conseillée, nous nous sommes retrouvés avec une proposition simple et économique : un vol régulier d’Air Malaysia avec un aller pour Phnom-Penh, suivi d'un retour direct et ouvert depuis Hanoi. Le rêve…

Pour conclure, il ne restait plus qu’à obtenir le visa nécessaire pour le Cambodge (Le Viet Nam, on verra plus tard, à Phnom-Penh). Un coup de téléphone de courtoisie depuis l’agence et hop le renseignement est là : nous pouvons aller déposer nos passeports à l’ambassade dès aujourd’hui et ils seront disponibles dans trois jours, équipés des tampons nécessaires.
La décision est donc rapide: Nous partirons vers le Cambodge mardi matin, à l’aube. Il ne nous reste plus qu’à retourner vite à Port Dickson, préparer les bagages et fermer les bateaux, car nous sommes déjà vendredi…
Je vous disais bien que nous sommes des gens pressés…


Arriver au Cambodge 

Le 29 Novembre matin nous serons revenus à temps à Kuala-Lumpur pour prendre notre envol vers Phnom-Penh où, ponctuel comme un train de la SNCF du siècle dernier, l’avion d’Air Malaysia nous déposera à l’heure prévue.
L'aéroport est plutôt calme, ne déborde manifestement pas d’activité et nous en serons vite sortis après des contrôles très rapides. Nous constaterons à cette occasion que si nous n’avions pas eu de visa sur nos passeports, nous aurions pu en avoir un sur place, plutôt moins cher qu’à Kuala-Lumpur…
Pour rallier le centre ville et chercher l'hôtel recommandé par un copain, nous emprunterons un taxi. C'est vrai, ce choix d’un taxi est un acte prudent de voyageur timoré… - Celui d’un backpacker aguerri aurait plutôt été un "Tuk-tuk", ces triporteurs motorisés à deux ou quatre places qui assurent l’essentiel du transport urbain de Phnom-Penh - Mais enfin nous venons juste d’arriver… Alors…
Nous ne recommencerons plus, c’est promis…

Nous découvrons donc, depuis le confort de notre taxi, le trafic spectaculaire des deux et trois roues, qui semblent clairement faire la loi dans les rues cambodgiennes. Ça rappelle, en pire, le trafic urbain de Bali. Plus tard, ce sera encore plus impressionnant au VietNam, mais ici c’est déjà très intimidant de traverser une rue au milieu du trafic.

Sitôt l'hôtel trouvé, débarrassés de nos bagages, nous repartons vite à la découverte de la ville.
Phnom Penh est située au confluent de trois grands fleuves : le Mékong, le Tonlé Sap et le Tonlé Bassap - (Je ne vous referai pas le coup des Papous à poux et pas à poux, mais quand même, j’avais bien envie…) - C’est dire si l’eau y a de l’importance.
C’est au bord du Mékong que sont installés les restaurants et bars fréquentés par les européens. C’est aussi sur ces rives qu’ont été construits la plupart des monuments qui se visitent dans cette ville : Le palais royal, la pagode d’argent et le What Phnomh. Leur visite est prévue pour demain, au cours d'un tour en minibus que nous avons retenu dès notre arrivée à l’hôtel. (Encore un choix trop prudent, que cette fois, nous regretterons un peu. )

Faire son marché à Phom Penh

Tourisme "humanitaire"
à Phnom-Penh

Parmi les endroits sympas que nous avons découverts à Phnom Penh: le restaurant "Friends", géré par une association qui s'occupe d'enfants et d’adolescents abandonnés à eux même dans les rues.
Elle récupère, loge,aide, soigne et forme ces gamins et leur donne une autre sortie possible que la drogue et le deal.
Elle gère une boutique - bar - restau, qui vend ce que produisent ses protégés dans des école et centres de formation spécialisés…
On y trouve des trucs originaux par rapport à la masse des colifichets standards made in China qui encombrent l'offre aux touristes. Ils ont aussi une école de cuisine attachée au restaurant; on y mange plutôt bien et les jeunes gens font un service attentionné et impeccable…
On trouvera plus tard des endroits similaires au VietNam. Ces pays qui sortent avec peine de tant d'années de guerre offrent beaucoup d'opportunités aux volontaires pour ce genre d ’action.

Pour l'instant c’est en Tuk tuk que nous allons à la découverte des trois marchés de la ville.

Les marchés sont des endroits importants de la vie quotidienne dans le Sud Est asiatique et ceux de Phnom-Penh, ouverts de 8 à 18 heures, sont immenses et très fréquentés. Si chacun de ces trois marchés propose un peu de tout ce qui se vend dans la ville, ils ont quand même chacun leur spécialité.

Nous commençons par celui de Psar O Russei, le plus proche de notre hôtel et le moins touristique (et en conséquence le plus "ethnique"). On y trouve beaucoup de denrées alimentaires. Et les odeurs qui vont avec (pas seulement celles des épices…). Ici, les étals de poulets viennent en tête, talonnés de près par ceux de poissons. Comme la réfrigération ne suit pas, c’est le genre d’endroit dont on ressort facilement végétarien… Et dire qu’en Europe, en ce moment on s’inquiète tellement de la grippe aviaire… On se demande comment survivraient ces populations s’il fallait les priver brusquement de volailles… Bientôt, nous verrons au VietNam que c’est possible. Pour lutter contre la grippe aviaire, au Nord de Hue, jusqu'à Hanoi et Sapa, plus aucune volaille n'était vendue sur les marchés ni dans les restaurants.
Le deuxième marché (Psar Chaa dit" Russian market") donne plutôt dans l’argenterie et la soie au mètre. C’est poussiéreux mais nettement moins odorant… Il faut fouiller pas mal pour trouver des objets à notre goût, mais quelques-uns se distinguent pourtant qui vont contribuer à alourdir, déjà, nos sacs de backpackers…
C’est dans ce marché que nous découvrirons l’ampleur de la copie pirate de CD’s et DVD’s dans cette région du monde. Tous les films et les logiciels dont vous pouvez rêver, pour moins de 2 euros le CD… Cela aussi contribuera à alourdir nos sacs et nous en serons d’ailleurs un peu punis: Plus d'un disque sur trois se révélera illisible ou comportera autre chose que ce qui est annoncé…
Au troisième marché (Psar Thmei) on trouve surtout des copies de vêtements de marques occidentales. Le skipper en ressortira déguisé en Indiana Jones avec de superbes chapeau et chemises étiquetés "Camel Trophy"…
C’est donc avec notre fièvre acheteuse un peu calmée que nous allons pouvoir continuer la visite de la ville.


Phnom Penh Sight Seeing

Le lendemain, à l’heure du laitier, un minibus vient nous chercher à l’hôtel pour nous emmener faire le tour des sites touristiques de la ville. Seuls clients, nous y sommes accompagnés par un conducteur et un "guide" sans aucune valeur ajoutée. Ils causent à peine anglais,
ne savent rien dire des endroits que nous traversons, ne savent (mais c’est déjà quelque chose) que nous amener aux guichets d’entrée des monuments prévus au programme.
En tuk-tuk, c’eut été meilleur marché et bien plus rigolo.

Nous commencerons notre visite par la partie du palais Royal ouverte au public. C'est une sorte de musée de la royauté khmère, dont la pièce la plus spectaculaire est sans doute la "pagode d’argent". Cette pagode est nommée ainsi parce que son sol était entièrement recouvert par 5000 dalles d’argent massif, pesant un kilo chacune. Il n’en reste aujourd’hui que 40% (le reste aurait été "prélevé" par les khmers rouges ?) mais ça suffit pour imaginer l’ensemble au temps de sa splendeur.
On peu y voir aussi, entourés de statues plus petites en bronze ou en argent, le bouddha "d'émeraude" qui serait fait en baccarat, installé à côté d'un autre en or massif, "orné" de plus de 9000 diamants incrustés et pesant 90 kilos.
Dans une cour du palais, on croise une sorte de très grand abri de jardin métallique, sorte de pavillon Baltard en beaucoup moins élégant. Ce "bel" ouvrage a été offert par Napoléon III au roi Norodom… Pas vraiment inoubliable…

Près du palais royal, le parcours des salles du musée national donne une petite idée de l’art traditionnel cambodgien. On y trouve surtout des sculptures sur métaux précieux ainsi que des vêtements et soieries. Peu ou pas de peinture ni rien de contemporain.
Notre tour "guidé" se terminera au What Phnom, une pagode construite sur LA colline qui surplombe la ville (Ce monticule est le seul relief visible dans la plaine qui entoure Phnom-Penh). Selon la légende, cette pagode aurait été érigée en 1373, pour abriter quatre statues de bouddha trouvées près du Mékong par une femme qui s'appelait : "Penh".
Le mot Phnom voulant dire colline: vous avez là l'origine du nom de la ville.

Cette première partie de notre "tour" s'est terminée vers midi. L’après midi devait être consacré à la visite des haut lieux de l’horreur "khmer rouge" : le lycée prison où avaient lieu les interrogatoires et "l'instruction des procès" puis le champ des martyrs où avaient lieu les exécutions qui s’ensuivaient quasi systématiquement. Beaucoup d’horreurs sont promises aux visiteurs. Trop pour nous…
Nous comprenons bien la nécessité de ces témoignages mais nous n'avons pas eu le courage d’y aller.

Nous avons donc demandé à nos "guides" surpris de  nous déposer à l’hôtel pour la sieste, et de venir nous rechercher le soir pour la dernière attraction prévue au programme:  la promenade en jonque et le coucher de soleil sur le mékong. Pour cette dernière étape, la jonque était bien au rendez vous mais le soleil et les rives du Mékong avaient bien triste allure sous la pluie, à la tombée de la nuit.

Pour nous réconforter, nous avons passé la soirée sur le "front de rivière" qui borde le mékong. Dans cette enclave touristique occidentale on trouve des cafés et des terrasses pour boire des coups et manger un bout. Et c'est bien agréable, même si les établissements qu’on trouve là sont un peu "chu-chu" et assez chers, dans le contexte de cette ville.


Siem Reap, le portail touristique d'Angkor.

Visite d'Angkor, mode d'emploi

On se fait conduire à l'entrée du site (façon péage d'autoroute) munis d'une photo qui sera plastifiée sur le "passe de visite" que vous y achetez pour un, trois ou cinq jours consécutifs.
Il vaut mieux aller l'acheter dès le soir de votre arrivée, avant que les guichets ne ferment. Vous éviterez ainsi de faire une longue queue le premier jour de votre visite et puis comme il est tard, vous aurez le droit d'aller gratuitement admirer du haut d'une colline qui domine le site, un premier coucher de soleil sur la jungle,... S'il fait beau… Dans tous les cas, vous ne serez pas tout seul à escalader le chemin vers cet observatoire du crépuscule…
Le site est très vaste. Il ne faut pas espérer vous y déplacer à pied, mais les sportifs peuvent louer des vélos. Nous avons préféré le tuk tuk au taxi, car c'est plus fun et plus aéré .

Pour payer il est possible de le faire en dollars, mais évitez les coupures de 50 et 100$ qui sont très suspectes dans toute l'Asie du Sud Est… Dans tous les cas, sachez que le produit des entrées (je trouve assez chères) va contribuer au financement des travaux d'entretien du site… A hauteur de 15 à 20%... Le reste est nécessaire à l'exploitation du site, qui a été confiée à la société pétrolière nationale, elle même en charge d'actionnaires à qui elle doit des profits...

Après cette courte visite de Phnom-Penh, nous sommes partis en bus pour Siem-Reap et les temples d'Angkor: 300 kilomètres et sept heures de trajet sur une route en assez bon état. Le voyage n'est pas très rapide mais plutôt confortable.

Siem-Reap, petite ville provinciale située à 6 kms des temples d’Angkor, nous a paru se précipiter sans retenue vers son destin d'étape touristique.
Nous avons lu que Siem Reap s'imposait depuis les années 90 comme le centre de la renaissance et de la revitalisation de la culture cambodgienne traditionnelle. Celle ci en a bien besoin car elle a reçu un sacré coup sur la tête sous le règne des khmers rouges et durant les années d'instabilité qui ont suivi. Et pourtant…
Notre rapide passage dans cette ville nous laissera l'impression que le souci majeur est de s’organiser pour récupérer le "maximum" d’argent sur les touristes qui passent.

Pour ce qui est de la culture, on y trouve surtout la bimbeloterie internationale qui intéresse le touriste pressé: le boire et le manger "westernisés", concentrés dans deux rues parallèles; deux marchés aux soieries et souvenirs dont une bonne partie doit être fabriquée en Chine, comme dans tous les sites touristiques… Une collection impressionnante de copies de tout ce qui peut être copié en papier, art, CD et DVD's etc…
Une mention spéciale tout de même, au milieu de ce bazar frénétique, pour l'école d'artisanat: "les Artisans d'Angkor". Cet établissement, sponsorisé par les français, a pour objectif d'apprendre aux jeunes cambodgiens les techniques nécessaires à un artisanat de bonne qualité. On trouve là des ateliers de sculpture sur pierre, sur bois, des ateliers de tissage, de soierie, etc… On peut y acheter des objets qui n'ont rien à envier, pour la qualité, à leurs équivalents dans les boutiques parisiennes. Ni pour le prix d'ailleurs, qui parait énorme dans le contexte local.
En revanche, nous n'avons pas trouvé de musée ou de lieu qui évoquerait vraiment les temples proches et leur histoire. Pourtant cette histoire est celle de l’empire khmer à son apogée et doit représenter la racine de la culture de ce pays. On n'a trouvé nulle part une évocation de la capitale de cet empire immense qui était située là, au IXème siècle.
La colonisation française n’a pas laissé beaucoup de traces non plus: Le "french quartier" est aujourd’hui surtout occupé par les nouvelles constructions d’hôtels, chinois pour la plupart.
Pourtant, les références au passé existent bien à Siem-Reap comme à Phnom-Penh. Mais ce passé est celui, plus récent, de la guerre et du régime Khmer Rouge: Un musée de la guerre expose de vieux équipements militaires, un autre, privé celui là, se propose de vous renseigner sur toutes les sortes de mines terrestres qui ont été utilisées dans la région...
Ces expositions sur la guerre sont elles vraiment nécessaires quand les rues cambodgiennes sont peuplées de leurs victimes, infirmes qui tentent de survivre de la charité des passants et de la revente de copies de livres qui eux aussi veulent témoigner de l'horreur et de la folie de cette époque, quand Vietnamiens et Cambodgiens coopéraient "objectivement" pour disperser sur tout ce malheureux pays le maximum de mines anti-personnels.
Nous avons été un peu désorientés par cette hiérarchie des valeurs.


L'accueil dynamique des visiteurs

Dès notre arrivée à Siem-Raep, nous avons été accueillis et pris en charge par deux conducteurs de Tuk-tuk dont l'un est monté dans notre bus à l'occasion de son dernier arrêt, un bon quart d’heure avant l’arrivée. Se présentant comme le représentant de l'hôtel que justement nous avions choisi sur notre guide, il s'est proposé de nous y emmener "gratuitement"… Il se trouve que cet hôtel sera complet, ainsi que les suivants où nous mèneront nos deux "guides", qui se révèleront évidemment ne représenter qu'eux même… Il faudra qu’une pluie d’orage s’abatte sur Siem-Raep, pour que nos tuk-tukeurs, s'abritant provisoirement dans la cour d’un hôtel, nous y trouvions une chambre libre et arrêtions là notre errance…
Bref, nous sommes maintenant logés. Et même véhiculés pour les jours à venir, car nous avons accepté sans rancune la vraie proposition de nos tuk-tukeurs : Nous prendre en charge pour la visite d’Angkor le lendemain et les jours suivants. Personne ne pourra dire après ça que nous sommes des clients difficiles…
Sitôt l'affaire conclue, nos guides (ils ont chacun un tuk-tuk à deux places) nous emmèneront sur le site d'Angkor, pour y acheter nos billets et assister à l'incontournable "coucher du soleil sur le site, presque tout seuls"… Un peu voilé le soleil… Et bien nombreuse la foule… Mais bon... On continuera demain!
Quand nous revenons à l'hôtel en début de soirée une seule question nous tracasse vraiment tous les quatre: "Mais quand donc va cesser ce tintamarre de timbales, tambours grelots et clochettes?" En effet, sous une grande tente dressée juste en face de l'établissement, une foule, apparemment hindoue, papote et boit le thé, au son tonitruant d'un orchestre nombreux qui joue de plein d'instruments... Renseignements pris: C'est la célébration de l'anniversaire d'un deuil qui réunit là toute une famille pendant une semaine. Pour fêter ça dans la joie et l'allégresse...
" Mais ne vous inquiétez pas, ce sera fini ce soir" nous rassure le jeune veilleur de l'hôtel…

 

Angkor: Au Cambodge, un peu comme en Egypte...

Première surprise de taille pour le visiteur néophyte d'Angkor: Mais que c'est donc grand!!!

Angkor n'est pas un temple, même grand… C'est un ensemble immense qui s'étend sur 232 Kilomètres carrés. (Grosso modo 30 kilomètres par 8). Tous les sites ne sont pas défrichés mais certains le sont à plus de 30 kilomètres d'Angkor Vat, le temple le plus célèbre et le premier sur la route.
En fait, ce qu'on voit aujourd'hui sur le site d'Angkor n'est que le squelette religieux de ce qui fut une capitale, le vaste centre politique, religieux et social d'un empire qui s'étendait alors de la Birmanie à l'ouest, jusqu'au VietNam à l'est et de la frontière malaise au sud à celle du Laos au nord. Cette mégapole abritait au début du second millénaire de notre ère plus d'un million de personnes, à une époque où Londres ne comptait pas encore 50 000 habitants…
Malheureusement pour la postérité, les établissements publics et les maisons d'habitation étaient alors construits en bois et il n'en reste rien. Seuls les dieux avaient droit à des constructions en pierres et en briques, qui sont ainsi restées les seul témoins de cette haute époque.

Sur place, avec toute cette jungle partout, il est bien difficile d'imaginer à quoi pouvait bien ressembler cette ville… Pourtant, le pouvoir d'évocation de ses ruines est énorme.


Les deux renaissances d'Angkor .

L'empire Khmer à Angkor

Dès 877 les premiers rois khmers ont édifié dans la région quelques temples et réserves d'eau, A cette époque ils étaient Hindouistes (hindouisme importé des Indes), ce qui explique que la plupart des temples d"Angkor étaient dédiés à Siva, l'un des trois grands dieux de l'hindouisme avec Brahma et Visnu. Siva symbolise les pouvoirs opposés de la création et de la destruction. On le vénère sous la forme du "linga", symbole phallique érigé sur un socle représentant la "yoni"(le vagin). Ce symbole est très présent dans les temples d'Angkor.

Angkor Vat , dédié au dieu Vishnu a été construit par Suryavarman II (1112-1152) en même temps qu'il unifiait le Cambodge et étendait l'influence Khmère sur la Malaisie, la Birmanie et la Thaïlande.
En 1177 Jayavarman VII accède au trône. Après avoir chassé les Chams (venus du sud Viet Nam) qui avaient envahi et saccagé la région, cet empereur se consacrera à l'extension d'Angkor. Il est considéré comme le plus grand bâtisseur du site, dont l'apogée date de son règne.
C'est lui qui introduisit le Bouddhisme dans l'empire Khmer (Bouddhisme du grand véhicule).
Sous son autorité furent érigés: Angkor Thom centré sur le site du Bayon, Ta Phrom, Banteay Kdei et Preah Khan
Ses successeurs continuèrent plus ou moins ardemment son œuvre, jusqu'en 1431 quand, à l'occasion de luttes opposant les Khmers au tout récent royaume de Siam (Thaïlande..) les troupes siamoises finirent par gagner Angkor et détruire la ville. Les dirigeants de l'empire khmer abandonnèrent alors les lieux pour se replier sur l'actuel site de Phnom Penh.
Ce fut le début du déclin d'Angkor en même temps que celui de l'empire Khmer.

Depuis la défaite Khmer de 1431 qui vit l'abandon de la ville par l'empire, Angkor a connu deux renaissances.
La première date du milieu du 19e siècle (1860) quand les explorateurs puis les archéologues français ont découvert, complètement envahies par la jungle, des ruines abandonnées depuis plus de quatre siècles.
Ce fut le début d'une longue période de déblaiement et de restauration des ruines, qui a été interrompue dans les années 60 par la guerre de l'occident contre les communistes, puis par le régime Khmer rouge.
La seconde renaissance a commencé avec la reprise de l'œuvre de restauration et le début de l'exploitation touristique du site, vers la fin des années 80. Aujourd'hui, la jungle recouvre encore un grand nombre de ruines non déblayées, mais elle est tenue en respect autour des sites visitables que relient des pistes carrossables. Un aéroport international a été établi à proximité pour approvisionner le flot croissant des touristes de tous bords qui n'est pas sans rappeler celui qui se rue régulièrement sur le mont Saint Michel, dont il ne vient plus à l'esprit de personne que ce site a un jour été conçu pour la méditation… Bref, c'est quand même un peu la cohue dans les temples…


Angkor Vat - Le temple hindou

Premier temple que l'on rencontre en arrivant de Siem-Reap, c'est le plus connu et le plus photographié des monuments du site. C'est même un symbole d'identité national: ses cinq grandes tours figurent sur le drapeau cambodgien.
C'est tout de même le plus grand temple du monde: le volume de pierres utilisé pour sa construction est à peine inférieur à celui de la pyramide de Kheops; mais ici, pratiquement toutes ces pierres sont sculptées.
Entouré d'un fossé large de 190 mètres , ce temple carré d'un kilomètre et demi de côté, est tourné vers l'ouest. Sachant que l'ouest est considéré symboliquement comme la direction de la mort, on a supposé que c'était le mausolée de son bâtisseur l'empereur Suryavarman II (1112-1150), en même temps qu'un temple dédié à Vishnu.

Des Najas de pierre (serpents représentés ici avec plusieurs têtes) dont les longs corps, portés par des statues de dieux ou de guerriers, bordent les terrasses et l'avenue d'accès longue de 475 mètres, forment le lien entre les humains et ce monde des dieux.

Les murs des galeries sont entièrement recouverts de bas reliefs représentant les mythes et les épopées hindous, ainsi que les batailles gagnées par le roi. On y trouve aussi les superbes "apsaras", ces divinités féminines, gracieuses et énigmatiques qui chantent et dansent pour divertir les dieux. Plus fines que leurs consoeurs indiennes, les apsaras khmères sont aussi plus érotiques. On en compte mille sept cents, toutes différentes par leur attitude, leur costume ou leur coiffure.

Un point commun à tous les temples est la difficulté des escaliers vertigineux qui escaladent les tours: les marches y sont de toutes les tailles, hautes, basses, mais toujours extrêmement étroites, moins de la largeur d'un petit pied… Si vous ajoutez la mousse glissante et la pluie, la grimpette devient sportive et dangereuse!


Angkor Thom - la grande ville

Ce site est clos par un haut mur d'enceinte, percé de portes monumentales (20 mètres de haut), elles même encadrées de tours décorées d'éléphants grandeur nature.
Tout autour, un grand fossé était évidemment inondé et habité, dit on, par de féroces crocodiles.
Chaque côté de la chaussée d'accès qui traverse le fossé, est bordée d'une file de statues de dieux ou de guerriers portant un naja géant, longue de près de cent mètres.

Au centre du site on trouve le BAYON qui apparaît de loin comme une sorte de colline de pierres.
En approchant, on s'aperçoit que ce tas de pierres est en fait structuré en 54 tours qui portent chacune quatre exemplaires du même visage (un sur chaque face). On a vite l'impression de ne pas pouvoir échapper à ce regard énigmatique multiplié par 216…Imaginez vous suivis par le regard d'autant de Jocondes gigantesques…

Ces tours sont impressionnantes et témoignent d'un culte de la personnalité plus abouti que celui de tous les dictateurs de notre époque réunis: Tous ces visages ont été reconnus comme étant celui de Jayavarman VII lui-même(1181-1219), reproduit ici sous la forme d'une importante figure du bouddhisme du Grand Véhicule.

Les bas reliefs montrent des scènes de la vie quotidienne et évoquent des batailles gagnées par ce grand dirigeant.
Ce temple est plus petit et donc plus facile à appréhender qu'Angkor Vat.
Il nous a d'autant plus séduits que nous y étions pratiquement seuls au moment de notre visite, ce qui a été fort rare.
Quittant le Bayon par le nord, on passe devant la terrasse des éléphants: Longue de 350 mètres, cette terrasse est bordée d'éléphants et de lions sculptés grandeur nature. Elle servait aux grandes audiences du roi. On peut imaginer sur l'immense esplanade, la pompe et la grandeur de l'empire Khmer avec la parade haute en couleurs de l'infanterie, des cavaliers, des chariots, des éléphants, devant le roi et les mandarins cousus d'or.


Ta Prohm (Vieux Brahma).

Pas bien loin d'Angkor Thom, le temple du Ta Prohm a aussi été construit par Jayavarman, pour être un sanctuaire du bouddhisme dédié à sa mère.
C'est le deuxième temple après Angkor Vat à être photographié partout. Celui dont les images de murailles de pierres envahies et tordues par les racines géantes ont fait le tour du monde.
L'Ecole Française d'Extrême Orient a décidé de ne pas le "nettoyer" complètement, pour lui laisser son caractère complexe de labyrinthe et en faire le représentant de l'aspect probable de tout le site d'Angkor, lors de sa découverte par les occidentaux au 19e siècle.
Les racines aériennes d'énormes ficus et de Palers (ceiba pentandra) courent le long des murs, traversent les ouvertures, s'insèrent dans les fissures et embrassent passionnément les pierres… Détruisant les murs mais aussi les maintenant debout…
Bas reliefs, étroits corridors bloqués par des pierres, lichens, mousses, plantes grimpantes, petites cours, tours, pierres sculptées en équilibre instable au dessus de nos têtes…
Ce temple dégage un charme puissant, romantique, irréel. Il illustre bien le pouvoir récupérateur de la nature et la puissance de la jungle dès qu'on la laisse à elle même.
Peut être avez vous déjà vu des images de ce temple… avec en premier plan la belle Angelina Joly. En effet, il semble que c'est là qu'ont été tournées les scènes de jungle du film "Tomb Raider"….

Il est intéressant de lire la description que Pierre Loti faisait de Ta Prohm lors de sa visite en 1901, dans son livre "un pèlerin d'Angkor".

 

Les aventuriers de l'arche perdue

En dehors des "poids lourds" évoqués ci dessus, il y a sur le site d'Angkor, plein d'autres temples à voir et autant qui n'ont pas encore été défrichés. Le pouvoir évocateur d'Angkor nous a paru l'équivalent pour l'empire Khmer de celui de Louxor pour les splendeurs de l'Egypte des pharaons. Mais ici le désert est remplacé par la jungle et le pouvoir intimidant des ruines en est encore amplifié.
On se prend vite pour un aventurier, à peine met on le pied à côté du sentier…
Et puis, comme là bas, le site n'est pas un sanctuaire réservé, isolé de la réalité environnante comme peut l'être (abstraction faite de toute proportion…) celui de Versailles par exemple… Des gens vivent, travaillent dans les temples… Il y a peu de temps encore, certains même y dormaient… Des villages sont établis à proximité, le long des chemins entre les temples. On y cultive des champs et élève des buffles… Les enfants qui vont à l'école le matin, travaillent l'après midi à tenter de vendre aux touristes colifichets, guides et cartes postales… C'est parfois irritant, mais finalement plutôt sympathique
On vous a présenté les principaux monuments mais il y en a plein d'autres à voir, moins visités, plus vieux, plus petits, il y a de quoi s'occuper! N'hésitez pas à vous y précipiter, on ne s'y ennuie pas...


Cambodian Queen

Après ces trois jours d'archéologie, c'est par la voie des eaux que nous quittons Siem-Reap pour retourner vers Phnom-Penh. Le parcours fluvial qui relie Angkor à Batambang a la réputation d'être le plus spectaculaire du pays. Plus intéressant que la longue traversée en Speed boat du lac Tonlé Sap que l'on peut faire en venant de Phnom-Penh sans jamais apercevoir le rivage du lac. Comme en mer mais sans l'eau salée…
Le parcours Siem Raep Battambang commence lui aussi sur le lac Tonlé Sap dont on traverse rapidement l'extrémité nord, avant de s'enfoncer dans les méandre marécageux de la rivière Sangker. La navigation se poursuit alors à travers buissons aquatiques, cités lacustres, villages flottants de pêcheurs…

Mais commençons par le début:
Nous avons acheté notre passage dans une agence locale qui nous a donné rendez vous à l'hôtel à 6h30, avant le petit déjeuner, pour nous emmener à l'embarcadère situé à une dizaine de kilomètres de la ville. A l'heure dite un minibus vient effectivement nous chercher, dont nous sommes les premiers passagers. Un tour complet des hôtels de la ville et une bonne heure seront nécessaires pour remplir complètement le véhicule, avant de prendre vraiment la route de l'embarcadère. On commence à regretter un peu l'absence du "p'tit dej"…
Notre embarquement a lieu dans un village de pêcheurs que nous n'aurons pas vraiment le loisir de visiter. A peine avons nous mis le pied hors du bus, que nous nous faisons littéralement pousser dans une barcasse où s'entassent déjà une quarantaine de personnes et pas mal de paquets. Il semble bien qu'il ne manquait que nous pour qu'elle atteigne sa limite de flottabilité… Si nous avions mangé un petit déjeuner, c'est sûr qu'avec notre poids, l'eau passait par dessus le plat bord…
Là on s'est aperçu que l'agence nous avait sérieusement baratinés quand elle nous avait parlé de petit déjeuner à bord. Heureusement qu'on a emporté quelques bananes avant de partir…
Bref, on finit par se faire une petite place au sein d'un groupe hétérogène de "locaux" et de touristes étonnés qui se retrouvent comme nous, alignés face à face, serrés sur deux bancs en bois. Et vogue la galère!
Comme ils disent dans le guide c'est "scenic"!!
La saison des pluies vient de finir, la campagne est encore inondée et les chenaux sont bien pleins. Cela nous évitera d'échouer et d'avoir à descendre pour alléger et pousser le bateau ( si si, ça arrive!).
On avance assez vite en faisant pas mal d'éclaboussures. Parfois aussi, en forçant un peu son chemin au sein des buissons et arbustes qui encombrent le marécage; les branches qui se referment alors sur le passage du bateau, mettent de l'animation à bord en fouettant les passagers.
Notre barcasse est équipée de la fameuse transmission "long tail" si populaire en Asie du Sud Est. Ça se résume en un long arbre de transmission qui sort tout droit du moteur installé en surélévation du tableau arrière, sans cardan ni coupleur souple d'aucune sorte. Soutenu par un treuil, l'arbre fait tourner une hélice trois ou quatre mètres derrière le bateau. Notre puissant diesel est installé comme cela, sans façon, au milieu de nous les passagers, et il est servi par un jeune mécanicien d'un douzaine d'année. Très attentif, ce dernier veille à ce que le tuyau souple qui évacue l'eau de refroidissement du moteur par-dessus bord juste derrière nous, ne glisse vers l'intérieur pour nous asperger et remplir le bateau.
Près de nous, il tâte régulièrement le pouls et surtout la température de son précieux protégé. Un moment nous l'avons même vu prendre une clé plate et serrer quelques boulons au rôle mystérieux.
De temps en temps, le moteur cale. Le jeune mécano se précipite aussitôt pour relever l'ensemble propulsif à l'aide de son treuil et faire le funambule sur l'arbre afin d'atteindre l'hélice pour la dégager des racines et autres débris qu'elle a emmenés dans sa course folle.
Au cours de ce trajet, on découvre la vraie vie aquatique des pays de deltas (que l'on va retrouver en Thaïlande et au VietNam): Maisons isolées sur pilotis, villages aux rues noyées… Barques qu'on croise sans arrêt, comme chez nous les voitures… Bateaux des pêcheurs nomades qui se regroupent en petits villages flottants, amarrés au milieu de nulle part…
En les croisant de près, on peut admirer toute la batterie de cuisine rutilante pendue aux parois de l'abri situé à l'arrière du bateau et on peut distinguer le feu ouvert qui brûle sous la marmite…
Ces bateaux qui servent d'habitation à des familles de pêcheurs parfois nombreuses, mesurent moins d'une dizaine de mètres de long. Plutôt des pirogue partiellement pontées…
Entre février et juin, pendant la saison sèche, le trajet Siem Raep Batembang, sur des bateaux plus petits, est plus aléatoire et peu durer la journée. Aujourd'hui il ne durera que quatre heures et nous serons à destination vers midi.
Après midi à musarder dans des rues sans beaucoup de charme, repas du soir dans le restaurant "Smoking Pot", école de cuisine d'une association qui forme des gamins des rues comme le"Friends" à Phnom Penh, puis nuit dans un hôtel dortoir.
Nous repartirons le lendemain matin par le bus pour rejoindre Phnom-Penh. Les guides sont tous d'accords pour dire que le trajet Batambang Phnom-Penh en bateau ne vaut pas la peine.

 

Au VietNam, une incursion derrière le "rideau de fer"?

Nous terminerons notre séjour au Cambodge par un voyage en bus qui nous amènera de Phnom-Penh à Ho Chi Minh City (On a un peu de mal à ne pas dire Saigon…).
Nos passeports portent un visa Vietnamien obtenu en une journée auprès de l'ambassade locale, par l'intermédiaire du premier hôtel ou nous sommes descendus à Phnom-Penh. Nous avons aussi "booké" dans une agence, des tickets de bus Phnom-Penh Saigon sans changement de véhicule à la frontière (bien vérifier ce point là). C'est facile, confortable et rapide.
Les formalités d'accès au VietNam se sont beaucoup assouplies récemment mais le passage d'un poste frontière reste encore assez impressionnant. Les documents y paraissent plus épluchés que partout ailleurs - sauf peut être, depuis quelques temps, aux Etats Unis.
Il faut dire qu'aujourd'hui le VietNam s'ouvre grand au tourisme. On l'avait lu ici ou là et on avait compris que les choses devenaient plus faciles, plus ouvertes, plus fréquentées aussi. En fait c'est un euphémisme de dire que le Vietnam s'ouvre progressivement au tourisme: Là où il est ouvert, il ne pourra jamais être plus ouvert qu'aujourd'hui... Et quand c'est le cas, ce n'est pas un début timide: C'est carrément une organisation intensive, active, efficace, pour tirer le maximum de revenus de touristes qui s'y pressent déjà en foule… Nous constaterons cela dans la baie d'Ha Long, à Sapa, à Hanoi aussi… Plus au sud c'était la période des pluies alors forcément… Mais on a bien vu que Hué était déjà très équipée et que très vite Nha Trang n'aurait rien à envier à La Baule…
Bref, je crois qu'on peut dire que le VietNam est déjà entré sans nuance dans le monde du tourisme de masse.


Premier contact avec Saïgon.

Pour nous héberger à Saigon - Je crois que je vais me résoudre à dire Saigon, malgré l'immense respect que j'éprouve toujours pour Ho Chi Minh.

Dire autrement est vraiment trop long et je trouve HCMC, comme on dit là bas, pas très joli - nous avons choisi un hôtel ("Miss Loï"), selon les conseil de notre guide "Lonely Planet".

A la descente du bus, il sera difficile d'indiquer notre destination à un chauffeur de taxi. Nous ne pourrons que lui confier notre guide qu'il aura un peu de mal à déchiffrer (il est toujours conseillé d'avoir l'adresse désirée écrite en vietnamien sur un papier, car la pratique de l'anglais et du français n'est pas courante dans le pays). On a quand même fini par trouver…

L'arrivée a quand même été assez déroutante: Entre les rues principales de Saigon, les blocs d'habitations sont construits sans plan directeur, au hasard des fortunes des habitants, avec des venelles qui les traversent pour desservir les maisons. Le long de ces venelles très étroites, où ne pénètrent que les deux roues, on trouve sans transition toute la gamme des constructions; la cabane style bidonville voisine avec des maisons toutes neuves et plutôt riches. La cour de ces maisons riches est d'ailleurs souvent encore encombrée de la cabane qui les a précédées… Juste à côté, un lopin abandonné à lui-même, attend d'avoir un futur…

C'est au sein d'une telle venelle, à une centaine de mètres de la rue, que se situe l'hôtel de Miss Loï: Juste la taille d'un portillon, comme largeur visible de façade, avec un petit écriteau qui se balance au dessus. Il faut ouvrir les yeux pour ne pas le rater. Heureusement le système de numérotage est rigoureux dans ces venelles et quand on connaît l'adresse et son mode d'emploi, on ne peut pas se tromper.
Derrière le portillon, au fond d'une cour couloir, on aboutit à l'accueil de l'hôtel. Une fois passée la porte d'entrée, le bâtiment semble s'élargir un peu. Il y avait tout de même deux escaliers pour desservir une bonne vingtaine de chambres.
Dans le salon d'accueil très décoré et meublé de canapés confortables, une bonne dizaine de personnes est occupée à des taches diverses, parmi lesquelles l'épluchage des légumes pour la soupe du soir. La "tenancière" s'en détache, très souriante, nous souhaite gentiment la bienvenue et nous montre nos chambres. C'est propre, simple, agréable et surtout très calme…


L'empire incontesté du deux roues.

Le plus étonnant à l'arrivée dans cette ville c'est l'intensité de son trafic de deux roues et le bruit formidable qu'il produit. Stressant, vraiment… On n'ose plus traverser une rue, sans la protection d'un feu rouge et on a un peu de mal à converser sans hurler. Déjà Phom Penh et surtout Bali nous avaient préparés au trafic intense des deux roues, mais ici, c'est le pompon en terme de densité et de vacarme. Il parait miraculeux de ne pas voir se produire un accident à chaque carrefour. Mais non, il semble que tout ça glisse en douceur et que tous ces conducteurs soient très attentifs à ce qui se passe autour d'eux.
Une anecdote: Gérard attend depuis quelques minutes en trépignant impatiemment sur le trottoir, que le trafic lui laisse une chance de traverser une large avenue. Tout à coup, il voit une petite vieille descendre du trottoir, juste à côté de lui, et s'aventurer de son pas menu, sans se presser ni ralentir, au sein du flot motorisé. La réaction réflexe du skipper aurait été de se précipiter pour retenir la dame et lui sauver la vie. Mais, surprise trop forte, il n'en a pas eu le temps et il n'a fait que la regarder traverser tout droit d'un pas constant, sans jamais tourner la tête ni à droite ni à gauche, évitée au dernier moment par ceux qui la croisaient, et arriver sans encombre sur le trottoir d'en face.

Pour sa part, Gérard n'a pas pu se résoudre à la suivre. Las d'attendre, il a remonté l'avenue jusqu'au premier feu pour pouvoir traverser…


Et du bruit tonitruant.

Tout ce trafic fait un bruit infernal, dantesque, inouï, épouvantable..., On pourrait penser que notre style de vie nous ayant fait oublier les villes et leurs nuisances, on est plus sensibles que la moyenne. Mais enfin, on arrive de Phnom-Penh et juste avant, on est passés à Kuala Lumpur, à Singapour, à Bali…
Ce qu'il y a de nouveau dans cette ville – et nous verrons plus tard que ça touche tout le pays – c'est que tous les conducteurs d'engins, quels qu'ils soient, restent en permanence la main scotchée sur le klaxon. Motos, mobylettes… mais aussi voitures et autobus... Il n'y a que les cyclo-pousse qui sont silencieux… C'est vraiment étonnant.
Bref, il y a beaucoup d'agitation et de bruit dans la rue et si vous pouvez trouver un hôtel bien planqué au fond d'une venelle sans circulation, vous aurez déjà fait un grand pas vers le "bon choix"…

Quelques heures de marche pour découvrir les endroits remarquables de la ville en suivant notre guide anglophone.
On trouve comme ça: la cathédrale Notre Dame, de style "néo romanesque"???; la poste, témoin intéressant de la splendeur des PTT de l'époque coloniale; le musée qui retrace l'histoire du pays, de l'ère néolithique à sa libération de la domination française…

Après une grosse journée passée ici, nous aurons atteint notre point de "satisfaction" et nous prendrons le bus pour Dalat, tôt le matin, avec de gros espoirs calme et de fraîcheur.
Nous y avons l'adresse d'un hôtel sympa, communiqué par Miss Loi.
Pas besoin de réserver nous a-t-elle dit...


Dalat arrose ses fleurs

Dalat, 130 000 habitants, est réputée pour son climat frais, ses lacs, ses forêts et ses jardins. Ce serait une ville "artistique" et un lieu de villégiature traditionnel pour les saïgonnais.
Assoiffés de calme, nous sommes donc partis la fleur au fusil vers cet Eden, pour arriver en fin de samedi après midi dans un sac de nœuds de fleurs…

Déjà dans le car, un jeune vietnamien nous avait appris que Dalat organisait cette semaine sa célèbre fête des fleurs; que ce samedi en était le point d'orgue et que la ville était aujourd'hui le point de convergence de toute la région. Imaginez quelque chose comme le carnaval de Nice… Il avait clairement montré un étonnement poli quand on lui avait dit ne pas avoir réservé d'hôtel…
Nous avons compris pourquoi dès l' arrivée, quand notre car a dû nous abandonner quelque part dans un faubourg de la ville parce que cette dernière était entièrement bouclée et interdite aux véhicules.
Sans vrai plan, nous tentons bravement mais sans grand succès de nous repérer. Pas un taxi en vue. Tous les hôtels visibles à l' horizon sont pleins sans exception. Et en plus, il pleut… Nous nous sentons bien seuls…
Au bout d'une vingtaine de minutes, un taxi passe par là et accepte de nous charger pour tenter de pénétrer en ville. Ruses de sioux, longs détours pour tenter de contourner les barrages,… Rien à faire, au bout d'une demi heure, il nous dépose dans un autre faubourg et nous souhaite bonne chance de ce côté ci…
Enfin tout ça, c'est ce qu'on comprend de notre situation, car personne ici ne parle anglais ni français. Et nous ne sommes pas encore excellents en Vietnamien… Seulement les signes, les grimaces et les gestes… Et même là, on se trompe!
On se traîne dans la rue, notre moral flottant derrière nous dans le caniveau qui draine la pluie qui ne cesse de tomber. "No vacancy"… "no vacancy"… "Demain si vous voulez, mais ce soir nous n'avons rien"…
Le miracle finit par céder devant notre persévérance: deux chambres libres dans un hôtel chinois, assez sinistre. C'est inespéré… On comprend vite pourquoi: l'hôtel est "moyennement" tenu, rempli de familles bruyantes, télé à fond, cris incessants, portes qui claquent… Mais bon, on ne dormira peut être pas beaucoup ce soir mais ce ne sera pas dans la rue. C'est déjà çà.
Et ce ne sera que pour une nuit… En effet, un peu plus tard, au hasard de nos errances, nous finissons par tomber sur l'hôtel que nous convoitions. Effectivement super sympa, joli, calme, bien tenu et tout et tout… Chambres adorables et confortables… Et toutes occupées aussi… Demain seulement, si nous voulons, il y aura de la place.
Bien sûr que nous voulons… Nous y débarquerons donc après notre nuit "chinoise" et nous y serons comblés. La propriétaire parle français, l'établissement s'appelle le "Dreams" (rêves) et il n'a pas volé son nom.
Mais bon, même sans problème d'hôtel, il pleut sans arrêt sur la ville et quand nous ne sommes pas au resto ou au troquet, nous tentons de trouver, sous un parapluie très vite acheté, une raison d'être à notre présence ici…


Là haut sur la colline.

La fête des fleurs sous la pluie nous séduit mollement, et de toutes les façons il est trop tard: Le soir de notre arrivée, c'était le dernier spectacle!
Nous préférons tenter une attraction locale qui se présente sous la forme d'un petit train ne comprenant qu'un seul wagon, qui relie en une demi heure Dalat au village de "Trai Mat" situé plus en altitude (sans doute une petite dizaine de kilomètres). La gare de Dalat, façon gare d'omnibus de bourgade française des années 50, nous abrite de la pluie jusqu'à l'heure du départ.
Comme le "ferrocaril" des hauts plateaux équatoriens, ce train ne fonctionne plus que pour les touristes et n'est pas très fréquenté. Il nous permet de voir défiler une campagne humide, hyper cultivée…et couverte de serres en plastique.
Au bout du chemin, nous trouverons quand même une justification très suffisante à notre balade: Un délire kitchissime, la pagode de Linh Phuoc, dont tous les murs et une haute tour sont recouverts de décoration faite d'éclats de porcelaine multicolores, a été construite vers 1950. A l'extérieur, elle est gardée par un dragon gigantesque, entièrement couvert de céramiques, qui court dans le jardin, rentre sous terre, ressort et crache des flammes (en porcelaine).
Des extensions de la pagode sont en chantier et on peut voir les artisans qui cassent les poteries et les collent artistiquement sur les façades, colonnes, tours, escaliers… enfin partout quoi…

La maison du "fada"

Dans la série architecture rigolote, Dalat nous dévoilera un autre lieu intéressant, situé en ville cette fois: L'hôtel - galerie "Hang Nga ", surnommé la "maison folle"…
De loin, la construction a l'air d'un rêve délirant et coloré sorti de l'univers de Walt Disney.
Vu de plus près, c'est un rassemblement de monticules disparates hésitant chacun entre le champignon et la termitière. Ils sont reliés par un réseau de passerelles, de boyaux, d'escaliers, formant un itinéraire imprévisible, courant en hauteur, montant, descendant et surtout reliant entre elles, des "cellules" aménagées dans ces monticules de béton. Chaque cellule est une sorte de caverne vaguement circulaire qui abrite un lit double et une salle d'eau. Chacune est décorée et meublée de céramiques, de bois et de béton bruts, sur un thème bien reconnaissable à la forme de la cheminée, du lit, des meubles: Girafe, singe, kangourou, Gourde, etc…
On a trouvé ça très intéressant et drôle. L'artiste – architecte auteur de ce délire toujours en évolution, est Mme Dang Viet Nga. Elle est la fille de Truong Chin , ancien compagnon de Ho Chi Minh, qui a été président du Viet Nam de 1981 à 1988. Cela explique peut être que cette enclave surréaliste continue d'évoluer, bien qu'on dise que son architecture n'est pas du goût de tout le monde…

En venant ici pour se remettre de la fureur de Saigon, on pensait trouver une petite ville d'eau ensoleillée, reposante, où se promener au bord du lac, se reposer de nos promenades en écoutant de la musique devant un kiosque tarabiscoté façon fin de siècle… Style Evian quoi…
On n'imaginait pas du tout cette pluie incessante et on quittera Dalat assez vite, sans trop de regrets.


Toujours plus au Nord

La remontée vers le nord va continuer en bus, puis en train de nuit jusqu'à Hue. Toujours sous la pluie…
Sur la route, nous croiserons Nha-Trang, une station balnéaire déjà bien installée. Ce n'était pas vraiment la bonne saison pour visiter l'endroit: la mousson de Nord Est, non contente d'y amener la pluie, faisait aussi exploser la mer en rouleaux jaunâtres sur son immense plage déserte. Cette station est réputée, pendant la mousson de Sud Ouest pour son eau turquoise et calme… D'autres touristes croisés plus tard, nous ont fait l'apologie de cet endroit, de ses eaux claires et des îles du large. C'est à ce moment là que tous les hôtels que nous y avons croisés doivent être pleins et que la station doit ressembler à la Baule.

Ensuite, ce sera Hoy An, un petit village "touristique" situé à 20 kilomètres au sud de Danang, où nous arrivons après une nuit de train couchette confortable et propre… - Nous avons bien dormi et ce moyen de transport nous parait tout à fait recommandable pour les longs trajets le long de l'axe nord sud du pays.
Hoy An est une petite bourgade traditionnelle, pleine de caractère, et conservée avec soin pour son exploitation touristique... Un parcours intéressant d'une petite journée permet d'en évoquer l'histoire en visitant de vielles maisons traditionnelles en bois.
Malgré cela, notre humeur demeure morose: Il pleut sans arrêt et le charme de l'endroit n'y gagne rien… Et puis, quand une maison n'est pas a visiter à Hoy An, il y a plus d'une chance sur deux pour que ce soit une boutique pour touristes. Et toutes ces boutiques de souvenirs, fringues, chaussures, peinture, sculpture,…vendent toutes les mêmes articles et les mêmes modèles… Partout… C'est un peu lassant et navrant…

Que d'eau, que d'eau!!! Et on dirait que les hôtels ne prévoient pas ces intempéries car rien dans les chambres ne permet d'accrocher des vêtements humides ou dégoulinants… ni de faire sécher des chaussures…
Plus généralement, si les vietnamiens nous sont apparus très préoccupés d'exploiter efficacement le touriste, ils nous ont rarement semblé très concernés par les problèmes que nous pouvions rencontrer ni imaginer les services réels qu'ils auraient pu nous rendre… Je parle évidemment ici des gens de l'univers du tourisme car ce sont les seuls que nous ayons vraiment rencontrés en situation.


Les parapluies de Hue.

Hue est l'ancienne capitale impériale du VietNam, installée sur le bord de la rivière des parfums: Lors de notre arrivée en car dans la ville moderne, on pouvait voir la cité impériale dérouler ses murailles le long de la rive opposée de la rivière. Et il pleuvait toujours, évidemment…
Arrivé à son terminus, notre bus dépose son chargement devant un hôtel de la ville où une nuée de cyclo-pousse et de chasseurs d'hôtels entreprend les voyageurs, dès leur descente du car, avec beaucoup de "conviction" et de "persévérance"... Nous nous sentons un peu agacés par cette insistance et comme nous avons déjà choisi un hôtel dans notre guide, nous aimerions pouvoir le demander calmement à un chauffeur de taxi..
Pour se dégager, Gérard donne de la voix et eux qui ne font que leur boulot ne comprennent pas bien que cet européen parlant fort leur donne son avis sur leur façon de le faire, dans un langage incompréhensible…
Nous rassemblons vite nos sacs et nous enfuyons littéralement sous la pluie pour retrouver un peu de calme. Rapidement, un taxi en maraude nous accueillera pour nous emmener calmement à l'hôtel choisi.

Sitôt installés nous tentons une sortie vers la cité impériale, mais il pleuvait vraiment trop et nous sommes vite rentrés, les pieds trempés, tout nous paraissait sans grand intérêt sous cet éclairage.
Sans céder à la déprime qui nous serre de près, nous organisons dès ce premier soir, avec l'aide de l'hôtel, une sortie en "jonque" sur la "rivière des parfums", qui nous emmènera demain faire le tour des pagodes et tombeaux impériaux proches de Hue.
Nous serons récompensés de notre persévérance par une excursion qui se révélera fort agréable et intéressante.

C'est ainsi que le 15 décembre au matin, on embarque tous les quatre sur un petit bateau de rivière, heureusement doté d'un abri, en compagnie de Dong notre guide francophone.

Un peu de publicité gratuite et surtout bénévole

On vous recommande vivement les services de notre guide. C'est un monsieur charmant, ancien professeur de français, qui saura tout vous dire sur les empereurs et les sites historiques; mais aussi sur l'histoire plus récente du pays et l'évolution qu'il connaît actuellement. Nous lui sommes très reconnaissants de l'intérêt qu'il a su apporter à cette journée.
Ses coordonnées: Mai Van Dong
Tph portable:0913 465 230
Email: donghue61 @yahoo.com
Site: www.nomade-vietnam.com

Promenade dans un passé pas si lointain

Cette journée nous a sauvés de la morosité.
La pluie avait enfin marqué une pose!!!
Nous avons découverts des sites magnifiques, expliqués avec beaucoup de gentillesse et de connaissances par Dong qui parlait parfaitement le français.
Le repas préparé pour nous par l'équipage familial de 3 personnes, l'ambiance un peu intime qui régnait à bord où nous étions les seuls passagers… Même un rayon de soleil a bien voulu se montrer l'après midi.
Tout cela nous a réconciliés avec notre voyage…
C'est donc une promenade à ne pas rater dont voici quelques étapes:


La pagode bouddhiste ThienMu (1844).

Le domaine de la pagode est enclos au bord de la rivière. Une tour octogonale y précède des jardins et des pavillons qui respirent calme et sérénité.
Pourtant les bonzes qui vivent et méditent ici peuvent être assez remuants et se sont fait remarquer plusieurs fois dans l'histoire récente par leur attitude contestataire.
En 1963, les photos du bonze Thich Quang Duc s'immolant par le feu à Saigon, ont fait le tour du monde.
Dans les années 80, des démonstrations anti-communistes partirent encore d'ici.
Aujourd'hui le calme parait revenu et le petit groupe de moines, novices et nonnes qui vit dans cette enceinte parait bien éloigné du siècle qui sévit dehors.
Dans les jardins, on voit aussi une stèle verticale, posée sur le dos d'une tortue massive en marbre: c'est un symbole de longévité.


Le tombeau de Tu Duc (ou temple Hoa Khiem)

L'empereur Tu Duc était un homme remarquable et très remarqué:
Pendant son règne, le plus long de la dynastie Nguyen (1848-1883) et vécu dans un luxe inouï, il a fatigué 104 femmes et un nombre incalculable de concubines, sans parvenir à avoir d'enfant. (Les mauvaises langues dirent qu'il était devenu stérile suite à la petite vérole…)
Dans la tradition de la noblesse de l'empire Vietnamien, c'est la descendance qui se charge de faire construire le tombeau du papa, et d'y écrire son panégyrique. Sans héritier, l'empereur Tu Duc a résolu la question en présidant lui même à la construction de son propre tombeau.
Et il n'a pas lésiné sur les moyens:
Il a fait venir une stèle pesant une vingtaine de tonnes, d'une carrière située à plus de 500 kilomètres au nord, pour y graver son histoire et celle de son règne. Cela s'est traduit par une longue suite de "pensées", qui glorifient les réussites de cette période. On y trouve bien l'aveu de quelques erreurs de gouvernement, mais elles sont toujours accompagnées de la mention des insuffisances de l'entourage impérial qui ont permis ces mauvais choix.
Il a baptisé sa tombe "Khiem", qui veut dire "modeste"… C'est un adjectif dont peu de gens auraient songé à l'affubler.
Le paysage qui constitue le site immense de ce tombeau est entièrement artificiel: tout le relief en a été remodelé pour créer un univers d'harmonie, de calme, de lignes qui reposent l'œil… Tout y a été planté, construit et réussi, avec cet objectif: pavillons, allées, jardins, lacs… C'est vraiment très beau. Notre seul regret: les milliers de frangipaniers qui nous entourent n'étaient pas encore en fleurs…Il aurait fallu revenir en mars.

Dans la cour d'apparat, bordée de statues de mandarins, d'éléphants et de chevaux, les représentations des hauts fonctionnaires sont toutes de petite taille… Explication: Tu Duc mesurait 1m53 et les mandarins de la cour devaient obligatoirement être plus petits…
Dernière anecdote: De son vivant, l'empereur a souvent séjourné dans ce "palais-tombeau" mais il n'y a pas été enterré. Comme sa sépulture devait recevoir un trésor important, on voulait éviter les voleurs: Tous les serviteurs qui ont procédé à la mise en terre ont été décapités immédiatement après et on ne sait pas où est la vraie sépulture.


Le tombeau de Khai Dinh

L'empereur Khai Dinh s'est moins fait remarquer et n'a pas régné longtemps (1916-1925). Il passe pour avoir été très francophile au temps de la colonisation. A tout le moins, il était très apprécié du gouvernement français.
On accède à son tombeau en traversant beaucoup de cours et de pavillons successifs, reliés par de petits escaliers gardés par des dragons, … Ce site ne nous est pas apparu un lieu magique comme celui de Tu Duc mais il réserve tout de même une belle surprise à l'intérieur du tombeau: Toutes les parois, le sol et le plafond sont intégralement recouverts de céramiques très colorées et ouvragées sur le thème des quatre saisons. C'est vraiment magnifique.


Le tombeau de Minh (1820-1840)

L'empereur Minh Mang a régné quelques années avant Tu Duc .
L'architecture bâtie est harmonieuse et surtout très intégrée aux lignes naturelles du paysage environnant. Beaucoup de terrasses qui se superposent, de lacs, de bassins que l'on traverse sur des ponts de marbre…
Le paysage est naturellement très beau mais on ne ressent pas ici la magie du chef d'œuvre d'art paysager qu'a réalisé Tu Duc et si les bâtiments sont harmonieux, leurs lignes générales paraissent plus rigides.

Conclusion: si vous ne devez en voir qu'un, vous aurez compris que nos préférences vont au tombeau de Tu Duc.


Après Hue, on se l'est jouée confortable, en rejoignant Hanoi par avion.

Vu le temps qu'on a rencontré depuis Dalat, ces cinq derniers jours …On avait quelques craintes pour nos projets de visites. Parcourir Hanoi sous la pluie, passe encore, mais découvrir la baie d' Ha Long dans le brouillard ne nous enchantait guère… Arpenter les pentes montagneuses de Sapa sous un parapluie non plus…
Eh bien, à partir du moment où nous avons mis le pied à Hanoi, nous n'avons plus reçu une goutte de pluie.
Il faisait nettement plus frais qu'à Hue, mais la ceinture pluvieuse de cette mousson de Nord Est semble se contenir entre le nord de Saigon et celui de Hue.


Hanoï

Cette ville a été la capitale impériale de 1010 avant JC jusque 1802, avant que la dynastie des Nguyen ne lui préfère Hué. A partir 1902 elle est redevenue la capitale de l'Indochine française d'abord, puis celle du VietNam indépendant ensuite.
Construite au bord du fleuve rouge (Song Hong), son nom qui signifie "la cité dans la courbe de la rivière", lui a été donné par l'empereur Tu Duc.

Les restaurants des rues
d'Hanoi


Les rares et minuscules espaces que les véhicules laissent libres sur les trottoirs de la vieille ville, à Hanoi, sont immédiatement investis par des familles qui y cuisinent accroupis autour de feux de charbon de bois.

De tôt le matin jusque tard le soir, ces gens préparent en plein air, la nourriture de quelques clients qui viennent la manger accroupis auprès d'eux. Ce sont les restaurants vietnamiens bon marché. Les plus aisés disposent d'un couloir donnant sur la rue et peuvent ainsi éviter d'avoir leur fourneau directement sur le trottoir.
Nous n'oserons jamais nous installer là pour manger notre soupe, accroupis sur des tabourets minuscules au milieu de la circulation klaxonnante…

Il faut sans doute avoir été entraîné très jeune à cet exercice.

Nous n'avons visité vraiment que les vieux quartiers du centre historique de Hanoi. De la ville moderne et de ses faubourgs, nous n'avons vu que ce que les vitres des cars et des taxis nous ont laissé apercevoir. Rien de vraiment remarquable si ce n'est que le trafic et l'activité nous ont paru encore plus intenses ici qu'à Saigon.
Mais le bruit et l'agitation, on peut dire la bousculade, donnent vraiment leur maximum dans les ruelles étroites de la vieille ville. Pas énormément de voitures, mais un flot plus que continu de deux et trois roues. On a l'impression qu'ils circulent sur plusieurs couches! Tout le monde semble avoir été greffé d'une prothèse motocycliste!!!
Et ici, pas moyen pour les piétons d'échapper à la pression exercée par ce trafic - heureusement pas très rapide (il n'y a pas la place…) - : les trottoirs sont tellement encombrés de deux roues stationnés qu'il n'y a plus de place pour les deux pieds. Tout le monde doit donc coexister sur la même chaussée, ces derniers prenant garde de ne pas se faire transporter involontairement par les premiers...
Autour des limites de la ville ancienne, les avenues s'élargissent où le trafic automobile reprend ses droits.
Les trottoirs permettent alors de se promener sans risque. On se retrouve dans le cadre plus luxueux d'un quartier au standard occidental où sont installés les établissements des grandes chaînes d'hôtellerie.
Tout près de la ville ancienne, on peut déambuler agréablement autour du lac, visiter la pagode bâtie sur un îlot, aller voir un spectacle de "water puppets", jeter un œil "nostalgique" aux quelques bâtiments de l'époque coloniale, dont le plus remarquable est un opéra qui a voulu, un jour, ressembler à son lointain cousin le palais Garnier…

Activisme Touristique.

Dans la vieille ville, le commerce est omniprésent, partout. Comme souvent, les rues sont structurées en spécialités commerçantes: il y a celle des bijoux, de l'argenterie, des cuirs, des vêtements, des quincailleries,… Au sein de cette organisation, dans des boutiques aux allures de couloirs désaffectés, le "bazar" règne partout, pêle-mêle… C'est un peu à l'image des souks d'Afrique du Nord, au Caire ou à Marrakech, mais en plus actif encore.

Mais enfin, même si Hanoi mérite bien une visite de quelques jours, tout ce que le VietNam compte de touristes arrive ici avec une seule idée en tête: visiter la baie d'Ha Long. Et nous ne faisons pas exception…
Et alors là, on peut dire que le réseau de distribution de cette attraction "de renom international" bat tous les records de densité... Si on imagine bien qu'Ha Long n'est plus vraiment la baie éloignée et jamais visitée qui abritait les camps de recrutement de "quasi esclaves" pour les plantations de la colonie française (revoir le film Indochine); si on s'attend à ce que des agences nous "aident" quasi obligatoirement à organiser notre visite, on est tout de même surpris de constater qu'à Hanoi, une boutique sur deux (ou presque…) vend des billets pour des Tours à Ha Long Bay. C'est vraiment devenu du standard de consommation de masse… Le contenu est invariable. Seuls les prix ne sont pas imposés et peuvent encore réserver des surprises selon les interlocuteurs.
Nous n'imaginions pas autant d'agences, mais surtout, nous n'imaginions pas qu'elles porteraient toutes les même noms… ou presque: Tout le monde peint sur son bureau l'une des enseignes recommandées par les guides en vogue (Lonely planet, le Routard…) Ainsi, on retrouve partout des Sinh Café (meilleur choix de Lonely Planet il y a quatre ans.), A-Z Queen Café (là c'est le choix du Routard…) et quelques autres. Bref, on a redécouvert ici l'ampleur du génie cloneur du sud est asiatique…
Et tous ces gens vous offrent bruyamment la même chose dans une fourchette de prix qui s'étale grassement du petit simple au très gros double… Pour EXACTEMENT la même chose…quelquefois même moins pour le prix fort..
En fait on peut choisir entre deux ou trois durées de tours et peut être deux niveaux de conforts différents, mais si la durée du tour qu'on achète est assez claire, le niveau de confort dont on disposera vraiment est beaucoup moins prévisible.
Les hôtels backpackers se sont aussi mis de la partie et sont souvent plus préoccupés des tours qu'ils vont pouvoir vous vendre que de la préparation de votre petit déjeuner… Le notre nous a fait d'entrée un rentre dedans pas possible pour nous vendre des tickets au prix maximum. Ça aurait pu marcher, si on avait été plus fatigués, ou fainéants, ou… En tous cas, le directeur nous a vraiment regardés de travers le lendemain, quand il a su que nous avions "booké" ailleurs, pour la moitié de son prix…
Il est certainement préférable de consulter trois ou quatre agences avant d'acheter.


La baie d'Ha Long c'est MAGNIFIIIIIIIIIQUE…

Bref, nous sommes partis vers Ha long avec un programme de deux jours et une nuit sur le bateau. Aller retour en bus compris depuis Hanoi.

Le niveau de confort promis limitait à 14 le nombre de personnes embarquées dans ce groupe. Ouais… Nous nous sommes retrouvés à plus de 30 sur le bateau. Seuls 14 passagers y dormiront le soir, (il n'y a que 7 cabines doubles) et les autres ont choisi l'hôtel sur l'île de Cat Ba; mais pour le déjeuner, il faudra se serrer autour des tables pour trouver la place d'agiter ses baguettes…
Trêve de récriminations, nous même avons toujours eu le sentiment d'être convenablement traités et d'avoir échappé au pire…

Ha Long est la Merveille Naturelle du Viet Nam:

Plus de 3000 îles au profil très abrupt qui émergent en rangs serrés de l'eau cristalline du golfe du Tonkin. Ce sont des formations calcaires de toutes tailles que l'érosion a façonnées en forme de champignons, dômes, pénis ou chapeaux…coiffées de touffes de végétation.
Ce labyrinthe maritime fonde la légende d'Ha Long: "Il était une fois un très grand dragon qui vivait dans la montagne. Alors qu'il courait vers la mer, sa queue zigzagante creusait la terre, créant vallées et crevasses, puis il plongea dans la mer, provoquant un raz de marée qui remplit les trous qu'il avait laissés derrière lui, ne laissant que quelques sommets émergés".
Au sein de cette myriade d'îlots, Cat Ba est la grosse île (300 km²) au relief tourmenté et le centre du "Parc National de Cat Ba" où plages, grottes, chutes d'eau et caves sont autant d'objectifs de randonnée.
Au départ d'Ha Long city, située sur la côte, à quelques 150 kilomètres de Hanoi, toute une théorie de grosses barques aménagées sur un modèle unique transporte le flot de touristes dans la baie et forment ainsi une véritable autoroute maritime. Tous ces bateaux ont un des deux programmes standards: Soit le tour de la baie dans la journée, soit le même tour en deux jours et une nuit. Pas d'alternative…On peut tout de même créer une variante en restant une nuit de plus à Cat Ba avec le retour sur un autre bateau.
Dans le programme de deux jours que nous avons choisi, on a le temps de s'arrêter en route pour visiter une ou deux grottes calcaires, un ou deux sites de snorkeling, de louer des kayaks de mer à l'heure, avant d'arriver à Cat Ba, d'y débarquer les clients qui ont choisi l'hôtel et de repartir à 14 heureux passagers vers un mouillage éloigné où passer la nuit.
Tout cela a encore un côté magique, même s'il y faut maintenant un peu d'imagination… Et puis des images valant mieux qu'un long discours: re- regardez le film "Indochine" dont de longues séquences ont été tournées ici. (en particulier l'histoire du marché aux "esclaves")

Le lendemain, le trajet inverse nous ramènera à Hanoi où nous dormirons, avant de repartir pour une nuit de train vers la montagne au nord ouest d'Hanoi. Nous allons à Sapa, dans la chaîne des Hoang Lien qui sépare la Chine du Vietnam. Là aussi, comme pour Ha Long Bay, nous avons acheté un tour tout préparé. Deux jours et trois nuits (dont deux dans le train.), un programme de randonnées pour apprentis marcheurs ainsi qu'un hôtel et un guide qui doivent nous attendre là bas…


Sapa, Chamonix des mers du Sud…

 

Nous débarquons à Sapa au chant des coqs, vers 7 heures… pour découvrir une station de montagne de 36000 habitants, bâtie en 1922 à 1 650 mètres d'altitude, dans une belle vallée tout près de la frontière chinoise.
La première "surprise" en arrivant à Sapa, c'est la foule bigarrée qui sillonne la ville, habillée des costumes traditionnels des tribus des montagnes. H'mongs noirs et rouges, D'zaos... Ils habitent des villages d'altitude et viennent chaque matin vendre leur production au marché. Légumes et volailles mais aussi artisanat. Les habits de tous ces gens sont faits de toile de coton qu'ils tissent eux même et sont généralement teints à l'indigo, en bleu marine foncé, presque noir.
Ces habits sombres sont décorés de patchworks et d'appliqués de couleurs vives et la tenue est souvent rehaussée d'une ceinture et d'un foulard rouges. Beaucoup de bijoux aussi, argent et perles de porcelaine multicolores.

La deuxième surprise, c'est que cette ville dont on a lu qu'elle "s'ouvrait" elle aussi au tourisme, est en fait déjà suffisamment ouverte et active pour évoquer Chamonix… Les vieux hôtels de la période coloniale cohabitent avec les nouveaux qui champignonnent un peu partout… La station est devenue à la mode et toute sa vie en est bouleversée.
Les "minorités" des tribus se recyclent dans la fourniture de souvenirs, d'opium qu'ils vendent dans des boites d'allumettes, teintent, patchworkent et brodent les tissus à tout va… S'instituent taxis motocyclistes…
A notre descente du car, sitôt débarrassés de nos bagages, nous avons été abordés par une jeune Hmong de 15 ans, habillée en costume traditionnel, qui s'est présentée comme notre guide pour ce séjour. Depuis deux ou trois an, elle s'est instituée guide anglophone; mais comme elle n'apprend l'anglais que "sur le tas", ça limite un peu la conversation… Heureusement, elle avait pour elle le charme de ses 15 ans et aimait beaucoup rire.
On ne s'est pas ennuyé mais il existe aussi des guides plus professionnels dont certains parlent très correctement le français… Question de chance ou de demande plus ferme…
Le principal attrait touristique de la région réside dans les superbes paysages de rizières en terrasses qui ondulent le long des pentes sinueuses, à flanc de toutes les vallées environnantes. Le petit problème c'est que pour être vraiment beaux et photogéniques ces paysages ont besoin de lumière et de soleil, et que les sommets autour de Sapa sont souvent dans les nuages et les vallées dans la brume… Bref, nous n'avons pas eu de pluie, mais pas vraiment de soleil non plus. Mauvais choix de saison pour les photos, mais le décors était bien là, superbe et exceptionnel.
Nous passerons deux jours ici, à nous promener, marcher, flâner, marchander… croisant régulièrement des femmes Hmong qui tentent de nous vendre leur production de tissus et quelquefois de fruits.


Mais qu'il fait donc froid par ici…

Nous aurons tout de même à Sapa un petit problème qui ne nous est pas habituel: Nous allons nous les cailler comme il y a bien longtemps que ça ne nous était pas arrivé…
Nous étions hébergés dans un hôtel tout neuf et plutôt luxueux mais aux murs encore ruisselants de l'eau des plâtres pas très secs… Guère plus de 10°C dans la chambre et le lit humide à l'unisson…
On avait bien apporté sweats et polaires, pour se promener dehors… mais on n'avait pas prévu de pyjama en pilou pilou pour cet hôtel 4 étoiles sans chauffage… L'hôtel finira par nous "LOUER" un radiateur électrique pour la nuit. Mais, mon Dieu qu'il faisait donc froid dans ce bivouac.

A propos de bivouac, si nous avons parlé de Chamonix un peu plus haut, c'est que Sapa est vraiment installé dans les montagnes et que si on est un peu aguerri, on peut aller faire de la rando moyenne montagne, jusqu'au mont Fansipan (3143m) qui est le point culminant de ces Alpes tonkinoises.

Il n'y a pas besoin d'être un grimpeur chevronné, il suffit d'être en forme et sans doute un peu entraîné.. Le tour prend 3 à 4 jours. Pas de huttes sur la route…prévoir tente, bouffe et duvet. La meilleure période serait: mi octobre à mi-décembre ou alors mars en pleine floraison "sauvage". Allez y voir, ça vous changera un peu des Alpes du Sud.
Et voilà. Après Sapa ce fut le retour vers Hanoi, Kuala Lumpur et enfin Port Dickson, où nous retrouverons le 24 décembre en début de soirée, Getaway qui ne nous avait rien préparé pour réveillonner…
Nous nous contenterons donc d'une boite de pâté Hénaff en guise de Foie Gras, contents par dessus tout cela d'avoir retrouvé notre bateau.
On va pouvoir rapidement reparler de navigation…

 

Cambodge et VietNam, deux pays en développement...

Nous venons de visiter, dans la foulée, deux pays qui ont en commun de sortir d'une très longue période de guerre (Civile? Internationale? Révolutionnaire? Coloniale?) et dans les deux cas, nous avons pu toucher du doigt la difficulté qu'il y a à se remettre d’une si longue et douloureuse catastrophe.

Le Cambodge d'abord,

où les séquelles sont encore partout très lisibles: les nombreux infirmes et victimes civiles encore jeunes qu'on rencontre partout dans les rues, survivant de mendicité, le touriste étant évidemment une cible de choix.
C'est à la fois horrifiant et horripilant.
Horrifiant, parce que c'est horrible, tout simplement. Des moignons partout, peu de prothèses et de façon évidente, des victimes laissées à elles même et semble-t-il sans grand secours national. Quand ils ne mendient pas simplement, ces pauvres gens tentent de vous vendre des copies des quelques livres qui veulent témoigner de l'horreur de l'époque de Pol Pot. Toujours la même dizaine de bouquins… Pas d'histoire de la guerre, encore moins d'analyse. Juste l'horreur Pol Potienne…
Horripilant parce qu'on n'a pas l'habitude d'être ainsi sollicités sans arrêt, que l'on gère mal sa culpabilité de ne pouvoir acheter à tout le monde, aider tout le monde… Alors on dit non… Avec le sourire mais c'est non quand même…

Et pendant ce temps là, tout le monde est affable autour de vous. Tous vous renvoient le sourire que vous leur adressez au hasard d'un regard, dans la rue, dans les magasins…
Une impression de gentillesse se dégage de ce peuple qui doit faire face tous les jours à une grande détresse, sans secours évident de l'état qui gouverne le pays.
Nous n’avons pas bien senti comment ce pays pourrait se sortir vite de cet état de misère et d'hébétude. Le tourisme? Ça aidera peut être mais ça ne suffira sûrement pas.

Et puis nous sommes passés au VietNam.

La vie n'est clairement pas facile de ce côté là non plus… Le niveau de richesse de ce pays ne parait pas très différent du précédent. Quoique… Pourtant, l'ambiance y est on ne peut plus différente.
On sent les Vietnamiens concentrés sur la reconquête de leurs richesses. Individuelles et collectives… On sent que le pays est en marche, que ce peuple sait où il veut aller et qu'il y arrivera. Sans aucun doute…
Dans les rapports que nous avons eus avec les gens il y a toujours eu beaucoup de politesse, mais peut être moins de chaleur et de gentillesse spontanée que chez leur voisin… En apparence, évidemment.
En fait, ce qui nous a surpris ici, c'est que les gens ne sourient pas. Pendant 2 semaines, on doit pouvoir compter aisément les sourires qui nous ont été rendus. Pourtant, dans ces pays où le dialogue oral n'est pas possible, le sourire est notre principal moyen de communication et nous ne sommes pas avares des nôtres…
Mais non, les Vietnamiens ne sourient décidément pas beaucoup. Ils n’ont pas l’air de faire dans le sentiment; ils paraissent concentrés, seulement occupés à bosser et à s'en sortir.
Et puis, au contraire du voisin, le gouvernement semble ici très actif pour accompagner cette volonté de progrès. On a déjà parlé de l'investissement touristique et de son hyper exploitation – tout n'est pas que positif dans cette poursuite du progrès – mais il y a aussi des zones industrielles ou commerciales qui se construisent un peu partout, des immeubles qui accompagnent la croissance d'Hanoi…

Par contre, ce que l'on n'a pas vu dans ce pays, au contraire du Cambodge, c'est l'évocation de la guerre. Rien, aucun signe. Pas d’infirmes dans la rue, pas de monuments spectaculaires, pas de propositions de livres "d'histoire" à la descente des bus, personne pour en parler… Juste le musée de Saigon, qui célèbre la décolonisation et la résistance anti-français, mais rien sur l'horreur qui a suivi. Pourtant ces milliers de tonnes de bombes, ce napalm, ces défoliants, ils sont bien tombés quelque part… On n'a sans doute pas le temps de s’apitoyer sur son passé…

Bref, l'ambiance générale ici est à l'efficacité. On ne sent plus le temps de vivre et l'indolence cambodgienne... On ne rigole pas, on ne se plaint pas non plus (sans doute parce que ça ne serait pas efficace…). On avance…
En tous cas, il nous parait clair que le futur du VietNam existe et que ce peuple est en train de le modeler à sa façon.

On aime ou on n'aime pas, mais on ne s'apitoie pas non plus… Et ça, ça nous a plutôt mis à l'aise…