LA
GAZETTE DE L'A.R.B Anyvonne Restaurant Bar | Afrique du sud-Canal de Mozambique - Le journal de bord |
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Madagascar, un arrachement long et difficile…
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Ce sera le seul "incident" de cette dernière étape
dans le canal du Mozambique.
Nous mettrons trois jours et demi pour couvrir
532 milles jusqu'à Richard's bay, où nous entrerons le 22
novembre à 4 heures du matin.
Une
centaine de milles au nord de l'arrivée, le courant des Aiguilles a été fidèle
au rendez vous: au moins quatre nœuds. Avec un vent arrière
modéré (autour de quinze nœuds) Getaway portait toute
sa toile et filait à plus de 9 nœuds sur le fond. Ça
grise un peu… Ca bouscule aussi la routine des approches d'arrivée:
c'est comme sur l'autoroute, il faut anticiper et ne pas se laisser surprendre,
sinon on risque de rater la sortie…
Mais les feux d'Afrique du Sud
sont bien entretenus, au moins à l'entrée des grands ports,
et GPS aidant nous avons pu atteindre nuitamment le "small craft harbour" de
Richard's bay sans trop de difficultés.
Pour cette étape, les prévisions météo se sont
à nouveau révélées exactes.
Même si le vent a pu être
un peu plus fort que prévu (une trentaine de nœuds) et la mer
assez creuse, le bateau n'a jamais été vraiment inconfortable.
C'est peu dire que nous sommes contents d'être arrivés au
bout de cette approche de l'Afrique du Sud qui nous inquiétait depuis
si longtemps… Il reste encore à descendre jusqu'au Cap de
Bonne Espérance mais la longueur des étapes et l'abondance
des prévisions météo nous permettent maintenant d'espérer
maitriser une navigation à peu près sûre, sinon paisible.
Nous sommes restés tout le mois de décembre à Richard's
bay, histoire de passer les fêtes en bonne compagnie avant de nous
préoccuper de continuer vers le sud. Pendant ce temps nous avons
continué à jeter un œil quotidien sur la météo
côtière et nous avons constaté que les fenêtres
sans vent de sud n'étaient ni courantes ni très larges.
La perspective d'une navigation qui devra profiter de toutes les escales
possibles
se confirme.
Presqu'une formalité…
Départ de Richard's bay le 9
janvier dans l'après midi.
Peu de vent (autour de 10 nœuds)
mais rapidement nous profitons d'un bon courant portant (3 nœuds).
Dans ces conditions, Getaway file 6 à 7 nœuds sur le fond… Pas
vraiment agréable car avec ce courant, la mer est très bizarre.
Le bateau roule et s'agite beaucoup. On dort peu et mal, mais la navigation
est rapide et efficace: 15 heures pour parcourir 96 milles et entrer à Durban
tôt le matin du 10.
Depuis Durban, il faut rejoindre East London d'une seule traite. 250 milles
sans aucun abri possible, le long d'une côte devant laquelle le courant
des Aiguilles est au meilleur de sa forme...
Cette partie de la côte
a vu se produire énormément de drames: une littérature
abondante y est consacrée.
Tout un pan de mur du yacht-club de Durban
est dédié à la mémoire d'un de ses voiliers
(d'une quinzaine de mètres) qui y a disparu lors d'une régate
en 1992, pendant que plusieurs autres équipages étaient secourus
avant de voir couler leur bateau. Brrr…
Nous sommes au cœur
du problème!
Pour passer il nous faut au moins 48 heures de temps pas trop défavorable.
72 seraient mieux…
Trois ou quatre jours de suite, la météo
confirme pour le 16 janvier l'ouverture d'une fenêtre convenable
et nous nous préparons à en profiter.
Nous mettrons en route
dès que le vent de sud-ouest faiblira suffisamment, avant de tourner
au nord. Quitte à commencer au moteur contre le reste de vent. Ça
nous laissera le maximum de chances d'arriver à East London avant
un nouveau coup de secteur sud.
Nous larguons nos amarres le 16 à 14 heures.
Agitation de mouchoirs
en passant devant les bateaux des copains qui doivent partir aussi, histoire
de les distraire de leur sieste.
Navigation
rapide et plaisante. Vent entre 10 et 20 nœuds, principalement par
le travers arrière. Notre
vitesse sur le fond monte fréquemment à 8/10 nœuds.
Nous commençons à nous habituer à avoir un bateau
rapide…Environ 36 heures pour 265 milles… Près de
7.5 nœuds de moyenne, c'est rare sur Getaway!
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Trop rapide même: en début de soirée nous prévoyons
d'arriver devant East London vers 2 heures du matin.
La perspective d'arriver
en pleine nuit, poussés fort par le vent vers l'entrée d'un
port qu'on ne connait pas, ne plaît pas trop. Surtout si on peut éviter…
Vers
minuit, à une vingtaine de milles de l'arrivée, on décide
de se rapprocher de la côte pour sortir du courant et mettre à la
cape; histoire de laisser passer quelques heures.
On est d'abord un peu
surpris par le courant qui oblige à faire un cap vrai au 340 pour
progresser au 270 sur le fond! Ça nous met quasiment au près
serré pendant deux heures, pour nous approcher à 2 milles
de la côte. On constate alors effectivement que le courant faiblit
nettement et on peut mettre à la cape. Nous dérivons à 2
ou 3 nœuds vers le sud.
A cette distance de la côte nous sommes à l'intérieur
de la route des navires montant vers le nord (ils rasent la côte
pour échapper au courant des Aiguilles et peut être trouver
un contre-courant favorable). A peine "installés", nous
en voyons d'ailleurs passer un, à une grosse centaine de mètres
au large de nous.
Boaf! Ça devrait le faire quand même…
Deux heures de sommeil léger (aidé par le "Mer-Veille")
avant de remettre en route pour atteindre au petit matin le calme du port
d'East London.
Partis en avance, nous sommes arrivés les premiers
de la fournée du jour. Dans l'après midi, quatre autres bateaux
nous rejoindront au quai du "Latimer's landing".
Pendant tout ce temps le vent a forci, avant de tourner sud en début
de soirée. Les
derniers arrivés auront sorti les cirés
et seront assez mouillés… Partis plus tard que nous,
ils ont en plus été retardés à Durban
par les autorités portuaires qui les ont fait attendre devant
la sortie pour donner la priorité du chenal aux gros navires.
Deux jours de repos à East London, dont nous profiterons pour changer
les batteries de Getaway.
Le 20 janvier les prévisions météo sont convenables
pour parcourir les 150 milles qui nous séparent de Port Elisabeth.
Insuffisantes tout de même pour espérer aller beaucoup plus
loin. En tous cas pas jusqu'à Mossel bay, situé 200 milles
plus à l'ouest.
Eh oui, nous commençons à parler d'ouest. En effet, nous
sommes maintenant arrivés à l'entrée du virage qui
va faire passer notre cap moyen du 225 au 270, dans la direction du cap
des Aiguilles (Cape Agulhas).
Cette fois encore nous jouirons d'une navigation rapide et confortable.
Un courant appréciable nous poussera jusqu'à la hauteur de "l'île
des oiseaux", dans l'Est de "Algoa Bay". Nous la laisserons
vers minuit, à moins de trois milles sur tribord.
Dans la nuit noire,
l'éclat du feu et le profil sombre de la tourelle qui la signalent
paraissaient tellement proches. C'était impressionnant!
A partir de là, plus de courant. Pour les 70 milles restant, il
faudra faire avec le vent seulement…
Nous trouverons notre bateau
bien lent, tout d'un coup…
Pourtant, guère plus de 24 heures
pour parcourir 150 milles… Nous sommes devenus difficiles!
La météo annonce pour le 23 un créneau de deux jours
sans beaucoup de vent. Ca nous convient très bien – ne serait
ce que pour nous éloigner de Port Elisabeth. Avec ça on pourra
atteindre Knysna, même s'il ne faut compter que sur le moteur (145
milles).
Nous partons seuls car Niaouli, qui n'a qu'un petit moteur et
pas de pilote électrique, préfère attendre un peu
de vent.
Au matin du 24, Knysna est encore à 20 milles devant nous.
C'est
un endroit réputé magnifique mais doté d'une passe
d'entrée assez dangereuse qu'il est préférable de
négocier de jour, à marée haute et seulement par beau
temps...
Pour le beau temps ça va, mais il est trop tard pour y
arriver de jour à l'heure de la pleine mer.
Nous sommes alors devant
la baie de Plettenberg et nous décidons de nous y arrêter.
En repartant très tôt demain matin, nous arriverons au bon
moment, vers 9 heures, devant Knysna.
Après une journée et
une nuit de repos, au calme devant une très jolie plage, nous levons
l'ancre à 4 heures.
La météo du matin confirme l'arrivée d'un vent d'Est
forcissant. Ça pourrait peut être nous permettre de poursuivre
jusqu'à Simons town, 300 milles plus à l'ouest, de l'autre
côté du cap des Aiguilles. Nous serions alors quasiment arrivés
au bout de ce parcours "initiatique". Nous craignons aussi que
ce vent d'Est se renforce au point de nous bloquer à l'intérieur
de "Knysna lagoon" si nous y entrons.
Après discussion,
arrivés devant la passe (superbe faille dans la falaise) nous décidons
de brûler l'étape et de continuer vers l'ouest.
Dans la journée, le vent se lève progressivement de la direction
prévue.
Vers midi la météo actualise ses prévisions à la
hausse et annonce maintenant que des vents de plus de 30 nœuds nous
attendront devant le cap des Aiguilles. Même portant, ça parait
beaucoup et, après réflexion, le capitaine propose en milieu
d'après midi de faire escale à Mossel bay pour attendre que ça
se tasse.
Nous en sommes alors à une douzaine de milles et nous
y arriverons en fin d'après midi.
Le "port control" de Mossel Bay, consulté par VHF, nous
signale qu'il n'y a pas de place à l'intérieur du bassin
et nous invite à aller mouiller dehors, devant le yacht-club.
L’endroit, équipé de
quelques corps morts, est certes bien abrité du sud ouest mais avec
le fort vent de nord-est qui est annoncé ca va sûrement beaucoup
chahuter… Et ça ne nous convient pas du tout… Alors,
avant d'obéir, nous décidons d'aller quand même jeter
un œil à l'intérieur.
Nous découvrons un port de pêche où il n'y a effectivement
pas de place pour les bateaux de plaisance ailleurs qu'à un unique
ponton. Et ce dernier a l'air bien rempli...
Pourtant, en regardant mieux,
on découvre quand même une place libre, cachée derrière
un gros catamaran amarré à l'extrémité du
ponton.
Nous tentons de contacter le yacht-club par téléphone pour
vérifier sa disponibilité mais personne ne répond.
Alors nous décidons de squatter l'emplacement, quitte à déguerpir
si le titulaire légitime vient à pointer son étrave.
Il se trouve qu'aucune étrave ne se présentera et nous resterons
là, confortablement à l'abri, pendant que passeront le coup
de vent d'Est attendu, puis un fort coup d'Ouest qui le suivra de près… Nous
nous féliciterons chaudement de nous être arrêtés
ici plutôt que d'avoir continué vers le cap des Aiguilles!
Nous profiterons de cet arrêt ponton pour nettoyer au jet d'eau le
pont et le gréement. Getaway était devenu tout noir de poussière
de manganèse à Port Elisabeth.
On fera aussi le plein de gasoil, livré par une pêcherie locale,
en se mettant à couple d'un de leurs bateaux à quai.
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Trois jours passent avant que la météo nous permette d'attaquer
la dernière ligne droite de notre descente de l'Afrique du sud.
Le 28 janvier nous remettons en route et doublons vers 7h30 le cap St Blaize
qui abrite Mossel Bay.
La mer forte et croisée jusque midi s'aplatit progressivement. Nous
passons la journée sur un bord de près assez confortable,
tirés par un vent guère supérieur à 10 nœuds.
Le lendemain à 7 heures nous sommes devant le cap des Aiguilles.
Celui qui – comme chacun ne le sait pas – marque vraiment l'extrémité sud
de l'Afrique et donc la ligne de partage des océans Atlantique et
Indien.
Bonne brise. Getaway file alors 7 nœuds, vent arrière, génois
tangonné.
Pendant la matinée le vent forcit progressivement
et, vers midi, il faut diminuer un peu la toile. Comme le capitaine est économe
de ses efforts, il amène deux ris d'un coup… au cas où ça
continuerait à forcir…
Et tout au long de l'après midi ça
continue effectivement à accélérer.
A l'heure de l'apéro à l'entrée
de False bay, on voit surfer nos 13 tonnes à plus de 10 nœuds
sur une mer bien formée… Et pas qu'une fois! L'anémomètre
annonce 25 nœuds apparents, ce qui fait 35 de vent réel. Sans
courant, nous n'avons jamais vu Getaway filer aussi vite et si ce n'était
la crainte d'un empannage intempestif ce serait assez jouissif…
Mais voila qu'un nouveau souci s'insinue dans la tête du capitaine:
C'est sûr maintenant, on va arriver de nuit au mouillage de Simons
Town.
Comme c'est au fond de False Bay où nous pousse le vent, il
n'y a pas vraiment d'échappatoire. La mer est bien formée
maintenant et attendre toute la nuit à la cape alors que pas loin
nous attend un mouillage confortable...
Sur la carte, le mouillage s'abrite derrière un port important signalé par
de nombreux feux… Comme c'est une base militaire, le balisage doit
y être bien entretenu... On devrait donc pouvoir approcher de son
abri sans grand danger, y amener les voiles et chercher tranquillement
un endroit où mouiller?
Alors… On continue...
Mais dans la réalité, ça ne se passe pas exactement
comme sur la carte: un premier feu, qui devait signaler un haut fond situé sur
la route d'approche, manque à l'appel… Il fait pourtant encore
jour mais nous ne voyons rien… Le feu est parti, en panne ou c'est
le haut fond qui a déménagé???
Vers 19 heures, la nuit est tombée et nous apercevons tout de même
un feu à éclat qui protège un gros rocher situé un
demi mille au nord-est du port.
Et puis ce sera tout…
Autour du périmètre du port, on n'identifiera aucun des feux
sur lesquels nous comptions pour nous diriger. Sans doute noyés
dans la foule des lumières de la ville…
C'est peu dire qu'on balise sur Getaway qui file encore à plus de
8 noeuds…
L'œil rivé à la carte et au GPS, le
capitaine donne de vagues instructions de barre, par rapport au seul feu
qu'on a identifié…
Tout en "suivant" ces directives, le second continue à scruter
la côte aux jumelles. Sans résultat…
La lune toute ronde qui se lève est une fausse amie, qui n'éclaire
que sous elle…
Dans son ombre, une masse peut être un peu plus noire que le reste… Ca
pourrait être la jetée qui protège le port. On ne l'identifie
vraiment que grâce au GPS et à la carte, même si son
ombre parait toute proche. – la nuit, il est très difficile
d'apprécier les distances.
Filant toujours très vite, on arrive enfin sous le vent du port.
Le clapot se calme suffisamment pour pouvoir mettre bout au vent, affaler
la grand voile et ralentir cette course aveugle à plus de 8 nœuds…
Profitant de l'abri de la digue, dont on n'arrive toujours pas à discerner
le contour ni l'emplacement exact, on progresse au moteur.
Doucement maintenant...
Vers la côte illuminée qui rend encore plus noir l'espace
qui nous en sépare.
Tout à coup, on distingue la forme blanche
d'un voilier au mouillage… Et puis encore un autre… Super,
on peut s'approcher!… S'il y a de l'eau pour eux, il y en a pour
nous…
Alors on y va… Doucement…
A mesure qu'on progresse,
l'état de la mer s'améliore et par 12 mètres de fond,
on finit par mouiller avant de heurter un obstacle.
Maintenant que nous sommes au calme et que le port nous apparait contre
le ciel noir, nous apercevons distinctement les feux que nous avons tellement
cherchés tout à l'heure.
Sur la côte, au milieu des
maisons, nous en découvrons même d'autres qui ne sont pas
sur la carte… Deux feux clignotants, blanc et rouge, forment un alignement
qui doit être bien utile quand on le connait et qu'on sait vers quoi
il guide...
Mais maintenant nous sommes mouillés et nous n'en avons plus besoin…
Le
vent continue à souffler assez fort mais l'ancre croche bien - même
que l'alignement qu'on vient de découvrir permet de s'en assurer.
Ca ne remue pas trop et demain est un autre jour…
Au matin, on sait qu'on est arrivés au sud de l'Afrique à des
signes qui ne trompent pas:
On a sorti les couvertures et les polaires de la naphtaline. La température
moyenne est tombée à 22°C au lieu des 28° rencontrés
couramment plus au nord.
Les mouettes gueulent sans arrêt… Plus haut il fait tellement
chaud qu'elles ne peuvent même plus crier.
Les otaries tournent autour du bateau en faisant des mines et il paraît
qu'une colonie de pingouins vit là, tout près…
Et on est encore en été!
Après toutes ces émotions maritimes, nous allons tenter de
vous faire oublier un peu le mal de mer en évoquant nos escales
qui ont toutes été plutôt agréables.
La navigation le long de l'Afrique du sud ne permet pas beaucoup de fantaisie…
Les mouillages sauvages, les criques idylliques, les havres secrets… Oublie!
Par ici il n'y a que des ports de commerce ou de pêche.
On y trouve
toujours la marina d'un yacht-club – parfois ce n'est qu'un ponton
ou un quai – où les bateaux visiteurs sont généralement
bienvenus mais où il n'y a pas toujours de place disponible.
Deux
ou trois petites marinas ont été développées
hors des ports, pour valoriser des programmes immobiliers de loisirs, mais
la plupart sont difficilement accessibles à nos voiliers à fort
tirant d'eau et leurs entrées sont toujours assez délicates.
Bref, la route est longue, les escales possibles peu nombreuses et, météo
oblige, chacune est "quasi obligatoire".
Le problème de place aux escales pour les bateaux visiteurs est
devenu cette année un vrai problème pour nos hôtes
sud africains.
La plupart des voiliers voyageant vers l'Ouest dans l'océan
indien, choisissaient jusqu'alors la sortie par la mer Rouge pour rejoindre
la Méditerranée et l'Europe – tous nos copains l'ont
fait.
Depuis quelques temps – surtout depuis cette année – les
mêmes navigateurs entendent éviter les pirates somaliens et
abandonnent les routes du Nord Ouest de l'océan Indien.
Du coup, tous ceux qui avant préféraient éviter le
cap de Bonne Espérance s'y précipitent maintenant en masse,
contribuant à encombrer les quelques installations d'accueil sud
africaines qui n'en demandaient pas tant.
Les conversations de yacht-club y gagnent en intensité et en diversité,
mais les pontons ont du mal à héberger tout le monde…
C'est le premier abri possible en Afrique du sud, quand on arrive du nord.
Une rade immense, draguée et aménagée, abrite le plus
gros port vraquier du pays – ce serait même, paraît il,
le plus grand terminal charbonnier du monde.
A l'intérieur, au nord
de l'entrée, avant de s'enfoncer dans le port de commerce on trouve
le bassin du "small crafts harbour"; juste après l'embouchure
de la rivière où est installé le "Zululand Yacht
Club".
A la VHF, les autorités portuaires guident les voiliers arrivants
vers cet endroit (appelé aussi Tuzzi Gazzi Basin) pour y accomplir
les formalités d'entrée.
C'est ainsi que nous avons été invités,
le 22 novembre à quatre heures du matin, à venir nous amarrer
au quai "international" pour attendre la visite des autorités.
Elles viendront, assez tôt pour un dimanche, et avant midi tout sera
terminé – Des visites rapides, civiles et plaisantes.
Autour du bassin du "small crafts harbour" s'est développé un
programme immobilier qui constitue maintenant un quartier bien équipé en
bistrots, restos, boutiques et hôtels – genre Le Crouesty en
plus petit.
Sur le quai, juste en face de nous, un restaurant étale sa terrasse
de vacances au soleil.
Après deux semaines de mer, c'est bien tentant… Nous
irons sans attendre y soigner notre mal de terre, en dégustant notre
premier déjeuner sud africain.
C'est là que nous découvrirons
que dans ce pays, un plat servi pour une personne suffirait à nourrir
une famille française moyenne. Ceci explique peut être que
la rue nous paraisse peuplée de piliers de rugby et qu'on s'y sente
quasiment anorexique.
On trouve aussi dans ce bassin la "Tuzzi Gazzi marina"; un équipement
privé pour lequel quelqu'un vient nous proposer des tarifs et une
place, dès après le passage des autorités. M'enfin,
c'est assez cher et proposé de façon pas très chaleureuse.
Avant de s'engager on va d'abord aller voir le "Zululand Yacht Club" – dont
on nous a dit grand bien, déjà avant de quitter Mada. Ses
installations sont situées juste en face de Tuzzi Gazzi, sur la
rive opposée d'une rivière où flottent des pontons.
On y accède par un pont situé un bon kilomètre en
amont. L'occasion de nous dégourdir un peu les jambes (sur deux
bons kilomètres, si vous comptez bien…).
Nous prenons très vite notre décision: nous viendrons nous
installer au Zululand Yacht Club.
L'accueil y est nettement plus chaleureux.
L'endroit est plus champêtre, organisé et calme. Et bien moins
cher aussi…
Seulement voilà: les pontons sont complets!!!
Deux à trois rangs de voiliers de passage s'agglutinent déjà au
quai des visiteurs. Il reste seulement des mouillages à l'entrée…
Le lendemain nous venons donc nous amarrer à une bouée, en
attendant qu'une place se libère sur un ponton. La zone de mouillage
est bien protégée et on est près de la rive qu'on
rejoint sans peine en annexe.
La perspective d'une place de ponton ne nous
parait plus si enviable...
Ici, au moins, on peut encore se baigner derrière Getaway. Bien
sûr, l'eau est un peu fraiche, mais c'est agréable…
Jusqu'à ce qu'on nous fasse la blague: "Faites quand même
attention aux crocodiles et aux hippopotames".
On en rigole encore…
Mais ce n'était pas une blague!!!
Eh bé non, même que c'était vrai…
Un matin on aperçoit à 50 mètres du bateau, juste
affleurant à la surface de l'eau, deux petites oreilles rondes,
rapidement suivies d'une grande gueule qui baille… Pleine de dents…
Un
hippo!.. un hippopo!!!
"
Eh Germaine vient voir, tu me croiras pas: Ya un hippopotame derrière
le bateau!"
On n'a pas vu de crocodile… Peut être qu'ils sont plus timides… ou
que ce n'était pas la saison… ou qu'ils n'avaient pas bien
faim…
Dans ce pays, on aura toujours un peu de mal à se souvenir qu'on
est en Afrique – à la ville, mais à la campagne aussi,
et même en safari. Tant qu'on ne voit pas d'animaux, on oublie.
En tous cas c'est décidé: dorénavant nous prendrons
toutes nos douches au yacht-club!
Car il y a tout ce qu'il faut dans ce
yacht-club: douches, lave et sèche
linge, resto, bar, shipchandler, piscine et plein de barbecues.
Le barbecue s'appelle ici le "Braaï" et c'est une institution
nationale.
Le weekend, les yacht-clubistes arrivent en groupes et s'installent
dès 9 heures du matin sur la pelouse, autour des BBQ en briques,
des tables et des bancs qui sont construits au bord de la rivière.
Il suffit d'apporter son "manger" et son charbon.
Bière aidant, l'ambiance est rapidement festive.
C'est ici, depuis notre mouillage du "Zululand Yacht Club" (ZLYC)
que nous assisterons à l'arrivée les bateaux qui nous suivent – des
copains qu'on connaît déjà et d'autres dont on fera
la connaissance ici.
Psyche (qui a finalement choisi d'attendre au moins un an avant d'affronter
les pirates somaliens sur le chemin de la Thaïlande) et Ylang, avec
lesquels nous naviguons depuis le Kenya;
Niaouli qu'on avait aperçus
arrivant à Mayotte;
Danaë, Maddalena et les Québécois
d'Alero qu'on n'avait encore jamais rencontrés (ces derniers ont
rendu désirable à Anyvonne l'idée d'aller tâter
du froid dans le grand nord canadien quand on en aura assez des Caraïbes…).
Ils s'ajouteront à Anka et Distribil qui nous avaient précédés
ici et sont en plein travaux (ces deux derniers bateaux sont de St Brieuc
et Anka est un "sister-ship" de Getaway – en 1998, avant
de partir, on l'avait aperçu à Binic, tout neuf; mais il
a fallu attendre Nosy Be pour qu'on rencontre fugitivement Michel, son
propriétaire!!!).
Il faut mentionner aussi ceux qu'on a croisés là mais qu'on
n'a que peu connus: Mary Ann, Vouga, Guillaume (qui faisait tout seul le
tour par Panama, pour déménager son bateau de la Réunion
jusqu'à Raiatea, où s'est installée sa famille!),
Prosper (un bigouden solitaire, pressé de rentrer pour être
en Bretagne au mois de mai, y revoir ses filles et regarder le mondial
de football à la télé; trois mois avant de repartir – par
la méditerranée – vers la Thaïlande!!!), Regolarita (un bateau allemand que nous croisons parfois depuis Zanzibar).
Ils sont en majorité français et tous sont francophones,
avec surtout des bretons d'ailleurs …
Les sud africains sont étonnés
d'en voir autant…
Pour nous aussi cette profusion est rare et nous en profitons pour beaucoup
partager: des repas, des fêtes, des braaïs, des apéros,
des ballades, des rencontres avec des rhinos, des supermarchés,
des taxis, des recettes de cuisine, des rigolades, des "eisbeins" (jambonneaux
rôtis à la bavaroise), de la bière, du vin du Cap et
encore plein d'autres choses.
Nous décidons rapidement de profiter de cette ambiance jusqu'en
janvier pour passer les fêtes et caréner Getaway avant de
continuer vers le sud.
Surprise, surprise…
Nous découvrirons les environs de ce port en voiture de location
ou en taxi.
A part Tuzzi Gazzi, rien n'est à portée de marche à pieds – pas
pour nous en tous cas.
Tout le coin est une immense zone industrielle "champêtre"…
C'est-à-dire
que des usines énormes (pulpe de bois pour pâte à papier,
charbon, aluminium…) sont installées ça et là,
au milieu du bush et de rien, à des kilomètres les unes des
autres.
Les pylônes électriques qui les alimentent tiennent
lieu de végétation haute… à travers laquelle
un réseau de voies express permet de circuler.
Au cœur de cette zone, une sorte de "ville nouvelle" s'est
développée, sans aucun centre-ville.
Les deux endroits qui
en tiennent lieu sont des centres commerciaux, autour desquels s'étalent
des quartiers résidentiels ou dortoirs.
Le CBD (Central Business District) est une sorte de Parly 2 autour duquel
seraient éparpillés plein de gros commerces de toutes sortes,
marchands de voitures, quincailleries… ainsi que l'hôpital
que le second aura l'honneur de tester pour vous (très bonne prestation).
L'autre
centre – le plus proche de la marina et le plus petit aussi – est
celui de "Meerensee".
S'il est accessible à pied depuis le yacht-club aux bons marcheurs,
on peut aussi l'atteindre en taxi pour 30 rands la course (3 euros).
On y trouve deux supermarchés de taille moyenne, qui suffiront le
plus souvent à nos besoins.
C'est la première fois que nous
découvrons une telle structure d'aménagement. Ni ville, ni
zone industrielle, ni campagne… Peut être nos villes nouvelles
françaises, à leur début? St Quentin en Yvelines où seraient
installées d'énormes usines?
Les gens du cru occupent leurs loisirs en shopping dans les Malls du CBD,
en ripailles autour des braaïs ou à la pêche au gros
quand ils ont un bateau.
La vie culturelle locale semble limitée.
On a même rencontré un chauffeur de taxi qui nous a avoué regretter
Durban et s'ennuyer beaucoup ici.
Mais "ville nouvelle" veut
dire aussi créations d'emplois, alors ils font contre mauvais cœur,
bonne fortune.
Pour notre groupe de "yachties", l'organisation va être
vite au point: deux fois par semaine les "mémés" se
partagent un taxi pour aller faire les courses, magasiner et préparer
activement les fêtes; pendant ce temps, les mecs peuvent se consacrer
aux travaux navals…
Noël se passera en famille, après un réveillon organisé la
veille sous forme d'un braaï très français.
Pour le
nouvel an, on se retrouvera tout un groupe dans le lodge tenu par un frenchie
fraîchement installé dans la région.
Entre les deux,
vos marins préférés jouiront d'un très beau
cadeau du père noël qui les a invités à un safari
de luxe dans une réserve privée… On vous racontera
plus tard…
C'est la troisième grande ville du pays…
Le port en constitue
le cœur et depuis la marina, il suffit de traverser la rue pour y
flâner.
Autour de celle-ci se pressent deux yacht-clubs. Le "Royal Natal Yacht
Club" (RNYC) et le "Point Yacht Club".
Nous avons choisi
le second, qui paraissait un peu moins classieux et peut être plus
accueillant.
Pendant qu'il nous fournira de la bière, quelques diners et des "happy
showers", nous profiterons depuis le bateau, de la connexion WiFi
gratuite offerte par son concurrent… On n'est pas chauvins…
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Juste à la porte de la marina, le centre ville possède quelques
bâtiments étonnants.
Des immeubles fin de siècle qui
abritent l'hôtel de ville, la poste et l'office de tourisme, des
musées intéressants. Les rues sont larges et agréables.
Près des pontons sont concentrés les magasins spécialisés
au service des bateaux. Ils sont souvent tenus par des passionnés
de marine et de navigation.
L'un d'eux – qui vend des cartes marines,
de l'accastillage de seconde main, des livres d'occase, etc… – est
célèbre dans le coin comme "gourou" fiable de la
météo locale (ça se respecte ici)… Son magasin "cruising
connections" est situé dans Fenton Lane, juste en face de la
marina. (Pour les accros du web: www.cruisingconnections.co.za). Il a écrit
des guides côtiers pour la région, que nous avons trouvés
fort utiles et il est en plus absolument charmant. La veille de notre départ
nous sommes passés le voir pour qu'il nous donne son aval avant
de mettre en route.
A deux pas, le long de l'avenue sur le quai, on croise la vitrine d'une
boutique assez extraordinaire. Son nom: "Pretty Ancient Antics".
C'est la caverne d'Ali Baba… Pleine d'objets marins véritablement
anciens… De l'argenterie de croisière ou afrikaan, des bateaux
en bouteille, des instruments du temps de la marine en bois, des panneaux
de réclame… Des tas de trésors… Quelques objets
africains aussi: masques, instruments de musique, plats de service zulus… Superbe… Incroyable!
Plus loin, derrière le magnifique syndicat d'initiative avec ses
escaliers de marbre, on trouve le "Workshop" installé dans
l'ancienne gare ferroviaire (façon musée d'Orsay). C'est
un centre commercial qui abrite une grosse boutique de "curios et
souvenirs". La masse habituelle des objets "évidemment
made in China" y côtoie des productions plus locales: sculptures,
peintures, artisanat plus ou moins inspiré et surtout des objets
plus anciens et véritablement africains: armes, masques, tissus,
statues, portes sculptées. La plupart sont originaires du Mali … Copies
ou originaux? Ça n'a pas d'importance pour nous, quand ils sont
beaux. Une nouvelle fois on s'est encore "lâchés"… "On
ne va pas revenir en Afrique de sitôt…"
Mais nos fonds baissent, il est temps qu'on reparte.
Comme dit le proverbe
de Gérard: "Peu importe le niveau des prix, c'est seulement
quand il n'y a rien à acheter qu'on fait des économies…".
Une fenêtre météo qui s'ouvre le 16 janvier va nous
y aider. Ne restent à faire que quelques courses d'approvisionnement
et le parcours des formalités – Car ici, ce n'est pas comme à Richards
bay. Pour l'entrée comme pour la sortie, il faut se déplacer.
C'est vous qui faites le circuit des bureaux et il est même assez
long pour les vieilles jambes…
Encore un port de commerce; le seul entre Durban et Port Elisabeth sur
350 milles de côtes.
Situé à l'embouchure d'une rivière,
facile d'accès et bien éclairé, c'est un abri appréciable.
Par contre, pour les bateaux de plaisance ce n'est pas la riviera…
Au
fond du port, juste avant un pont qui leur bouche la rivière, quelques
voiliers sont amarrés à des mouillages en ligne. Derrière
eux on aperçoit les installations d'un yacht-club qui ne nous ont
pas paru facilement accessibles aux bateaux.
Sur la rive opposée,
une sorte de quai construit sur pilotis, héberge deux ou trois rangs
de bateaux amarrés à couple: c'est le "Latimer's landing".
On y trouve un restaurant, un petit shipchandler et un bâtiment qui
abrite une douche et des sanitaires dans un état d'entretien assez
douteux.
Au mouillage comme au quai, les bateaux qui habitent là ne
semblent pas sortir souvent. On a un peu l'impression qu'ils sont prostrés
dans la nostalgie de leurs navigations passées…
Certains pourtant doivent naviguer parfois: au Latimer's landing, nous
sommes venus nous mettre à couple d'un catamaran, qui fait du charter
de promenade. L'excursion qu'il propose est prévue pour durer une
heure et il parait qu'il trouve des clients plusieurs fois par semaine.
Il ne sortira pas pendant notre séjour. Nous avons de la chance…
Descendre du bateau au Latimer's landing est parfois assez délicat,
selon la marée. Le quai sur pilotis ne dispose pas d'échelles.
Pour nous, coup de chance: le cata auquel nous sommes amarrés offre
un ponton d'embarquement flottant à ses clients. Nous en profiterons.
Il est clair que si les tarifs sont sensiblement les mêmes, peu de
choses nous rappellent ici les facilités des marinas et yacht-clubs
que nous venons de quitter.
Quand même, dans la boutique du petit ship sur le quai – qui
est aussi en charge de la gestion du stationnement des bateaux et de sa
rétribution – nous faisons une rencontre intéressante.
D'abord un commerçant qui arbore derrière son bureau un écriteau étonnant: "Our
prices may vary widely, according to customer's attitude"… ("Nos
prix peuvent varier considérablement, selon le comportement du client").
C'est ce qu'on appelle en France "faire des prix à la tête
du client", mais on ne l'avait jamais vu revendiqué comme ça,
par écrit.
Il nous explique qu'il se méfie des attitudes arrogantes et trouve
que pas mal de français en sont affligés.
Nous trouve-t-il
plus à son gout? En tout cas, dès notre première visite,
il nous engage dans une longue conversation.
Au bout d'un moment il nous
dévoile son arme secrète: Kirsten, la jeune fille qui est
assise à côté de lui, discrètement (et silencieusement).
Elle parle parfaitement français et peut ainsi lui rapporter nos
commentaires désobligeants. Il parait qu'ils sont assez courants…
Ah… Ah… Elle
est bonne… Non?
Au delà de son rôle de piège à français,
cette jeune fille se révèlera très sympathique quand
elle se laissera aller à parler. C'est une sud-africaine voyageuse
et curieuse qui nous entretiendra de ses expéditions solitaires
et "sac-à-dos" dans le pays. Elle tient sur la sécurité un
langage très différent du discours dominant. Plus raisonnable,
moins affolé et paranoïaque. En tout cas plus proche du nôtre.
Et
pour les courses? Les délices de la ville se tiennent à plus
d'une demi-heure de marche forcée le long d'une voie express. On
arrive alors dans une sorte de zone commerciale et industrielle qui s'étale
sur des kilomètres, sans centre de gravité… Kirsten
nous avait dit que c'était accessible à pied, mais elle a
de bonnes jambes et nous préfèrerons appeler un taxi... – Un détail
important: nous ne pouvons plus nous passer de téléphone
portable. Ne serait-ce que pour appeler un
taxi quand on est à "tataouette les pins". On a donc sacrifié au
modernisme et on achète une puce dans chaque pays où on passe.
Il parait que sur la rive opposée, le yacht-club est plus propre
et plus accueillant. Nous n'avons pas vérifié. Au prochain
tour, peut être…
Vous aurez compris que nous n'avons pas découvert ici une étape
inoubliable. Mais bon, on n'a pas trainé en ville, alors …
Port Elisabeth est un grand port de pêche et de commerce situé dans
l'ouest de "Nelson Mandela bay" – la ci-devant "Algoa
bay". Il y est protégé par une longue jetée battue
par les vents d'Est.
Un guide local avertit: "la côte prend
le vent de plein fouet… Pour le plus grand plaisir des véliplanchistes…".
Mais nous ne sommes PAS des véliplanchistes!
Installée à l'intérieur du port, la marina locale
y a été aux trois quart détruite par une tempête
l'an dernier.
Le bassin est immense et, par vent d'Est, la jetée
laisse un fetch d'un bon mille sous son vent. C'est suffisant pour lever
un méchant clapot dans la marina, malgré le barrage flottant
qui la protège.
En octobre dernier, à l'occasion d'un très fort coup de vent,
ce clapot s'est creusé à plus d'1.5 mètre et le barrage
a été arraché.
Il a alors dérivé, entraînant
avec lui les pontons et leur contenu; jusqu'au quai contre lequel ils se
sont empilés – ça devait ressembler à la marina
de Concarneau après la tempête de 1987.
Huit bateaux ont coulé.
Nous avons rencontré un espagnol qui y a perdu le sien alors qu'il était
retourné passer un mois au pays. Pas d'assurance et retour difficile!!!
Plus au nord, la rumeur publique disait que tout était détruit à Port
Elisabeth et que nous serions sans doute obligés de nous amarrer à couple
de chalutiers bien gras, "protégés" par des pneus
bien noirs et bien crados… Ambiance…
Au petit matin de notre arrivée, nous avons de la chance: Au seul
ponton flottant encore – même si à moitié arraché et
branlant beaucoup, penchant fort du côté où il va peut-être
couler – il reste deux places disponibles.
Dubitatifs, nous tournons
autour de la ruine.
Deux travailleurs matinaux occupés à réparer
l'ouvrage, courbés contre le vent qui a déjà forci,
nous font signe d'approcher, nous assurent que ce sont là de bonnes
places et s'offrent pour prendre nos amarres.
Ç a nous décide à y
aventurer notre étrave…
Sitôt amarré le capitaine
se précipite pour acheter trois gros pare-battage chez un shipchandler
local: Il faut protéger le bateau des sauts de cabri de ce ponton
de guingois.
Finalement, pris dans un réseau d'aussières
comme dans une toile d'araignée et bardé de pare-battage,
Getaway est en sécurité…
Plus tard, Niaouli viendra occuper la dernière place libre sur notre
bâbord… Les autres choisiront les chalutiers…
Pendant l'après midi et tout le jour suivant le vent va continuer à forcir
de secteur Est; jusqu'à 40 nœuds!
Le ponton bouge beaucoup
et, avec le vent par le travers, les bateaux tirent fort sur leurs aussières!
C'est assez inconfortable mais ça tient...
Qu'est ce que ça
a dû être en octobre, quand ça soufflait à plus
de 70 nœuds…
Heureusement pendant ces deux jours il y a le yacht-club, son bar-restau
et ses douches…
Il y a Denis et Graïda de Niaouli avec qui boire
des coups et discuter météo… Parler "molas" aussi:
Graïda est originaire des San Blas et est une experte (cf. le numéro
de la gazette sur Panama)! Denis, lui, est juste un mec normal… Breton
quoi!
Port Elisabeth possède un terminal minéralier trrrrès
actif.
Pendant tout notre séjour nous serons juste sous son vent
et des kilos de manganèse nous seront ainsi livrés à domicile.
Une poussière noire qui recouvre le pont et imprègne le gréement,
les écoutes…
Et il n'y a pas d'eau au ponton pour s'en débarrasser…
Plus
tard, il nous faudra frotter fort pour retrouver la couleur du pont.
On ne peut pas dire que ces conditions de séjour nous aient incités à le
prolonger et à prendre le temps d'explorer la ville.
Juste la première
rue à la sortie du port, sur le chemin du supermarché le
plus proche…
Nous y rencontrerons une boutique de produits africains
artisanaux plutôt originaux. Evidemment, nous ne résisterons
pas à l'envie de la visiter et d'y faire quelques achats…
Ce
sera l'occasion d'établir un contact avec la propriétaire
qui est à la caisse. Conversation aidant, elle nous emmènera
en voiture jusqu'au super marché, avant de nous ramener au port
avec nos sacs pleins…
Cool… Merci madame.
Cette boutique s'inscrit dans le cadre du commerce équitable et
propose des objets tout à fait intéressants; pas nécessairement
traditionnels mais ingénieux, rigolos et réalisés
localement. Elle s'appelle "Wezandla gallery & craft centre" et
se trouve 27 baakens street à Port Elisabeth. Ceci est une publicité gratuite…
La baie des moules est la dernière étape de notre progression
avant le cap des Aiguilles et le sud de l'Afrique.
C'est un port historique
où le 3 février 1488, jour de la St Blaise, Bartolomeu Diaz
a fait escale, premier européen à être allé mettre
les pieds de l'autre côté du cap de Bonne Espérance.
C'est aujourd'hui, un port de pêche avec des chalutiers et les pêcheries
qui vont avec.
Quelques bateaux de plaisance sont hébergés
sur un unique ponton géré par le yacht-club local. Dominant
les petits bateaux du ponton, amarrés à la
jetée,
deux énormes
remorqueurs de haute mer, genre abeilles, sommeillent en attendant leur
heure. Ils sont là pour assister les installations pétrolières
installées à une vingtaine de milles au large.
Au dessus du port, une petite cité touristique un peu somnolente
que nous avons pris plaisir à parcourir. Les commerces y sont accessibles à pied
et son air de station de vacances est sans doute accentué par les
maisons accrochées à la colline.
Murs clairs et tuiles rouges
lui donnent des allures de bourgade méditerranéenne.
Au centre
ville, dans une galerie marchande, l'agence philatélique
de la poste est tenue par un monsieur très sympa, avide de parler
de son pays à ses visiteurs. Surtout aux Français d'ailleurs,
car il est avant tout Afrikaner et donc anti British. (cf. la guerre des
Boers)
Il nous assure que l'afrikaan est la première langue du pays
et que l'anglais y est assez peu parlé; même quasiment pas
du tout dans certaines provinces.
C'est vrai, nous avons constaté autour
de nous que blancs et noirs communiquaient sans l'aide de l'anglais. Nous
avons aussi appris plus tard qu'une bonne part des enseignements de l'université de
Kaapstad (La ville du Cap ou Cape town) est assurée en Afrikaan.
Tout de même, nous n'avons pas souvent rencontré d'incompréhension
en parlant anglais.
Il nous parle aussi de son fils.
Comme son grand père, celui ci
s'appelle Nantes et il voudrait savoir s'il y a bien en France une ville
qui porte ce nom? Ce que nous lui confirmons avec enthousiasme.
Tout ceci
nous a entraînés à parler histoire, édit de
Nantes, réfugiés huguenots en hollande, expatriation de ceux
ci en Afrique du Sud, etc…
On ne s'est pas ennuyés
et il était
super content de savoir que la ville de Nantes existait bel et bien… Cela
nous a rappelé l'isolement du monde et l'autarcie extrêmes
qui ont été longtemps une caractéristique de la société boer.
Autre
détail rigolo: Ce postier appose un tampon spécial
sur le courrier posté près de chez lui.
Ce tampon commémore
le gros arbre qui existait ici il y a quelques 500 ans, dans le creux duquel
les marins en escale déposaient leur courrier. La levée était
assurée par les suivants, partant dans l'autre sens…
Nous
avons sacrifié au rite et nous aussi avons posté du courrier
dans le trou (pas de l'arbre, plus prosaïquement celui de la boite
au lettres).
Située dans le creux de False bay, à l'Est de la racine
de la presqu'île rocheuse qui porte le cap de Bonne Espérance,
Simons Town est la première escale importante à l'ouest du
cap des Aiguilles.
Le port est militaire mais le yacht-club, assez coquet, offre un accueil
chaleureux et sympathique aux voileux de passage.
Dominant le port et le mouillage, la bourgade s'étale sur les pentes
abruptes de la montagne qui borde ce côté de False Bay.
Sa
rue principale qui longe le rivage, conserve les bâtiments du milieu
du XIXème siècle qui constituaient alors l'essentiel de Simon's
Town. Très bien entretenus ils sont le décor d'une promenade
sympathique d'un bon kilomètre qu'on appelle ici "the historical
mile".
L'ambiance y est vacancière et rafraîchissante.
Derrière cette rue principale et "historique", la ville
s'étoffe de quelques rues disposées en étage le long
de la pente et bordées de constructions plus modernes.
Cet ensemble offre un environnement à la fois spectaculaire et "cosy" au
mouillage qu'il protège.
Pour ce qui est de l'organisation de la vie, des réparations, des
courses… Simons town n'offre pas grand-chose mais est plutôt
bien située.
Un train de banlieue la met à une heure et demie
de Cape Town, depuis le mouillage.
Le trajet en voiture prend le même
temps, le long d'une route souvent verdoyante, dans le décor spectaculaire
de la célèbre "Table Mountain" et des sommets voisins
qui dominent la ville.
Cette option est tout de même à éviter
aux heures de pointe, quand Cape Town vous rappelle qu'elle est avant tout
une grande ville, n'ayant rien à envier à ses consœurs
européennes.
C'est aussi un bon point de départ pour une découverte touristique
très agréable de la région: tour des vignobles et
des domaines viticoles; visite de Stellenbosch dont les nombreuses galeries
d'art et l'université sont installées dans des bâtiments à la
pure architecture coloniale hollandaise; tour de la péninsule du
Cap et route en corniche absolument extraordinaire surplombant l'Atlantique.
La nature est belle dans cette province.
Au bar du yacht-club nous avons repris nos habitudes de "partage" avec
les mêmes boaties que nous retrouvons au terme de leur descente,
plus quelques autres que nous découvrons ici: Do (que nous avons
pourtant croisé il y a quelques années à Raiatea),
Alejo immatriculé à Ajaccio, Blue
Falcon (Deux écossais
qui ont eu tellement de misères pour le renouvellement tardif de
leur visa sud africain. Leur mésaventure nous a permis de nous y
prendre à temps pour le renouvellement du notre…)
A notre arrivée, il n'y avait pas de place disponible aux pontons
et Getaway s'est amarré à un coffre, à l'extérieur
de la marina.
Le mouillage est bien abrité et ne s'agite un peu
que par vent fort de secteur Nord.
Nous aimons bien cette situation où le bateau évite avec
le vent et, comme à Richard's bay, notre besoin d'une place de ponton
se fait vite moins pressant. Pour le court terme en tous cas..
Car nous avons maintenant un problème nouveau: nous venons de décider
de rentrer en France pour six mois.
Notre traversée de l'Atlantique
est donc repoussée à Décembre et il nous faut trouver
un endroit convenable pour y abandonner Getaway jusque là.
Trop d'oiseaux nichent dans la baie et dissuadent d'un long séjour
ici, au mouillage sur corps mort. Nous en constatons l'effet sur un catamaran
abandonné là, sans doute depuis de longs mois, et qui sert
de logis à une colonie de cormorans.
Dans la marina, seulement protégée du nord par un barrage
flottant, l'unique place qu'on peut nous proposer se trouve à l'extérieur
du ponton le plus externe.
Dans cette région, les tempêtes
d'hiver viennent du nord-ouest.
La marina est un peu abritée par
la côte nord de la baie, mais le fetch est suffisant pour que se
développe alors un puissant clapot. Nous l'avons nous même
constaté avec un vent modéré… Alors ça
doit remuer fort sur les pontons pendant ces tempêtes… Surtout
sur ceux de l'extérieur…
On décide donc de chercher
ailleurs.
C'est dans la baie de Saldanha, à une soixantaine de milles au
nord de Cape Town que nous trouvons notre bonheur. Dans la marina du club "Mykonos".
C'est encore une de ces marinas construites pour valoriser un programme
immobilier de loisirs.
Celui-ci, réalisé dans le plus pur
style "Santorin", fait un peu Disneyland grec; mais la marina
bien protégée et de bonne qualité, a l'air sûr.
Des places y sont disponibles, pour un prix très convenable.
Nous pouvons donc dès maintenant nous consacrer à acheter
nos billets d'avion et penser à organiser notre retour.
Quand nous reviendrons, nous aurons sans doute les mains calleuses des
travailleurs du bâtiment, mais nous serons aussi sûrement super
contents de reprendre les manches des pinceaux, avant la barre qui nous
guidera alors à travers l'Atlantique vers le Brésil… Joyeux
Noël…
Il y aura encore des choses à raconter.
(Il est temps de terminer, le capitaine devient lyrique!)